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Comptes rendus rédigés par Dr Marina Thomas (Dermatologue, France) et Dr Oriol Yélamos (Dermatologue, Espagne)
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Orateurs: Josep Malvehy, Veronique del Marmol, Elisa Cinotti et Javiera Pérez
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Cette session offre un aperçu des nouveautés en imagerie cutanée diagnostique. Bien sûr, comme le font remarquer les orateurs, nul besoin d’avoir toutes ces machines dans un service ou un cabinet, sauf à faire exclusivement de la recherche ou de la surveillance de patients à risque. Les prouesses techinques et la rapidité d’amélioration rendent optimistes néanmoins.
On regrette de ne pas pouvoir vous faire partager les superbes images, souvent plus parlantes !
Photographie du corps entier 2D ou 3D avancée pour la détection du mélanome
Josep Malvehy
Depuis une dizaine d’année, certains patients présentant des syndromes des naevi atypiques, ou des lésions multiples peuvent être surveillés par dermoscopie digitale
Le but est de réduire le « nombre de lésions à retirer pour éviter un mélanome ». La sensibilité de la technique de surveillance par photographie corps entier et dermoscopie digitale séquentielle est appréciable au fil des examens puisque qu’elle passe bien logiquement de moins de 25% lors de la prise initiale de photos à près de 100% lors de suivis ultérieurs
Des solutions automatisées standardisées de photographie corps entier en 2D 3D et/ou en lumière polarisée à haute résolution apparaissent actuellement sur le marché. Le temps d’acquisition est réduit.
Certains scanners autonomes qui acquièrent un corps entier en 10 minutes intègrent également des photos dermoscopiques des lésions
Apprentissage profond et imagerie non invasive pour quantifier les atypies kératinocytaires dans un champ de cancérisation
Veronique del Marmol
La délimitation des champs de cancérisation passe par la reconnaissance de la dysplasie kératinocytaire / atypies nucléaires (noyaux irréguliers élargis hyperchromatiques), et des changements architecturaux (amincissement de la couche cornée), idéalement par méthode non invasive permettant de s’affranchir du faible échantillonnage des biopsies traditionnelles. L’examen manuel souffre d’une faible reproductibilité interopérateur.
La microscopie confocale a déjà été utilisée. A présent la LC-OCT permet également d’acquérir des images puis de scorer l’atypie des champs cutanés in vivo. Comme dans beaucoup de situations actuellement, l’IA (intelligence artificielle) permet de réduire drastiquement le facteur temps, d’améliorer la reproductibilité. Elle a un meilleur pouvoir de discrimination et obtient de meilleurs score AUC (aire sous la courbe) que le clinicien.
Dermoscopie de haut grossissement (x400 à x600) : à un pas de l’histologie ?
Elisa Cinotti
La dermoscopie de haut grossissement permet actuellement de visualiser des détails cellulaires comme le pigment par exemple, à l’instar de ce que l’on peut voir sur des images de confocal. Cette technique permet de détailler les cellules pigmentées (mélanophages polymorphes bleu violet, kératinocytes polygonaux, mélanocytes dendritiques), l’architecture de la jonction dermo épidermique et la vascularisation. La technique est limitée en cas de lésions hyperkératosiques, ou bleues (car profondes !) et toujours très opérateur dépendante
Certains dispositifs permettent également d’ajouter une source lumineuse par fluorescence, qui offrent des images de fluorescence endogène surprenantes par la qualité d’analyse quasi cytologique ! L’avenir sera peut-être également aux anticorps marqués comme le cetuximab 800 cW
Imagerie non invasive et chirurgie du lentigo malin : où en est-on ?
Javiera Perez
En LC OCT comme en miscoscopie confocale, on peut reconstruire par chevauchement d’images la marge virtuelle repérée par l’opérateur, et procéder à un Mohs virtuel pour réduire les marges d’exérèse lors des chirurgies de Dubreuilh. Sur le plan sémiologique : la présence de gros noyaux atypiques de mélanocytes, d’ascensions pagétoides, d’un effacement de la membrane basale font suspecter un mélanome. On peut également apprécier le folliculotropisme.
L’oratrice a également évoqué l’utilisation de l’immunomohs qui consiste en l’utilisation, en plus des colorations extemporane à l'hématoxyline et à l'éosine, de coupes avec analyse en immunohistochimie rapide pour SOX 10, à temps d’incubation réduit à une dizaine de minutes, ce qui augmente les performances de détection.
Orateurs: Giovanni Pellacani, Javiera Pérez, Sandra Schuh et Mariano Suppa
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Panorama des techniques d’imagerie cutanée non-invasives : Actuellement il existe plusieurs méthodes concurrentielles qui ont chacune leurs défauts et avantages
Petit prérequis :
Dans la microscopie confocale / RCM (Reflectance confocal microscopy) on étudie une image composée point par point à partir de la réflexion directe du signal lumineux émis. Ces techniques ont une bonne définition (capacité à discriminer les niveaux de gris)
Dans l’OCT (optical coherence tomography) et la LC OCT on analyse (soit point par point l’OCT, soit ligne par ligne la LC OCT) l’interférence du signal entre l’objet et un miroir de référence. Il y a une bonne résolution (capacité à discriminer deux points distincs /pixels)
La profondeur de pénétration est limitée au derme papillaire, la résolution est de 3–10μm)
RCM in vivo
Giovanni Pellacani
Que peut-on voir en RCM ? des critères majeurs et mineurs pour diagnostiquer les mélanomes : les ascensions pagétoides, les atypies cellulaires et architectures, les thèques.
Quand en dermoscopie le nombre de lésions à retirer pour ne pas rater un mélanome est de 8 à 30, il passe à 3 à 5 en confocal.
Le confocal avec une égale sensibilité (98%) et une meilleure spécificité (48%) apporte des informations supplémentaires au niveau cytologique : les petites lésions, les lésions faciales (en montrant le folliculotropisme), les lésions muqueuses, les nevi atypiques, les lésions achromiques.
Elle permet d’éviter des exérèses. Les améliorations techniques de la vitesse d’acquisition permettent maintenant d’acquérir une mosaïque en 1 min, et d’examiner un naevus difficile en au maximum 3 minutes.
Le niveau de preuve est élevé, confirmé par une étude randomisée retrouvant une épargne chirurgicale de 30% (JAMA Dermatology Effec of reflectance confocal microscopy for suspicious lesions on diagnostic accuracy in melanoma Pellacani et all 2022)
La technique permet d’épargner environ 15 000 euros par an pour 100 000 habitants
La technique est sûre, on trouve 2% de faux négatifs (contre 4% en cas de videodermoscopie avec suivi digital) qui s’avèrent de plus présenter un Breslow inférieur à 0,5 mm.
RCM ex vivo
Javiera Pérez
En ex vivo, on peut analyser sur la même image la réflectance et la fluorescence, et depuis 2018 des images colorisées comme en HES. On utilise 2 lasers : un en réflectance comme en RCM in vivo mais de longueur d’onde différente qui colore en rose sur l’image les strucutres de haute réflectance, et un laser à fluorescence qui colore en bleu l’adn et donc le noyau.
Pour les CBC la sensibilité est de 88% et la spécificité de 99% (les pièges diagnostiques sont les tissus sébacés et les follicules). L’écueil reste les problèmes techniques de préparation de l’échantillon : aplanir la pièce, acquérir l’ensemble de la lésion...
La technique permet par exemple de réaliser du Mohs ultra rapide : 7 étapes de recoupe + reconstruction en 1h30 !
Elle permet de voir les infiltrats. On peut même voir les mitoses !
La technique a également prouvé une bonne sensibilité et spécificité dans le carcinome épidermoide.
L’étape suivante est l’intégration de l’IA dans le diagnostic.
La courbe d’apprentissage est de 3 mois si l’on a une compétence en histologie.
OCT dynamique
Sandra Schuh
L’OCT dynamique détecte les particules mobiles comme les cellules sanguines au sein de structures immobiles, jusqu’à une profondeur de 0,5mm
Les 5 critères sémiologiques en OCT dynamique sont :
La technique est dépendante de la position (déclive ?), de la vasodilatation (rosacée par exemple, flush, raynaud)
Les champs d’application sont les évaluations d’ulcères, plaies, psoriasis, rosacée, sclérodermie
Dans les mélanomes, on retrouve des variations de densité et de forme corrélés au Breslow, et potentiellement discriminantes lors de traitements néoadjuvants
Les images linéaires, avec une faible densité et un petit diamètre sont préférentiellement vus dans les nevi contrairement aux mélanomes (amas tire-bouchon serpigineux).
Dans les CBC on retrouve les vaisseaux branchés familiers en dermoscopie
En pratique, l’OCT dynamique permet de distinguer les Bowen chez le patient psoriasique, ou de déceler l’infiltration débutante de carcinomes épidermoides versus kératoses
LC-OCT
Mariano Suppa
La LC-OCT (Line-field confocal optical coherence tomography) souhaite s’affranchir des défauts techniques de l’OCT (image profonde manquant de résolution) et de la confocale (image précise mais peu profonde), en conservant une haute résolution et une bonne pénétration. Elle permet de voir jusqu’au derme (épaisseur de pénétration de 2 à 3 mm, avec une resolution de 6microns.On obtient à présent à la fois (avec une caméra dermoscopique associée permettant de se repérer) des images horizontales et verticales en temps réel, permettant une reconstruction 3D.
Les applications sont : la reconnaissance des atypies cellulaires, la maturation kératinocytaire, l’organisation des fibres collagènes la morphologie des vaisseaux.
Jusqu’à présent la technique a fait ses preuves pour les lésions non mélanocytaires, essentiellement les CBC (3% à 12% de précision en plus selon les études par rapport à la dermoscopie) : la sémiologie consiste en l’anneau brillant de collagène, l’aspect des nodules en mille-feuille, les fentes. La technique permet de différencier les sous types de façon corrélée à l’histologie (superficiels versus invasif avec une spécificité de 96% et une sensibilité de 77%)
Elle permet de différencier les CBC des naevi dermiques (aspect en vagues, ondulé régulier) ou des hyperplasies sébacées (aspect granuleux lobulaire), des keratoses actiniques et des carcinomes épidermoides. Elle permet aussi le suivi après traitement non invasif.
Dans le cas de lésions kératinocytaires, on peut apprécier l’étendue des atypies kératinocytaires (kératose versus bowen) et l’intégrité de la basale (in situ vs invasif)
Les données sont encore à consolider pour les lésions mélanocytaires
L’apport récent de l’IA permet d’espérer screener rapidement les atypies, notamment dans le cas de champs de cancérisation., de repérer les lobules infiltrants, de passer en revue des marges prévisionnelles d’excision en préopératoire.
La prochaine version comporte une pièce à main permettant une vue d’ensemble dermoscopique de la lésion avec reconnaissance automatique de la position du faisceau en son sein en cours d’examen
Nouvelles technologies : quelles nouveautés en termes d’innovation ?
Pascale Guitera
La Reflectance confocal microscopy (RCM) peut permettre de visualiser la vascularisation et le trafic leucocytaire dans la tumeur et son microenvironnement. Le Dr Sahu du Sloan Kettering s’atèle à différencier ainsi les tumeurs « chaudes », vascularisées et susceptibles de répondre aux traitements car immunoactives des tumeurs froides non répondeuses
En microscopie confocale, les ORL utilisent déjà des biomarqueurs topiques, qui permettent de repérer par fluorescence les cellules malignes. Ce dispositif est disponible in vivo, mais pour le moment pas applicable à la dermatologie. En revanche ex vivo, la technique est utilisée en recherche pour le basocellulaire (biomarqueur PARP-1)
J’ai choisi de présenter ensuite le symposium sur les nouvelles approches diagnostiques, et le symposium satellite du laboratoire DAMAE car les sujets et les orateurs étaient complémentaires, et pour ainsi éviter une redondance.
Orateurs: Mariano Suppa, Julia Welzel et Javiera Perez-Anker
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
La première communication est redondantes avec les précédentes :
Performances diagnostiques de la LC-OCT dans le CBC : nouvelles données issues d’études prospectives et méta-analytiques. Prise en charge des patients
Mariano Suppa
Le rôle de la LC-OCT dans la délimitation des marges des CBC - une approche tout-en-un
Julia Welzel
Actuellement, les techniques non invasives utilisables pour réduire le nombre d’étapes en chirurgie de Mohs du CBC sont inapplicables en pratique quotidienne tant en OCT, où la résolution n’est pas assez importante et la technique trop couteuse en temps, qu’en RCM. On peut donc au maximum utiliser l’aspect à l’œil nu, la dermoscopie et une marge additionnelle de 2 mm puis examiner, avec plus ou moins un examen en fluorescence, la pièce ex vivo avec un confocal, avant la confirmation histologique classique.
En LC-OCT, on peut soit utiliser un appareil ex vivo, qui reconstitue en réflectance une mosaïque de la pièce (avec une résolution comparable à celle de la RCM), soit effectuer un balayage avec la machine d’in vivo, en repérant les marges, idéalement avec une aide de l’AI et un repérage global de la pièce en dermoscopie intégrée.
La technique ne renseigne bien sûr pas sur la marge profonde (limite de la technique : maximum 400 µ), sauf à examiner celle-ci ex vivo après exérèse
LC-OCT des lésions mélanocytaires - étapes concrètes pour le diagnostic systématique des lésions mélanocytaires atypiques
Javiera Perez-Anker
Les données présentées sont en cours de publication (article en cours de révision). Elles sont donc préliminaires
Les critères essentiels de diagnostic des lésions mélanocytaires malignes en LC-OCT pourraient être :
la présence de multiples cellules pagétoides (plus de 10, rondes ou dendritiques), les atypies cytologiques et l’architecture irrégulière de l’épiderme (ces premiers critères étant les 2 retrouvés comme significatifs après régression logistique multivariée), la perte de continuité / effacement de la jonction dermo épidermique et le clefting (terme pour le moment employé pour décrire la dissociation, le décollement ou la perte de cohésivité des mélanocytes au sein des thèques épidermiques malignes, différent du clefting ou fente de rétraction dans les CBC) . On trouve également d’autres critères significatifs, comme l’irrégularité des zones épidermiques en rayon de miel, l’hétérogénéité de distribution en coupe 3D des crêtes épidermiques et papilles dermiques, le pontage des crêtes par des thèques jointives.
On observe en corrélant les images de dermoscopie et de LC-OCT (verticales et horizontales) que les points et les globules correspondent souvent aux pontages des crêtes, à leur invasion par des thèque anormales, ou bien à l’ombre de thèques dermiques plus profondes.
L’idée pour explorer correctement une lésion mélanocytaire est d’effectuer d’abord un balayage vertical de toute la lésion, puis une acquisition 3D des régions d’intérêt, avec augmentation du contraste pour mettre en lumière les éventuelles atypies cytologiques.
Orateurs: Ketty Peris, Peter Mohr, Paolo Bossi, Ines Pires da Silva, Richard Scolyer et Iris Zalaudek
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Classifications DTT : peut-on parler de progrès ?
Ketty Peris et Peter Mohr
Evaluer et grader de façon objective un carcinome basocellulaire peut représenter encore actuellement un défi quotidien. La classification TNM n ‘est pas adaptée au carcinome basocellulaire car les formes ganglionnaires ou métastatiques sont exceptionnelles, et que le pronostic reste locorégional.
On utilise abondamment le terme de LaBCC (carcinome basocellulaire localement avancé), pour désigner des situations hétérogènes de CBC térébrants, jugés inopérables ou au prix de chirurgies mutilantes, de formes historiques, et/ou négligées.
Pour démembrer les situations de CBC représentant un challenge thérapeutique, 5 clusters ont été constitués :
IIa CBC communs mais dont la prise en charge est complexifiée par la tumeur (mal limitée, zone difficile, récidive) ou le patient (comorbidités état général, adhérence au traitement) : les résultats chirurgicaux attendus sont bons sous réserve d’une alliance thérapeutique
IIb Cbc multiples ou nombreux complexes, sporadiques ou gorlin
IIIa Cbc localement étendus ou térébrants en zone non fonctionnelle non critique : traitement réalisable sans perte fonctionnelle
IIIb Cbc localement avancés en zone fonctionnelle critique : traitement chirurgical curatif possible au prix d’un sacrifie fonctionnel ou esthétique
IIIc Cbc historiques étendus ou térébrant extra cutanés : solution chirurgicale non envisageable
Ces clusters sont le fruit d’une analyse mathématique, et non d’une confrontation conflictuelle de points de vue contradictoires. Les données sont issues de la vie réelle et permettent d’identifier des catégories pertinentes pour la pratique.
Ce démembrement n’apporte pas d’intérêt pronostique. Il s’agit d’un document consensuel pluridisciplinaire permettant de constituer des groupes homogènes de patients, et permettant par la suite de faciliter les évaluations de thérapeutiques
Ces situations représentent heureusement une minorité de cas (moins de 10%), elles nécessitent souvent des prises en charge en RCP,
L’actuelle pénurie médicale révèle l’importance d’identifier quels cas nécessitent une approche spécialisée pluridisciplinaire
Faut-il arrêter l’immunothérapie après avoir obtenu une réponse complète ?
Paolo Bossi et Ines Pires da Silva
Quand arrêter un traitement par immunothérapie dans les tumeurs non mélanocytaires ?
Pour se faire une opinion, les experts ont analysé diverses données de la littérature
- En utilisant les résultats de survie sans progression dans le cancer du poumon (NLCSC) :
o Les patients en réponse complète (et/ou métabolique) et qui stoppent l’immunothérapie après au moins 18 mois de traitement ont une survie sans progression de 80% à 12 mois
o Les patients qui arrêtent pour toxicité ont une moins bonne PFS
o De même que les patients qui arrêtent après moins de 12 mois de traitement
- Dans le mélanome que les patients soient en réponse complète, partielle ou en simple stabilité à l’imagerie classique, c’est bien la réponse métabolique qui détermine la progression ultérieure
- Il faut également prendre en compte les données à long terme des patients traités par cemiplimab : le délai médian de réponse complète est de 11 mois, et le taux de réponse complète continue à augmenter entre 1 et 2 ans de traitement
- Après arrêt des immunothérapies pour réponse complète lorsque les patients progressent de nouveau et reprennent une immunothérapie, on obtient à nouveau dans la plupart des cas des réponses (SD17%, PR33% ou CR 33%)
Bien sûr, il faut également garder en mémoire que certains patients vont récidiver à l’arrêt du traitement comme on le voit
Dans le Merkel : environ ¼ des patients en réponse complète récidivent à l’arrêt, que ce soit après avelumab dans l’étude JAVELIN Merkel 200, (parmi les 10 réponses complètes (RC plus 6 mois de traitement puis arrêt), 2 ont reprogressés à l’arrêt), après pembrolizumab dans la KEYNOTE 017, (4 parmi les 15), ou encore dans les études internationales retrospectives (où le taux de réponse après rechallenge par anti PD1 varie de 63% ((Weppler and al) à 33% (Wo and al)).
Dans le carcinome épidermoide sous cemiplimab un très faible pourcentage des répondeurs complets reprogressent à l’arrêt d’un traitement qui a souvent duré plus de 2 ans : de 2% (Hober et al) à 5% (Mo et al, sans réponse pour ces 2 patients à la reprise du traitement).
Pour résumer dans ces 2 indications le taux de progression à l’arrêt de l’immunothérapie est de 1 à 5% dans le carcinome épidermoide et de 20 à 27% dans le Merkel et la durée de traitement nécessaire après obtention de la réponse complète semble avoisiner les 2 ans, enfin l’ORR après rechallenge par les anti-PD(L)1 varie de 33 à 63% dans le Merkel.
Faut-il traiter tous les patients atteints d’un carcinome basocellulaire ou épidermoïde ?
Richard Scolyer et Iris Zalaudek
Peut-on s’abstenir de traiter certains patients qui présentes des carcinomes basocellulaires épidermoïdes ? Le problème concerne bien sûr les patients âgés que nous hésitons tous un jour à surtraiter. Cette controverse n’apporte pas de réponse tranchée à ces situations toujours complexes.
Les auteurs soulignent que temporiser ou s’abstenir chez le sujet âgé, qui peut sembler séduisant pour bien des patients et des médecins, c’est souvent prendre le risque ultérieur de situations couteuses ou incurables et préjudiciables à la qualité de vie.
L’idée est bien de traiter de façon adaptée à l’évaluation oncogériatrique, à bon escient, et dans le bon timing en privilégiant parfois des solutions non chirurgicales.
Orateurs: Alexander Eggermont, Axel Hauschild, Susana Puig, Brigitte Dréno et Alessandro Di Stefani
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Traitement adjuvant du mélanome : une longue histoire née il y a 25 ans
Alexander Eggermont
L’immunothérapie agit environ dans les mêmes proportions en situation adjuvante et en métastatique, où la palme revient à l’association anti PD1 anti CTLA4, suivi par le traitement par anti PD1 seul ; viennent ensuite les combinaisons anti BRAF antiMEK
En situation adjuvante les HR RFS(survie sans récidive) respectifs contre placebo sont de 0,75 pour l’ipilimumab, 0,57 pour le pembrolizumab (+-0,5) et 0,47 (+-0,5) pour le dabrafenib trametinib, et contre ipilimumab de 0,65 (+-0,5) pour le nivolumab (en incluant également les stades 4 réséqués)
EORTC 18071 ipilimumab haute dose vs placebo : impact retrouvé à l’identique à 10 ans sur la survie sans récidive, la survie globale et la survie sans métastase à distance HR ≈0,75
Combinaison anti braf anti mek montrant une efficacité à 5 ans sur la survie sans récidive, et la survie sans métastase à distance
Checkmate 238 Nivolumab comparé à ipilimumab 10 (standard of care in the us) : HR RFS 0,71(0,6-0,86) à 2 ans
Pour ces dernières études adjuvantes, en l’absence d’étude en cross over, il devient très difficile d’obtenir des résultats de survie globale, car les traitements comparés sont utilisés dans les lignes ultérieures ce qui fausse l’appréciation
Avec Keynote 054 pembrolizumab contre placebo : on a cette fois le cross over pour permettre de répondre à la question : y a-t-il un bénéfice à traiter en adjuvant, ou peut-on traiter uniquement à récidive ?
HR DMFS à 3,5 ans à 0,6, et analyse de survie sans récurrence à 3 ans 63,7% sous pembrolizumab vs 44, 1 pour le placebo avec un HR de 0,56,
Les HR RFS restent homogènes dans les sous-groupes de stade III (A, B et C AJCC 7) et significatifs quel que soit le statut PDL1, et le statut BRAF, avec un bénéfice plus important toute fois chez les Braf mutés (25% de bénéfice absolu vs 15,3% chez les BRAF sauvage, à mettre en balance avec les 20% obtenus avec le dabrafenib trametinib dans COMBI-AD)
Analyse à 5 ans de l’EORTC 1325 pembrolizumab vs placebo en adjuvant : on re trouve le même impact d’efficacité tant sur la RFS que sur la DMFS et également après cross over chez les ceux qui avaient récidivé sous placébo
On attend pour 2026 les résultats de survie globale
Présenter des effets indésirables immuno induits sous traitement adjuvant par anti PD1 entraine de façon significative une survie sans progression environ 40% plus longue que sans effet secondaire faut-il les considérer comme un biomarqueur corrélé à l’efficacité ?
La combinaison ipilimumab nivolumab a également été évaluée en adjuvant, dans 2 études
Etude IMMUNED adjuvant dans les stades 4 réséqués nivolumab 1 ipilimumab 3 vs nivolumab 3 mg vs placebo montrant la supériorité de la combinaison ipilimumab nivolumab contre le ‘anti pd1 seul
Checke mate 915 adjuvant nivolumab 240 toutes les 2 semaines / ipilimumab 1 mg /kg toutes les 6 semaines (c’est-à-dire une dose d’ipilimumab 6 fois moindre que le régime ipilimumab à 3 mg/kg toutes les 3 semaines) vs nivolumab 480 toutes les 4 semaines dans les stade IIB2C à IV : cette étude négative probablemejt à cause de la dose très faible d’Keynote 716 double aveugle pembrolizumab vs placebo dans les IIb-c montre une efficacité significative du pembrolizumab tant sur la survie sans récidive que sur la survie sans récidive à distance avec un HR de 0, 6
Checkmate 76k Iib Iic montre également une survie sans récidive significative meilleure avec nivolumab qu’avec placebo avec un HR à 0,42, qui va déboucher sur une probable autorisation cet été
L’avenir : L’enjeu est de repérer, parmi les stades I/IIA au-delà de la classification AJCC actuelle, les patients avec atteinte micrométastatique, à plus haut risque de rechute, qui bénéficieront à tout stade d’une immunothérapie adjuvante, en se passant de sentinelle
Grâce au profil d’expression génique et clinocopathologique (CP GEP on identifie finalement 3 niveaux de risque pour la survie sans récidive et de survie globale spécifique et la survie sans récidive à distance : les patients à faible risque de récidive : sentinelle négatifs CP-GEP bas risque, les patients à haut risque sentinelle positif CP-GEP haut risque, et une catégorie intermédiaire, regroupant sentinelles positifs GEP bas risques, et sentinelle négatif CP-GEP haut risque
Nivomela : teste l’intérêt d’un traitement adjuvant dans les stades II à haut risque, conditionné au résultat du test Melagenix (observation simple pour les patients à faible risque, nivolumab 480 toutes les 4 semaines pendant 12 mois ou observation pour les patients à haut risque, puis suivi pendant au moins 5 ans), les résultats sont attendus en début d’année prochaine.
Avec le traitement néoadjuvant, en stimulant bien plus de clones de Lt grâce à la tumeur en place, on s’oriente vers plus de traitement, des cycles de traitement plus courts et moins de chirurgie.
Le traitement neoadjuvant fait mieux que l’adjuvant : SWOG S1801 phase 2 avec une tendance au plateau dès 24 mois (pembrolizumab 18 X 200 adj vs pembrolizumab 3 + 15 200 toutes les 3 semaines HR 0,58 à 36 mois) : 3 doses avant la chirurgie réduit d’environ 40% supplémentaire la survenue d’évènement ultérieur carcinologique.
L’analyse poolée de néoadjuvant dans les stades III montre une supériorité de l’immunothérapie pd1 ou PD1 CTLA4 vs dabrafenib trametinib puisque c’est seulement après immunothérapie qu’on ne voit quasiment plus aucun vènement carcinologique ultérieur survenir, avec un recul de 3 ans chez les patients en réponse histologique, même partielle.
L’étude PRADO propose aux 60% de patients IIIB/C en réponse histologique complète ou quasi complète après 2 perfusions neoadjuvantes d’ipilimumab 1 mg/kg +nivolumab 3 mg/kg une surveillance simple sans curage complémentaire ni immunothérapie adjuvante. Actuellement les premières données à 3 ans montrent uniquement 2 récidives parmi les 99 premiers patients
L’étude de la signature interféron après neoadjuvant permet de repérer les bons répondeurs, pour lesquels on pourra se contenter d’une monothérapie moins toxiqueet de conserver les doubles immunothérapies plus toxiques mais lus efficaces pour les mauvais répondeurs
Peut-on aujourd’hui guérir les patients grâce aux thérapies adjuvantes ou simplement prolonger la SSM ?
Axel Hauschild
En cancérologie, guérison rime encore avec incongruité.
Pour exprimer la notion de guérison : il est plus juste de passer par la survie sans récidive à long terme plutôt que par la survie globale à long terme. En 2020 Ugurel et al analysent les données de survie des études randomisées significatives avec checkpoint inhibiteurs et thérapies ciblées, et trouvent une différence de 17% entre survie sans récidive et survie globale,qui comprend donc ces patients qui ont récidivé, ont été traité par une nouvelle ligne et toujours vivants
Qui sont donc ces patients qui ne récidivent pas ?
30% des stades IV (dans la checkmate 067) n’ont pas récidivé à 7 ans. En ce qui concerne les stades II/III, on peut conclure sommairement des analyses à 5 ans de RFS et DMFS de COMBI AD, CM 238 ou KN -054 que le risque de récidive est réduit de 40 à 50 % sous traitement.
Certaines études ont la faculté de proposer un taux de guérison estimé, à partir des chiffres de survie sans récidive (et non de ceux de survie globale qui sont impactés par tous les traitements potentiellement reçus après le traitement étudié) : dans COMBI -AD il est de 17%, avec un aspect en plateau de la survie sans récidive après 3 ans
L’écueil dans l’analyse des résultats d’études de traitement adjuvant réside bien dans les traitements proposés après protocole en cas de récidive,
Il faut déterminer si le traitement proposé a pu contribuer à la différence de survie globale : en analysant la survie sans progression dans le temps, après récidive, et par traitement.
Un autre seuil thérapeutique vient d’être atteint.
A présent on publie enfin dans le mélanome le nombre de patient à traiter pour éviter un évenement oncologique !
Si on dispose de traitement avec un HR de 0,5, on se doit pour éviter un décès par mélanome en 10 ans de traiter 8 patients en stade IIb et 6 patients en stade IIc. Ces chiffres (également disponibles pour un HR de 0,75) sont calculés à partir de combi AD, la seule étude pour laquelle on a une comparaison directe
Il faut donc expliquer aux patients au moment de proposer le traitement adjuvant qu’on est actuellement en situation de surtraiter inutilement certains patients, poursuivre les recherches pour améliorer le profilage génétique et identifier des marqueurs prédictifs de survenue d’effets secondaires irréversibles, et dans un souci de transparence, peut être également calculer le nombre de patients à desservir (NNH number needed to harm)
Profils d’expression génétique du sang et des tissus et implications pour la thérapie adjuvante dans le mélanome
Susana Puig
Les biomarqueurs prédictifs sont développés pour identifier : les répondeurs, les patients de mauvais pronostic, les patients à haut risque d’effet secondaires graves, ou les patients à haut risque de développer certaines pathologies.
Initialement dans le mélanome, on étudiait la S100 circulante, comparée à la tyrosinase, non présente dans le sang et donc présumée venir des cellules circulantes de mélanome.
A présent, on analyse l’ADN libre circulant, nucléaire ou mitochondrial, qui possède une taille différente selon qu’il est issu de l’apoptose (160-188pb) ou de la nécrose cellulaire (>10.000pb), et dans lequel on peut identifier des mutations somatiques telles que BRAF ou NRAS.
Celui -ci peut être recueilli sur sang circulant/ biopsie liquide, pour des diagnostics précoces ou l’analyse de maladie résiduelle, le choix du traitement, la surveillance de l’efficacité du traitement, l’apparition d’un clone prédominant résistant …
Comme c’est déjà le cas dans d’autres tumeurs (sein, poumon, colon, pancréas), la recherche de mutations dans l’ADN sur plasma total (marqueur associé de charge tumorale récemment validé) permet dans le mélanome de pronostiquer la survie.
Potentiellement toutes les mutations fréquentes dans le TCGA sont candidates
La mutation BRAF est présente de façon très large dans de nombreux nævi, mais néanmoins il existe très peu de cas de faux positifs (patients avec BRAF circulant sans mélanome existant). Le test a une bonne sensibilité (détecte 71% des patients en stade 4)
Chez les patients porteurs de nævi congénitaux, fréquemment mutés NRAS, cette mutation n’est pas retrouvée de manière habituelle dans le sang circulant, et peut donc servir de marqueur en cas de mélanome NRAS muté
Les résultats d’analyse d’ADN libre circulant de sérum issu des ponctions de lymphocèle, ou du lavage per opératoire des cavités opératoires lors des sentinelles, sont corrélés au résultat histologique du sentinelle.
Des profils d’expression génétique différents ont été identifiés : profils très immunogènes (high immune) associé à un meilleur pronostic versus profils de moins bon pronostic (high MITF) : associé à la pigmentation et la prolifération, à des Breslow plus élevés et des mitoses plus nombreuses.
Des tests analysant de manière simplifiée certains gènes clefs sont maintenant disponibles
Dans l’exemple présenté par le Dr Puig, parmi 88 patients avec sentinelle négatif, ils ont permis de classer les patients en haut ou bas risque, avec de bonnes valeurs prédictives (négative comme positive)
Par l’analyse du profil d’expression de ces 31 gènes, et en incorporant des critères cliniques et histologiques (épaisseur, ulcération, âge, mitoses), on peut établir à présent des estimations prédictives de positivité du sentinelle, puis de DFS, DMFS et MSS, ajustées le cas échéant au résultat du sentinelle. Les données sont actuellement rétrospectives. L’étude Nivomela randomisée prospective de phase III permettra on l’espère de savoir si cette démarche peut déboucher sur une réduction du nombre de sentinelle, et une sélection des patients qui bénéficieront d’un adjuvant
On découvre également des marqueurs pronostics utilisables de façon moins couteuse, en immunohistochimie : l’AMBRA 1 (une protéine de régulation de l’autophagie) et la loricrine, un marqueur de différenciation terminale de l’épiderme. Leur diminution ou leur perte conjointe dans l’environnement péritumoral est associée à un risque accru de dissémination métastatique dans les stades I et II non ulcérés, indépendamment du Breslow. Cette valeur permet aussi d’identifier certains mélanomes de fort breslow, mais de risque métastatique qui semble moins élevé. AMBRA 1 semble aussi être utilisable pour prédire la réponse aux anti PD1
Le concept de rechallenge avec la thérapie adjuvante
Brigitte Dréno
Il faut différencier le retraitement (traitement à récidive par la même molécule que celle utilisée en adjuvant), du rechallenge (nouvelle utilisation à progression d’une molécule précédemment bénéfique pour une ligne métastatique antérieure) et de l’escalade (ajout d’une molécule supplémentaire à progression)
Les anti PD1 ont on le rappelle l’autorisation d’utilisation en adjuvant pour les mélanomes stade III ganglionnaire ou stade IV, réséqués. L‘ipilimumab est autorisé par la FDA pour les stade III réséqués, à 10 mg pour 4 doses d’induction puis toutes les 12 semaines pour un maximum de 3 ans
Il existe peu de publications concernant les traitements après adjuvant. L’une retrouve 2 réponses durables parmi 5 patients retraités par anti PD1 à distance du traitement adjuvant. L’autre étudie les 12% de patients progresseurs après adjuvant anti PD1 : 1 réponse (13%) parmi les 18% traités par ipilimumab, et 13 (soit 36%) sur les 36 patients traités par combinaison anti PD1 ipilimumab. La troisième se penche sur les traitements reçus par 20 patients en progression après adjuvant par anti PD1 : 2 patients ayant récidivés à 5 et 13 mois après la fin de l’adjuvant ont répondu pendant 5 à 10 mois au retraitement par anti PD1, 2 patients traités par ipilimumab à récidive ont répondu, tout comme 9 des 10 patients traités par anti BRAF+ anti MEK. La quatrième et dernière étudiait les patients de la keynote 054 ayant récidivé 6 mois ou plus après la fin du pembrolizumab adjuvant : parmi ces 47 patients, 43% ont reçu du pembrolizumab en rechallenge. Leurs taux de réponse et de PFS sont inférieurs à ceux des patients naïfs de traitement, et les profils de toxicité sont comparables
Les mécanismes de résistance aux anti PD1 passent par des mutations de JAK ½ diminuant la réponse à l’interferon, par des altérations de la présentation antigénique, la polarisation vers un microenvironnement immunosuppressif, des modifications du microbiote intestinal ou des voies métaboliques inflammatoires.
En ce qui concerne les thérapies ciblées, seul la combinaison dabrafenib + trametinib a l’agrément, dans les mélanomes de stade III. Pour ces molécules on dispose des informations des patients de BRIM8 et COMBI AD. Sur les 85 patients ayant récidivé, 78% l’ont fait après l’adjuvant, sans que l’on note de différence de médiane de survie globale entre les patients qui ont récidivé pendant ou après l’adjuvant. Les patients ont été traités par combinaison ipilimumab nivolumab, avec une survie à 2 ans cd 92%, par anti PD1 +- autre traitement avec une OS de 84%, par thérapies ciblées avec une OS de 49% et par ipilimumab avec une OS de 45%.
Ces données font proposer un retraitement par anti PD1 uniquement pour les patients qui rechutent au moins 6 mois après la fin de l’immunothérapie adjuvante. On attendra les résultats de la cohorte de rechallenge prévue dans la KN 716 (pour les stades IIB/C) et de futurs essais testant nivolumab + relatlimab (Ig anti LAG3)
Une solution pourrait être l’escalade thérapeutique par : TILs, traitement intra tumoraux par virus oncolytiques ou TLR9 agonistes, TKI à récepteurs multiples, inhibiteurs d’histone deacetylase ou greffe fécale.
Quel est le rôle de la radiothérapie adjuvante dans le mélanome à l’ère de la thérapie systémique ?
Alessandro Di Stefani
La radiothérapie adjuvante permet surtout d’assurer un contrôle local prolongé du champ d’irradiation.
Elle trouve toute sa place dans le cas des mélanomes muqueux, naso buccaux, génitaux ou anorectaux, afin d’obtenir un contrôle local, mais sans efficacité sur la survie globale.
Pour les cas de mélanomes cutanés, c’est aussi dans un but de contrôle local (près de 80% à 5 ans) et toujours sans amélioration de la survie globale , que l’on propose rarement une radiothérapie adjuvante (surtout pour des localisations du visage non réopérables, et les formes desmoplastiques )
La situation est similaire lorsque l’on irradie une aire ganglionnaire post curage, notamment en cas de rupture capsulaire, avec toutefois le risque de lymphœdème du membre le cas échéant.
On rappelle que si une radiothérapie est envisagée de façon concomitante des traitements par BRAF inhibiteurs, ces derniers doivent être interrompus au moins 3 j avant et après l’irradiation en cas de fractionnement réduit à 1 si stéréotaxie à cause de la radiosensibilisation.
Associée aux immunothérapies, la radiothérapie est en théorie promotrice d’une réponse T médiée, et potentiellement à l’origine d’un effet abscopal (à distance du champ).
Le moment de l’irradiation varie également. Elle peut être entreprise en séquentiel (néoadjuvant ou adjuvant) ou en concomitant (plutôt pour obtenir un meilleur contrôle local)
On parle de radiothérapie post échappement lorsqu’elle est combinée à l’immunothérapie après échappement et récidive, ou de radiothérapie péri induction si on l’effectue pendant la phase d’induction de l’immunothérapie
La majorité des données d’association aux immunothérapies concerne les irradiations en situation métastatique, très peu l’irradiation des stades localement avancés, et quasiment aucune donnée en adjuvant.
Une seule étude rétrospective a comparé les taux de récidive à 3 ans et de survie globale des patientes traités après adénectomie par traitement systémique, avec ou sans radiothérapie ne concluant à aucun résultat significatif.
La radiothérapie occupe donc une place marginale dans le traitement adjuvant du mélanome, avec certaines indications à discuter au cas par cas en RCP.
Orateurs: Claus Garbe, Jeffrey E. Gershenwald, Axel Hauschild et Alexander Menzies
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Une nouvelle classification du mélanome est-elle nécessaire ?
Yes: Claus Garbe
No: Jeffrey E. Gershenwald
L’AJCC permet de déterminer, à différentes phases de la maladie (c : clinique, p : histologique, yc ou yp : post thérapeutique, r : à récidive, a : à autopsie). Actuellement, l’AJCC en cours est la huitième du nom, et par certains aspects elle n’est plus en phase avec les dernières découvertes et avancées thérapeutiques.
Elle trouve sa source dans les données de la cohorte IMDDP (international melanoma database and discovery platform, 10 centres en Europe, US et Australie collectant les informations de survie spécifique liée au mélanome des patients stade I à III de 1998 à 2013). Elle souffre de la sous déclaration des morts spécifiques par mélanome, car l’information est dure à collecter. Avec les traitements actuels, les courbes de survie en stade IV ont de fait beaucoup évoluées passant à 5 ans de 5 à 50%, depuis par exemple 2008, et particulièrement la survie des patients avec métastase cérébrale.
Un inconvénient de la classification actuelle est aussi son manque de simplicité d’utilisation clinique, à défaut d’utiliser par exemple les applications digitales.
L’incorporation des nouveaux biomarqueurs disponibles permettrait d’augmenter sa pertinence, mais aucun n’est actuellement validé ni largement consensuel
Toute modification doit permettre de conserver l’universalité qui fait la force des classifications
A-t-on encore besoin d’un traitement adjuvant du mélanome ?
Yes: Axel Hauschild
No: Alexander Menzies
Oui : si l’on observe les courbes de survie à 5 ans des sous-groupes des stade III ((A à D), les au mieux 25% de mortalité justifient toujours la proposition de traitement adjuvant.
Il ne ressort d’aucune étude de qualité de vie au cours des 5 essais princeps un quelconque impact négatif des traitements adjuvants, malgré l’existence d’effets secondaires (dont 3% de sévères, imprévisibles et parfois irréversibles, comme les effets cardiologiques et neurologiques) et de 15% d’arrêts de traitement.
En analysant indirectement les taux de survie globale (de CK238 et l’eortc18071), on retrouve 35% d’amélioration avec le nivolumab contre le placebo et 43% à 3 ans avec la combinaison dabrafenib trametinib
En vie réelle 75% des patients acceptent le risque de l’adjuvant.
Pourtant en réalité, le traitement ne bénéficie qu’à environ 1/5ème des patients, si on exclue : les patients traités qui récidivent tout de même et ceux qui n’auraient dans tous les cas jamais récidivé…
Le traitement adjuvant est donné après la chirurgie ganglionnaire dans les stade III, ce qui ne prévient pas le risque de lymphoedème puisque ne supprime pas le curage actuellement. L’espoir des traitement neoadjuvant est de réduire voire de supprimer la chirurgie après réponse à l’mmunothérapie initiale.
On espère exclure les patients qui n’ont pas d’intérêt à recevoir un adjuvant en utilisant par exemple des signatures immunohistochimiques : les patients négatifs par exemple pour le test immunoprint ont une survie sans récidive estimée de 96% à 10 ans.
En revanche à l’heure actuelle on ne sait pas identifier les patients qui vont tirer parti de l’adjuvant.
Les 20% de rechuteurs précoces (avant même d’avoir eu le temps d’instaurer l’adjuvant après chirurgie) sont de facto non-candidats.
Les indications actuelles de l’adjuvant laissent également sur le carreau tous les tueurs silencieux que représentent les mélanomes fins à haut risque de récidive, non identifiés à ce jour : 63% des morts actuelles par mélanome avaient initialement un stade I !
Orateurs: Nicole Basset-Seguinn Susana Puig et Ketty Peris
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Une présentation concrète de la prise en charge thérapeutique avec le sonidegib dans le traitement du LaBCC
Traitement systémique de première ligne du LaBCC
Nicole Basset-Seguin
La majorité des CBC sporadiques résulte de mutations de PTCH, plus rarement de SMO. Actuellement 2 molécules inhibitrices de hedhehog sont disponibles. Elles se lient à Smoothened pour bloquer la prolifération.
Le sonidegib est très lipophile. Les concentrations cutanées sont 6 fois plus importantes que les concentrations plasmatiques.
A 200 mg/j, le taux de réponse globale est bon (et confirmé en vie réelle) avoisine les 60% dont 20% de réponse complète. 1,5% des patients progressent.
Après réponse, plus le traitement pourra être continué longtemps, plus la réponse sera durable à l’arrêt. 60% des patients en réponse complète rechutent dans les 3 ans (préférentiellement en cas de localisation au tronc ou aux membres), et 85% répondent à nouveau complètement après reprise du traitement.
35% des patients (et 40% des gorlins n’ont toujours pas récidivé 3 ans après l’arrêt).
Chez les répondeurs complets, une étude est en cours pour tester une maintenance avec 2 semaines sur 4 réduites à 1 semaine sur 3 en cas de toxicité sous traitement.
Un autre essai étudie l’effet d’une radiothérapie adjuvante après réponse complète.
Dans le cas de répondeurs partiels, en vie réelle la durée de traitement médiane est de 7 mois, un tiers des patients stoppant pour effectuer une chirurgie lorsque celle-ci est rendue possible par la réponse partielle
Dans la pratique et sans preuve statistique actuellement, les orateurs essaient de traiter au moins 6 mois au total les petites tumeurs en réponse complète, 12 mois pour les plus massives, bien sûr selon la tolérance du patient.
Gestion optimale de la thérapie HHI
Susana Puig
On connait les effets de classes des inhibiteurs de hedgehog : Spasmes musculaires (30%), dysgeusie (15%), alopécie (5%), nausées, diarrhées, puis à plus long terme, perte de poids et fatigue.
En cas de toxicité, avec le sonidegib, la prise un jour sur deux est prévue et autorisée et sans doute préférable à des pauses thérapeutiques (qui doivent être longues, au moins 2 à 3 mois pour voir une efficacité), compte tenu de la concentration cutanée élevée, avec des réponses comparables à la dose pleine. Attention aux médicaments inhibiteurs de CYP 3A4 comme l’everolimus, avec lesquels on doit aussi penser à faire une réduction de dose (cette fois d’emblée). La rotation peut également être une option, tant pour diminuer les effets secondaires que pour regagner en efficacité.
Toutefois la qualité de vie des patients ne semble pas impactée dans le temps, et le sera d’autant moins qu’ils sont accompagnés, prévenus des effets attendus, et que l’on offre des moyens de lutter contre ces désagréments (consultation nutritionnelle et recettes adaptées, hydratation, étirements 2f/j, pas de sport le soir pour éviter les crampes nocturnes, conseils socio esthétiques, minoxidil à 3 mois de traitement).
Le point de la tératogénicité est sans doute à tort moins abordé avec les patients masculins âgés.
Les CBC qui surviennent chez les Gorlins ont une plus faible charge mutationnelle et un moindre effet mutagène des UV et une plus grande stabilité génomique, moins de mutations SMO et donc moins de résistance intrinsèque aux inhibiteurs de hedgehog. Il est donc d’autant plus important d’insister pour ces patients sur la nécessité d’une excellente photoprotection pour éviter les dommages UV susceptibles d’augmenter le taux de résistance au traitement.
Algorithme de traitement du LaBCC en pratique
Ketty Peris
En seconde ligne, on peut actuellement discuter une immunothérapie malgré une faible infiltration tumorale par les LT CD8. L’étude de phase 2 testant le cemiplimab a rapporté un taux de réponse globale de 30% dont 9% de réponses complètes.
La question des marges chirurgicales post HHI (hedhehog inhibiteurs) n’est pas tranchée. Actuellement ce sont souvent les marges visibles, plus qu’initiales qui sont prises.
Orateurs: Veronique Bataille, Raymond L. Barnhill, Daniela Massi et Cristina Carrera
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Nævi atypiques : plus qu’un simple phénotype cutané
Veronique Bataille
Le décodage du génome en est encore à ses balbutiements. Les observations de notre oratrice apportent de séduisantes réponses génétiques aux observations phénotypiques déjà existantes.
Y a-t-il une influence du genre sur les naevi ?
Chez les femmes on a observé que certains loci sont associé au nombre de naevi, et au risque de mélanome ; ils influencent également la localisation des naevi (jambes vs bras vs tete et cou vs torse). Dans le syndrome de Turner on a de nombreux naevi sur le tronc et un risque plus élevé de mélanome
Le nombre de naevus est un facteur de risque important de mélanome ; même si bien sûr tous les patients avec un syndrome des naevi atypiques ne développeront pas un mélanome. Le risque augmente aussi avec les antécédents familiaux, de mélanome mais aussi d’autres cancers comme le pancréas, le cerveau, le rein. LA NHS propose maintenant aux patients un séquençage génomique.
Les télomères sont les structures non codantes présents aux extrémités de chaque chromosome. Leur longueur à la naissance ainsi que leur taux de raccourcissement avec l’âge varient d’un individu à l’autre. Des télomères courts exposent aux maladies cardiaques et chroniques. Plusieurs études suggèrent que le nombre croissant de naevi est associé à la longueur élevée des télomères ajustée sur l’âge, à une bonne minéralisation vertébrale, de meilleures fonctions cognitives. Les mélanocytes et les neurones pourraient partager des voies de senescence communes.
Nævi atypiques et mélanome précoce : un équilibre à trouver entre sous-diagnostic et surdiagnostic
Raymond L. Barnhill
Y a-t-il un surdiagnostic des mélanomes par les pathologistes, expliquant l’augmentation continue et croissante de l’incidence des mélanomes, constatée depuis 1975, quand la mortalité elle stagne heureusement ? Il pourrait être expliqué par un surdiagnostic : plus grand nombre de dépistages, de biopsies, des critères diagnostiques histologiques plus permissifs, ou bien par une attitude thérapeutique plus efficace.
Il faut bien être conscient que pour les lésions mélanocytaires avec atypies modérées sévères et les mélanomes fins jusqu’à 0,8mm la reproductibilité est mauvaise (inter opérateur 25 à 45% entre experts dermato-anatomopathologistes et intra opérateur 35 à 63% !) et plus particulièrement pour la catégorie des naevi avec atypies modérées.
Les lésions particulièrement délicates comprennent : les naevi atypiques, les naevi dysplasiques, les melanocytomes les tumeurs de spitz atypiques
Il faut accepter le doute, et ne pas mal interpréter certains critères de façon dogmatique : ainsi les ascensions pagétoides, inquiétantes, intéressant toute la surface de l’épiderme, sont une observation classique et non péjorative dans les naevi à cellules fusiformes pigmentées où on les trouve associé à une thèque d’arrêt périphérique bien conservée, une symétrie, une bonne limitation.
Ce qui paraît actuellement du strict domaine du pathologiste pourrait avec les imageries non invasives incomber au dermatologue qui devra aussi raisonner ainsi !
La nouvelle classification MPATH-DX V2.0 sera incluse dans la 5ème édition de la classification WHO
La modification principale est le reclassement des 3 catégories de naevi atypiques : atypies légères, modérées ou sévères en 2 groupes : faibles (ne nécessitant pas de reprise d’exérèse) ou sévères
Diagnostic et prise en charge des tumeurs de Spitz atypiques
Daniela Massi
Pour établir un diagnostic de tumeur de Spitz, il faut prendre en compte :
Et en cas de critères pour une tumeur de spitz atypique : il faut discuter la réalisation :
Le vocable de mélanocytome a changé : il désigne à présent des lésions génétiquement intermédiaires, à la différence du naevus qui ne comporte pas de mutation pathogène. Il faut donc à présent préciser si l’on parle d’un mélanocytome/deep penetrating naevus avec activation de WNT, d’un mélanocytome avec activation de BAP1 ou d’un mélanocytome de Spitz
Le séquençage de nouvelle génération permet de rectifier le diagnostic des mélanomes spitzoides.
Ainsi par exemple, retrouver en premier lieu une fusion de MAPK8, ou encore une mutation de PTEN du promoteur de TERT, est en faveur de la malignité.
Désescalade thérapeutique dans les tumeurs de Spitz atypiques :
Les marges conseillées sont de 5 à 10 mm. 40 à 50% des patients avec sentinelle positif n’ont pas eu dévolution péjorative, ce qui fait rediscuter l’intérêt du sentinelle dans cette indication. La décision doit dans tous les cas être prise en RCP.
Recommandations actualisées pour la prise en charge des nævi congénitaux
Cristina Carrera
En cas de naevus isolé, il doit être pris en charge comme le serait un naevus acquis. Moins de 30% des mélanomes survenant sur naevus préexistant, l’exérèse systématique n’est donc pas recommandée. Elle sera effectuée : en présence d’aspects dermoscopiques suspect de mélanome sur naevus congénital (réseau atypique ou négatif, lignes blanches brillantes; lignes grises anguleuses) ou en cas de souhait de l’enfant et/ou des parents. Les résultats cosmétiques les meilleurs sont obtenus avec la chirurgie et non avec le laser (risque de repigmentation++), par contre le laser adjuvant sur la cicatrice améliore encore son aspect.
Spécificités du site acral chez l’enfant :
En cas de naevus géant il faut pouvoir informer les parents : sur le caractère multinodulaire ou chevelu potentiel, sur l’extension (entre x1,7 sur la tête à 2,8 sur les bras et le tronc et 3,3 sur les membres inférieurs)
Il faut proposer une IRM précoce (idéalement avant 6 mois de vie, avant la myélinisation) en cas de naevus dont la taille estimée à l’âge adulte sera supérieure à 40 cm, de naevi moyens multiples ou associés à plus de 4 petits naevi satellites.
Il ne faut pas se précipiter pour retirer les lésions ! En effet un éclaircissement spontané est possible (mais imprévisible) indépendamment de la taille ou de la couleur pendant les 3 premiers mois !
De plus des études montrent que la perception par d’autres personnes d’une cicatrice large et affichante est la même que celle du naevus. Enfin, l’exérèse ne réduit pas le risque de survenue ultérieure de mélanome.
Orateurs: Vishal A. Patel et Michael R. Migden
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Fondements de la thérapie intralésionnelle pour le CPNM
Vishal A. Patel
Coley a été le premier à imaginer utiliser les injections intralésionnelles pour traiter les tumeurs malignes, il a injecté avec succès du streptocoque puis des mélanges de produits bactériens d’abord dans des sarcomes osseux et des tissus mous, puis des mélanomes métastatiques, avec pour rationnel de stimuler le système immunitaire. La technique est ensuite discréditée par le manque de rigueur scientifique de l’auteur, jusqu’à l’utilisation en 1975 de la BCG thérapie, quand à elle freinée par une faible efficacité et la survenue de réactions anaphylactiques et de BCGites disséminées
Il faut attendre l’arrivée du T vec (talimogene laherparepvec, une immunothérapie oncolytique dérivée de l’HSV1) pour obtenir un agent intralesionnel capable de réplication sélective dans la tumeur.
L’étude pivotale de phase III dans les mélanomes de stade II IV injectables non résécables montrait une efficacité significative par rapport au comparateur GM-CSF avec des réponses complètes dans 10% des cas, mais pas dans les sous-groupes de stade IV M1b/c.
De façon décevante, l’ajout de Tvec au traitement par pembrolizumab n’a pas montré d’amélioration significative (Key note 034 : Tvec + pembrolizumab vs placebo + pembrolizumab)
Dans le traitement des cancers cutanés non mélanocytaires aussi les injections intralésionnelles ont été rapportées avec de bons résultats dans la littérature. Le 5FU intralésionnel est utilisé depuis les années 80s. Une récente revue de la littérature retrouvait par ailleurs des résultats poolés avec plus de 90% de taux de guérison pour les CBC (24 patients) ! Même résultats avec la bléomycine (11 patients) et avec l’interferon alpha 2b (plus de 70% dans les CBC et de 90% dans les épidermoides. Tous ces résultats souffrent d’un biais de publication. Le méthotrexate a également été utilisé intralésionnel pour des kératoacanthomes
L’interferon a également été utilisé en intralésionnel pour les CBC, montrant une augmentation après traitement de toutes les cellules T, CD4 helpers, CD8 cytotoxiques et NK, avec des taux de guérison à 5 ans de plus de 90%, comparables à la chirurgie, avec un meilleur résultat cosmétique
Les injections se font à l’aiguille de 26 à 30 G et avec seringue graduée par 0,01ml. Le risque est la perte fréquente de 30 à 50% de l’injectat du fait de la friabilité des tumeurs. On utilise une ds 3 méthodes classiques d’injection : en 1 ou 2 sites jusqu’à blanchiment ou effet peau d’orange, par multiples injections périphériques plus ou moins à la base, ou enfin par injection tangentielle de 4 égaux aliquots dans les cadrans plus un à la base. L’angulation à adopter dépend de la structure visée 10° pour le derme, 45 pour le tissu sous cutané, 90 pour le muscle.
Pour les cytotoxiques, on injecte par séries de 0,1 ml chaque cadran, au maximum 1 à 2 cc par séance, espacées de 2 à 4 semaines, et précédées ou non d’une réduction de masse tumorale par rasage.
Avancées de la thérapie intralésionnelle pour le CPNM
Michael R. Migden
Pourquoi compliquer le traitement avec des injections intra tumorales complexes, quand on peut utiliser simplement des topiques ? (ou la règle des 500 daltons il faut être plus petit pour pénétrer la peau …). Le patidegib topique 2%, un inhibiteur topique de hedgehog est utilisé en traitement des CBC et en prévention de nouveau CBC chez les patients à risque (Gorlin) dans des études de phase 2 et 3 en s’affranchissant des effets secondaires systémiques. L’utilisation intralésionnelle des inhibiteurs de Hedgehog permettra peut-être de gagner en efficacité par rapport au topique, en évitant toujours les effets secondaires liés au passage systémique.
L’étude ignyte RP1 +- nivolumab, de phase 1 /2, a testé l’association d’une immunothérapie oncolytique à un inhibiteur de point de contrôle : RP1 + anti PD1, dans les mélanomes et tumeurs non mélanocytaires chez 15 patients. On retrouve un taux de réponse globale de 60%, et 46% de réponses complètes.
CERPASS est une étude prometteuse de phase 2 testant le cemiplimab seul 350 mg toutes les 3 semaines iv ou associé à RP1 (intratumoral toutes les 3 semaines 8 administrations) dans les épidermoïdes cutanés avancés. Les résultats sont en attente.
ARTACUS teste le RP1 seul chez les greffés d’organe (rein ou foie) dans le carcinome épidermoïde avancé ou métastatique
Le SP002 est un nouveau vecteur créé à partir d’un adénovirus déleté avec insertion du gène de l’interferon : les cellules transduites expriment de l’interferon en deux semaines. L’idée est de l’associer aux inhibiteurs de hedgehog pour contrebalancer leur action down régulatrice de la réponse interferon gamma : essai de phase 2 combiné au vismodegib
L’immunothérapie intralesionnelle dans les tumeurs cutanées non mélanocytaires vise à augmenter les concentrations tissulaires tout en diminuant les effets systémiques. La technique d’injection pour les immunothérapies est différente de l’injection des cytolytiques ou des virus : on injecte plutôt comme de l’interferon avec une seringue de 1ml marquée tous les 0,1ml. L’injection très lente se fait toutes les 2 à 3 minutes par increment de 10 µl. Ne pas injecter dans l’espace sous cutané au risque d’être inefficace (5 mg dans le plan sous cutané sont perdus !), ne pas injecter dans la partie ulcérée. Il faut injecter dans un tissu dense, à défaut injecter la périphérie de la tumeur. En intratumoral, dans le cas des lésions de petite taille : on vise de traiter avec la plus petite dose possible pour minimiser les effets secondaires alors que pour les lésions de grande taille on injectera une pleine dose, avec les mêmes risques d’effets secondaires, mais dans le but d’augmenter l’efficacité avec une concentration locale augmentée. Une étude de phase 1 a testé le cemiplimab intralesionnel chez les patients présentant un carcinome épidermoïde récidivant résécable (250µl par semaine 12 semaines puis chirurgie). Le critère principal était l’incidence, la nature et la sévérité des toxicités limitant la dose et effets indésirables liés au traitement les 28 premiers jours puis incidence et sévérité des effets indésirables jusqu’à 90 j après la dernière dose. Le passage systémique était très faible. A la dose la plus faible de 5 mg, 75% de réponses complètes histologiques ont été observées, c’est-à-dire quasi autant qu’avec la dose maximale de 44 mg, avec un profil de sécurité bien meilleur (12% d’effets secondaires de grade 3 à 5 ayant entrainé uniquement un retard de traitement). De nouvelles cohortes testent 6 semaines d’injection pour des carcinomes épidermoïdes comme des basocellulaires.
Orateurs: Petr Arenberger, Judit Olàh et Erika Varga
Compte rendu rédigé par Dr Marina Thomas
Les enjeux liés au diagnostic des tumeurs cutanées malignes rares
Petr Arenberger
Cas complexes de sarcomes rares
Judit Olàh
Il n’existe malheureusement aucune recommandation ni consensus pour toutes ces tumeurs cutanées rares.
On continue à accumuler de façon disparate des observations de cas et de traitements non standardisés qui ne font pas progresser l’ensemble de la communauté. On aurait aimé savoir si à l’image de Caraderm, il existe d’autres réseaux de tumeurs cutanées rares.
On constate à regret que le sujet ne semble actuellement pas motiver les foules, car il s’agit d’une dernière session de congrès sans scoop ni beaucoup de spectateurs…
La session « Difficult to treat cases with rare adnexal tumours Zsuzsanna Lengyel n’a pas été assurée.
Pas grand-chose donc à retenir de la première communication, sauf si l’on a raté la session consacrée au Merkel et les recommandations 2022 : Les 80% de Merkel positifs pour l’ADN de Polyomavirus sont associés à moins de localisations ganglionnaires au diagnostic, souvent situés sur les membres inférieurs, métastasent moins fréquemment et ont une charge mutationnelle plus faible exérèse avec marges de 1cm + radiothérapie adjuvante (sauf contraintes anatomiques) ou à défaut marges de 2 cm, Mohs possible également , et indication à un ganglion sentinelle, suivi d’un radiothérapie 50-55Gy de l’aire ganglionnaire en cas de positivité, +- curage
Les sarcomes cutanés rares sont quant à eux souvent diagnostiqués avec retard, car leur présentation clinique n’est pas typique et que les prises en charge chirurgicales initiales sont rarement adaptées, conduisant à une résection incomplète.
Actuellement pour les cas de tumeurs cutanées rares rencontrées, et selon les possibilités locales, une fois sorti des classiques prises en charges chirurgicales itérative, des radiothérapies associées et des cytotoxiques classiques, on peut espérer tenter un anti PD1, en s’appuyant sur les divers cas cliniques rapportés çà et là dans la littérature.
Ainsi les orateurs ont présenté des cas d’angiosarcome épithélioide exprimant PD1, traités avec une bonne réponse. De la même façon, une tumeur maligne des gaines nerveuses (Malignant Peripheral Nerve Sheath Tumors) survenue dans un contexte de Li Fraumeni avec mutation p53, a été traitée avec succès. Celui-ci sera d’autant plus attendu si on retrouve une importante charge mutationnelle (TMB tumor mutational burden) ou encore une instabilité microsatellitaire (MSI-H) ou une anomalie du système de réparation de l’ADN (dMMR).
Il existe encore un long chemin à parcourir avant de pouvoir bien prendre en charge ces patients : il passe par une relecture systématique par des pathologistes experts, l’emploi systématique de RCP, le recueil exhaustif des données et le testing moléculaire par NGS pour identifier des cibles thérapeutiques (utile dans peut être 60% des cas ? et débouchant parfois sur un traitement adapté, comme le tazemetostat dans le sarcome épithélioïde).
Tumeurs rares de la région anogénitale
Erika Varga
Là aussi on se heurte à des problématiques de retard diagnostique et thérapeutique pour ces localisations cachées pour lesquelles le patient tarde à consulter.
L’oratrice a attiré l’attention sur plusieurs cas de lymphangiomes circonscrits acquis. Cette entité touche la région génitale, et survient dans les suites ou de façon concomitante de certaines situations d’inflammation chroniques : tumeurs ou radiothérapies, infections (herpès, érysipèles, lymphogranulomatose vénérienne), ou de maladies de Crohn, au cours desquelles la fibrose extensive entraine des anomalies lymphatiques localisées. Les traitements à proposer sont conservateurs (chirurgies proportionnées, laser, sclérothérapie…).
Orateur: Dr Paolo Ascierto
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
Au fil du temps, nous avons appris que même dans les cas de mélanome à mutation BRAF, il est préférable de démarrer le traitement avec des anti-PD1 plutôt qu’avec des inhibiteurs de BRAF. De plus, certaines études ont montré que les patients qui présentent une résistance aux thérapies anti-BRAF présentent également une résistance à l’immunothérapie. En effet, les inhibiteurs de BRAF modifient le microenvironnement tumoral, ce qui rend la tumeur résistante à l’immunothérapie. Cela peut expliquer pourquoi il est préférable de débuter le traitement du mélanome métastatique par une immunothérapie plutôt que par une thérapie ciblée.
La résistance aux anti-PD1 s’explique également par la présence de mutations JAK2, qui induit une perte de la signalisation de l’interféron gamma (Zaretsky et al. NEJM 2016).
Il est intéressant de noter que dans les cas où l’on administre d’abord l’immunothérapie, on peut ensuite, en cas de rechute, administrer des thérapies ciblées et les patients s’en sortent mieux que lorsqu’ils reçoivent l’immunothérapie seule. Cette approche séquentielle peut donc présenter des avantages, mais il peut aussi être intéressant d’administrer tous les médicaments en même temps (trithérapie). Jusqu’à présent, la trithérapie ne s’est toutefois pas avérée plus efficace que l’immunothérapie seule, même si l’on ne dispose pas de données de suivi à long terme
Notons que certains patients présentant un taux élevé de LDH peuvent bénéficier de courtes doses de thérapie ciblée suivies d’une immunothérapie. Les effets négatifs de l’inhibiteur de BRAF sur la résistance aux médicaments se manifestent probablement avec le temps, de sorte que de courtes phases de traitement initial peuvent s’avérer bénéfiques. Nous disposerons de plus de données à l’avenir, puisque des essais cliniques sont en cours pour étudier cette question.
Orateur: Dr Liz Patton
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
Bien que de nouveaux traitements du mélanome soient apparus récemment, il reste des défis majeurs à relever :
Ces défis sont les principales cibles des nouveaux médicaments. Le groupe du Dr Patton étudie principalement l’hétérogénéité du mélanome et c’est pourquoi il utilise le modèle poisson-zèbre pour ce faire. Le poisson-zèbre présente l’avantage de permettre la création rapide de modèles de mélanome (dans ce modèle, il faut trois semaines pour développer un mélanome).
L’étude porte sur les points suivants :
Le recours au poisson-zèbre est très intéressant car il permet d’utiliser non seulement l’adulte mais également l’embryon afin d’identifier la migration des mélanocytes dans l’embryon.
Les chercheurs ont démontré qu’un sous-ensemble de cellules de mélanome peut persister si certains traitements sont administrés, et ces cellules sont positives pour TFAP2B. Ces dernières sont appelées cellules persistantes. Par conséquent, étant donné que TFAP2 est surexprimé dans les cellules persistantes, il s’agit d’une voie de traitement potentielle pour les cellules persistantes de mélanome.
ALDH1 constitue une autre voie potentielle. Si cette voie est surexprimée, elle est pro-tumorigène. Il est intéressant de noter que ALDH1 est élevé chez les patients ayant évolué sous l’effet des traitements anti-BRAF.
Récapitulatif :
Orateur: Dr Caroline Robert
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
L’immunothérapie peut être très utile pour lutter contre les cellules tumorales. Cependant, cette réponse peut parfois être trop forte. On sait toutefois que ces effets indésirables liés à l’immunité (IRAE) sont prévisibles et qu’il faut donc les traiter correctement.
Les effets indésirables les plus fréquents sont la fatigue, les problèmes cutanés et, heureusement, les effets les plus graves sont rares (cardiaques, rénaux). En outre, ces IRAE peuvent se chevaucher et compliquer les choses.
De nombreuses recommandations décrivent la manière de traiter ces effets indésirables. En général, on doit :
La prise en charge commence par la communication d’informations adéquates au patient, que ce soit oralement ou par écrit, avant l’administration du médicament. Il faut également s’assurer que le patient peut contacter l’équipe médicale.
Effets indésirables cutanés : l’éruption maculopapuleuse est la plus fréquente. Elle peut être bénigne même si la SC est > 30 : même en cas d’atteinte d’une large surface cutanée, elle peut être prise en charge à l’aide d’un traitement topique et ne nécessite pas l’arrêt des ICPI. Ceci doit être porté à la connaissance des oncologues afin qu’ils n’initient pas rapidement des stéroïdes systémiques et qu’ils ne stoppent pas les ICPI.
D’autres IRAE cutanés nécessitent une consultation dermatologique : pemphigoïde bulleuse, psoriasis...
La fatigue est très fréquente, mais elle peut aussi masquer d’autres IRAE plus graves. Il convient de réaliser un ECG, des examens de la thyroïde, etc.
Les IRAE thyroïdiens sont généralement irréversibles.
L’hypophysite est un IRAE qui peut constituer une urgence vitale. Elle peut être difficile à identifier car elle se manifeste parfois par une légère fatigue.
L’hépatotoxicité est généralement asymptomatique et sera donc identifiée au moyen de tests sanguins. Il faut tenir compte des autres médicaments pris par les patients, y compris les plantes ou l’alcool. On doit également penser aux infections virales.
La colite et la pneumonie peuvent être courantes et la difficulté consiste à exclure les infections.
La granulomatose de type sarcoïdose, une forme particulière d’IRAE pulmonaire, ne nécessite pas la suppression du médicament lorsqu’elle est bénigne.
La myocardite est un IRAE grave. En cas de suspicion (avec élévation de la troponine), il convient d’orienter rapidement le patient vers un service de cardiologie et d’instaurer un traitement par stéroïdes.
Si un patient a connu un IRAE, peut-on reprendre le traitement ? Cela dépend de la gravité et du profil du patient (antécédents de maladies auto-immunes, etc.) et également du fait de redonner le même traitement ou un traitement différent : avec le traitement anti-PD1, le risque d’IRAE est d’environ 50 %, si l’on passe des anti-CTLA4 aux anti-PD1, 21 % de grade 3, si l’on passe des anti-PD1 aux anti-CTLA4, 34 % de grade 3.
Il semble que certaines variantes génétiques de l’IL7 soient associées à des taux plus élevés d’IRAE.
Conduite à tenir avant de traiter un patient (en gras, ce qui n’a pas besoin d’être réitéré) :
Orateurs: Dr Arianna Bagliollini, Dr Jörg Wischhusen et Dr Alpaslan Tasdogan
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
Biomarqueur ATAD2
Dr Arianna Bagliollini
L’ATAD2 est exprimé dans le mélanome primaire et est corrélé à un taux de survie plus faible.
L’ATAD2 est suffisant et nécessaire à la formation du mélanome.
Biomarqueur GDF15
Dr Jörg Wischhusen
Le GDF15 a de multiples fonctions.
Il provoque l’anorexie et la cachexie.
Il semble également prédire l’échec potentiel d’une grossesse.
Le GDF15 est également en corrélation avec une faible survie dans les cancers.
Pourquoi a-t-il des effets différents ? C’est parce que le GDF15 empêche l’adhésion à l’endothélium et à l’ICAM1. Il entrave donc l’adhésion et l’amorçage des lymphocytes T.
Dans le cas du cancer, le GDF15 contribue à lutter contre la maladie. Ainsi, le fait de bloquer le GDF15 réduit cette résistance.
De même, les patients répondant aux médicaments anti-CTLA4 présentent de faibles taux de GDF15.
Le Visugromab (un anti-GDF15) semble être un médicament prometteur qui fait l’objet d’essais de phase I pour de nombreux cancers, et il semble très sûr.
La neutralisation du GDF15 rétablit la capacité des cellules immunitaires à extravaser les vaisseaux sanguins et à pénétrer dans le microenvironnement tumoral in vivo.
Métabolisme et mélanome
Dr Alpaslan Tasdogan
Bien que létales, les métastases représentent un processus hautement inefficace dans lequel la plupart des cellules cancéreuses ne survivent pas. Pourquoi certaines cellules métastatiques survivent-elles et d’autres pas ? L’une des explications réside dans les altérations du métabolisme (altérations du glucose, du lactate, etc.). Ces changements métaboliques déterminent le comportement des métastases. En fait, les profils métaboliques sont différents de ceux des métastases cérébrales, hépatiques ou pulmonaires :
Cependant, l’étude du métabolisme ne peut pas être réalisée sur des cultures de cellules. Elle nécessite des modèles in vivo.
Orateurs: Dr Lidia Kandolf, Dr Alexander Stratigos, Dr Ketty Peris, Dr Claus Garbe, Dr Celeste Lebbé et Dr Philippe Saiag
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
Recommandations concernant la kératose actinique (KA)
Dr Lidia Kandolf
Le risque de voir une KA se transformer en CEC est faible, mais il doit être suspecté en cas de lésions ulcérées, douloureuses ou indurées.
Ce risque est plus élevé chez les patients immunodéprimés, c’est pourquoi il faut toujours traiter les KA chez ces patients. Chez les patients immunocompétents, en cas de petites lésions isolées, on peut également recommander au patient de pratiquer un auto-examen.
Le meilleur traitement consiste à combiner la cryothérapie et les traitements topiques.
En ce qui concerne les traitements de terrain, il existe une nouvelle approche utilisant 5FU + calcipotriol dans le cadre d’un traitement de courte durée. Il existe également un nouveau traitement, la tirbanibuline à 1 %, qui a été approuvé pour les lésions non hypertrophiques.
Si l’on compare tous ces traitements, le 5FU (5 % > 4 %) est le plus efficace, suivi par la thérapie photodynamique ALA.
Recommandations concernant le carcinome épidermoïde (CEC)
Dr Alexander Stratigos
Les facteurs de risque du CEC diffèrent d’une recommandation à l’autre, mais certains sont communs :
En termes de diagnostic, il est très important d’obtenir des images cliniques.
En ce qui concerne les rapports de pathologie, il est important de présenter des données standardisées.
En ce qui concerne la prise en charge, la chirurgie est le traitement de référence (idéalement avec un contrôle microscopique). En ce qui concerne les marges initiales, il existe des différences, mais elles varient de 4 à 6 mm pour les CEC à faible risque, et de 6 à 10 mm pour les CEC à haut risque.
Pour les CEC à haut risque, les patients doivent être stadifiés à l’aide d’un scanner et d’une échographie, et éventuellement d’une IRM en cas d’atteinte des tissus mous ou des os.
En ce qui concerne la BGS, les preuves sont limitées quant au moment où elle doit être pratiquée. Étant donné que les patients ayant subi une BGS positive n’obtiennent pas de moins bons résultats que les patients ayant subi une BGS négative, les recommandations européennes ne préconisent pas la réalisation d’une BGS.
La radiothérapie peut être utilisée dans 3 cas :
Suivi des CEC :
tous les 3 à 6 mois avec échographie des ganglions lymphatiques pendant 2 ans. Ensuite, tous les 6 à 12 mois sans imagerie jusqu’à 5 ans, puis une fois par an ;
tous les 3-6 mois avec échographie des ganglions lymphatiques pendant 5 ans, et avec imagerie (CT, IRM, PET) tous les 3 à 6 mois pendant 3 ans et plus tard en fonction du risque individuel. Ensuite, tous les 6 à 12 mois avec échographie jusqu’à 5 ans, puis une fois par an ;
En ce qui concerne la prévention, la protection solaire est essentielle et les directives actuelles recommandent la nicotinamide 500 mg 2x/j chez les patients immunocompétents.
Recommandations concernant le carcinome basocellulaire (CBC)
Dr Ketty Peris
En termes de diagnostic, l’examen clinique avec dermoscopie est, dans la plupart des cas, suffisant pour diagnostiquer et prédire le sous-type de CBC.
La principale nouveauté réside dans la définition du CBC avancé, qui peut également inclure le CBC commun situé dans des zones difficiles à traiter. Dans ce type de cas, les inhibiteurs de Hedgehog peuvent être utiles. De plus, dans ce contexte, il est possible de recourir à ces médicaments avant la chirurgie, dans le cadre d’une approche néoadjuvante.
Recommandations concernant le mélanome
Dr Claus Garbe
Un examen dermoscopique doit toujours être effectué en cas de suspicion de mélanome.
Chez les patients dont la BGS est positive, la lymphadénectomie ne doit pas être pratiquée et un traitement adjuvant doit être proposé.
La lymphadénectomie doit être pratiquée lorsque des macrométastases sont identifiées, cliniquement ou grâce aux techniques d’imagerie.
Pour les patients au stade IV, l’immunothérapie doit être proposée à tous, quel que soit le statut BRAF. Dans certains cas où une réponse rapide est nécessaire (métastases symptomatiques), il est possible de proposer des inhibiteurs de BRAF en première intention.
Recommandations concernant le carcinome à cellules de Merkel (CCM)
Dr Celeste Lebbé
Il existe deux types de CCM : l’un associé au polyomavirus de Merkel et l’autre non.
Généralement, les CCM se développent rapidement, surtout dans les zones sous-exposées.
Sur le plan histologique, ils sont CK20+ et TTF1 négatifs.
Quand faut-il procéder à la stadification ?
Que doit-on faire ?
Traitement de la tumeur primaire :
Traitement locorégional :
Prise en charge du CCM localement avancé ou métastatique :
Le dermatofibrosarcome protuberans (DFSP)
Dr Philippe Saiag
Il ne présente pas de risque de métastases à distance, sauf s’il subit une transformation fibrosarcomateuse (qui survient chez 15 à 20 % des patients).
Bien que rare, c’est le sarcome cutané le plus fréquent.
Il est caractérisé par une translocation en 17q22 et 22q13 d’où résulte une protéine de fusion COL1A1-PDFGB.
Sur le plan pathologique, on observe des cellules fusiformes CD34 positives.
Il n’est pas nécessaire de procéder à une stadification par imagerie.
Pronostic : les récidives locales étaient très fréquentes avec la chirurgie conventionnelle, mais elles sont moins nombreuses avec la chirurgie de Mohs.
Le traitement est principalement chirurgical, et il est nécessaire de retirer entièrement la tumeur. Les marges doivent inclure le fascia profond et, latéralement, il faut respecter des marges de 1 à 1,3 cm avec une chirurgie contrôlée au microscope. Si la chirurgie avec contrôle microscopique n’est pas possible, les marges doivent être de 3 cm.
Le traitement médical par Imatinib est autorisé en cas de DFSP primaire inopérable ou de DFSP métastatique.
Orateurs: Dr Claus Garbe, Dr Jeffrey E. Gershenwald, Dr Axel Hauschild et Dr Alexander Menzies
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
Une nouvelle classification du mélanome est-elle nécessaire ?
Yes: Claus Garbe
No: Jeffrey E. Gershenwald
L’AJCC permet de déterminer, à différentes phases de la maladie (c : clinique, p : histologique, yc ou yp : post thérapeutique, r : à récidive, a : à autopsie). Actuellement, l’AJCC en cours est la huitième du nom, et par certains aspects elle n’est plus en phase avec les dernières découvertes et avancées thérapeutiques.
Elle trouve sa source dans les données de la cohorte IMDDP (international melanoma database and discovery platform, 10 centres en Europe, US et Australie collectant les informations de survie spécifique liée au mélanome des patients stade I à III de 1998 à 2013). Elle souffre de la sous déclaration des morts spécifiques par mélanome, car l’information est dure à collecter. Avec les traitements actuels, les courbes de survie en stade IV ont de fait beaucoup évoluées passant à 5 ans de 5 à 50%, depuis par exemple 2008, et particulièrement la survie des patients avec métastase cérébrale.
Un inconvénient de la classification actuelle est aussi son manque de simplicité d’utilisation clinique, à défaut d’utiliser par exemple les applications digitales.
L’incorporation des nouveaux biomarqueurs disponibles permettrait d’augmenter sa pertinence, mais aucun n’est actuellement validé ni largement consensuel
Toute modification doit permettre de conserver l’universalité qui fait la force des classifications
A-t-on encore besoin d’un traitement adjuvant du mélanome ?
Yes: Axel Hauschild
No: Alexander Menzies
Oui : si l’on observe les courbes de survie à 5 ans des sous-groupes des stade III ((A à D), les au mieux 25% de mortalité justifient toujours la proposition de traitement adjuvant.
Il ne ressort d’aucune étude de qualité de vie au cours des 5 essais princeps un quelconque impact négatif des traitements adjuvants, malgré l’existence d’effets secondaires (dont 3% de sévères, imprévisibles et parfois irréversibles, comme les effets cardiologiques et neurologiques) et de 15% d’arrêts de traitement.
En analysant indirectement les taux de survie globale (de CK238 et l’eortc18071), on retrouve 35% d’amélioration avec le nivolumab contre le placebo et 43% à 3 ans avec la combinaison dabrafenib trametinib
En vie réelle 75% des patients acceptent le risque de l’adjuvant.
Pourtant en réalité, le traitement ne bénéficie qu’à environ 1/5ème des patients, si on exclue : les patients traités qui récidivent tout de même et ceux qui n’auraient dans tous les cas jamais récidivé…
Le traitement adjuvant est donné après la chirurgie ganglionnaire dans les stade III, ce qui ne prévient pas le risque de lymphoedème puisque ne supprime pas le curage actuellement. L’espoir des traitement neoadjuvant est de réduire voire de supprimer la chirurgie après réponse à l’mmunothérapie initiale.
On espère exclure les patients qui n’ont pas d’intérêt à recevoir un adjuvant en utilisant par exemple des signatures immunohistochimiques : les patients négatifs par exemple pour le test immunoprint ont une survie sans récidive estimée de 96% à 10 ans.
En revanche à l’heure actuelle on ne sait pas identifier les patients qui vont tirer parti de l’adjuvant.
Les 20% de rechuteurs précoces (avant même d’avoir eu le temps d’instaurer l’adjuvant après chirurgie) sont de facto non-candidats.
Les indications actuelles de l’adjuvant laissent également sur le carreau tous les tueurs silencieux que représentent les mélanomes fins à haut risque de récidive, non identifiés à ce jour : 63% des morts actuelles par mélanome avaient initialement un stade I !
Orateur: Dr Reinhard Dummer
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
L’idéal serait de disposer de biomarqueurs, mais c’est extrêmement complexe en raison de la grande hétérogénéité du mélanome.
L’essai COMBI-AD a étudié deux biomarqueurs : la charge tumorale et l’inflammation. Une faible charge tumorale et une inflammation élevée sont associées à de meilleures réponses au traitement adjuvant.
De même, les données d’autres essais ont montré l’importance du microenvironnement (PIK3CA, ERBB2). Les patients présentant des mutations de PIK3CA ou l’expression de ERBB2 se porteront moins bien avec les inhibiteurs de BRAF/MEK et pourraient bénéficier de l’ajout d’autres traitements.
Le problème, c’est que les tumeurs sont hétérogènes et que ce qui est vrai pour certains sous-types de mélanome peut ne pas l’être pour d’autres, d’où l’importance de développer des biomarqueurs pour les différents sous-ensembles de mélanomes. Autre élément qui ajoute encore à la complexité : les mutations du mélanome sont dynamiques et évoluent avec le temps.
L’avenir passera peut-être par l’intégration de toutes les informations disponibles, telles que les données pathologiques, la dermoscopie, les informations sur les mutations, etc.
Orateur: Dr Georgina Long
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
L’avènement du traitement néoadjuvant marque un tournant en ce qui concerne le mélanome. Grâce à l’approche néoadjuvante, on observe pour la première fois dans l’histoire des courbes de Kaplan-Meier plates dans le traitement des mélanomes avancés. En effet, le traitement administré avant la chirurgie permet une meilleure réponse immunitaire contre les tumeurs et, dans la mesure où l’on peut étudier la tumeur après le traitement, on sait quels patients sont les meilleurs candidats pour le traitement.
Outre le fait qu’il est plus court, moins cher, moins toxique, etc., le traitement néoadjuvant présente de multiples avantages (au nombre de 5, récapitulés ci-dessous).
Les 5 avantages du traitement néoadjuvant dans le mélanome sont les suivants :
En ce qui concerne le point numéro 1, il est important de décrire correctement la réponse pathologique et il existe des livres blancs indiquant les éléments que doit comporter le rapport pathologique et la manière de traiter les tissus. Il est donc essentiel de discuter avec les pathologistes pour s’assurer qu’ils sont conscients de ces enjeux.
Il est intéressant de noter que les résultats diffèrent selon qu’on recourt à une immunothérapie ou à une thérapie ciblée (TC) : si l’on n’obtient pas une réponse pathologique complète en TC, il peut y avoir des rechutes, alors qu’avec l’immunothérapie, on peut s’en sortir même avec une réponse partielle, bien que l’objectif soit d’obtenir une réponse pathologique majeure (RPM) comprenant une réponse pathologique complète (100 % de la tumeur a disparu) ou une réponse tumorale quasi pathologique (moins de 10 % de la tumeur viable reste en place).
Orateur: Dr Iris Zalaudek
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
Il existe des différences entre hommes et femmes dans le pronostic des CPNM. Les explications sont multiples : l’exposition au soleil peut être plus importante chez les hommes (mais ce n’est pas tout à fait vrai car les femmes ont tendance à prendre plus de bains de soleil), l’utilisation chronique d’AINS chez les femmes peut également améliorer le pronostic du CPNM, etc. Mais il existe probablement d’autres explications.
On ignore s’il faut traiter tous les patients atteints de KA, même s’ils ne présentent aucun facteur de risque. À l’inverse, il arrive que l’on ne traite pas le champ de cancérisation chez des patients ayant subi l’ablation d’un CEC. Nous devons concentrer notre attention et nos efforts sur les patients qui en ont besoin.
Par ailleurs, on dispose aujourd’hui de médicaments pour les CPNM avancés, ce qui nous oblige à suivre davantage une approche pluridisciplinaire. Mais ce n’est probablement pas suffisant et il faut poursuivre nos efforts pour améliorer les soins aux patients à haut risque, mener des recherches sur le traitement de terrain des patients transplantés, mettre en place des services de dermatologie capables de traiter les toxicités des nouveaux médicaments (les anti-PD1 sont de plus en plus utilisés dans les CPNM) et déterminer qui doit être suivi et qui peut pratiquer un auto-examen.
Orateurs: Dr Luca Tagliaferri, Dr Agata Rembielak, Dr Martina Ferioli et Dr Angela Hong
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
Radiothérapie exclusive
Dr Luca Tagliaferri
Le traitement habituel du CBC repose sur la chirurgie, en particulier la chirurgie de Mohs. Toutefois, certains patients ne souhaitent pas subir d’intervention chirurgicale et la radiothérapie (RT) constitue alors une excellente alternative.
Les revues systématiques montrent que la RT présente le même taux de récidive que la chirurgie de Mohs (environ 3 %). En outre, les résultats esthétiques sont souvent bons, en particulier avec les nouvelles techniques de RT. La RT peut donc être utilisée comme traitement primaire avec de très bons résultats.
De plus, dans le cas d’un CBC localement avancé, la RT peut également intervenir dans un contexte néoadjuvant ou adjuvant.
Quel est l’avenir de la RT ? Probablement la radiothérapie guidée par l’image (guidée par échographie, OCT, etc.), d’où l’importance capitale d’une prise de décisions multidisciplinaires.
Radiothérapie adjuvante
Dr Agata Rembielak
La radiothérapie peut être administrée de différentes manières en cas de cancer de la peau : par voie externe (méthode la plus courante) ou à l’aide de cathéters cutanés (curiethérapie).
La radiothérapie cutanée offre une excellente alternative à la chirurgie, en particulier chez les patients âgés, mais elle nécessite plusieurs visites.
La RT est indiquée dans les situations suivantes :
exérèse incomplète ;
exérèse marginale ;
exérèse totale : RT adjuvante ;
Dans le cas d’un CEC, certains patients peuvent bénéficier d’une RT adjuvante, mais lesquels ? Les recommandations diffèrent, mais elles préconisent généralement une RT adjuvante en cas de marges chirurgicales positives ou de CEC à haut risque (invasion périneurale, etc.). Malheureusement, nous ne disposons pas de données fiables. C’est pourquoi le Royaume-Uni a entrepris une étude prospective afin de comparer la RT adjuvante à l’observation dans les cas de CEC à haut risque.
Électrochimiothérapie
Dr Martina Ferioli
L’électrochimiothérapie (ECT) est un traitement local consistant à administrer un médicament (généralement de la bléomycine ou du cisplatine), puis à soumettre la tumeur à un courant électrique. Cette méthode permet de surmonter la résistance aux médicaments et d’être utilisée pour la quasi-totalité des tumeurs.
Ce traitement peut être employé pour de nombreuses tumeurs cutanées telles que le mélanome, le carcinome à cellules de Merkel, le sarcome de Kaposi, les métastases, mais il a également fait ses preuves dans le CBC et le CEC.
Il peut induire un taux de réponse global d’environ 80 % avec des réponses complètes dans 60 à 70 % des tumeurs de moins de 3 cm. L’effet thérapeutique maximal est obtenu après 6 à 8 semaines. Les cycles sont plus courts de 4 semaines si l’on recourt à la bléomycine.
On envisage l’ECT lorsque la chirurgie est impossible ou contre-indiquée, en cas de lésions résistantes à la chimiothérapie ou à la radiothérapie, ou dans un contexte palliatif. En réalité, l’ECT peut être utilisée avec succès dans les cas de CBC, CEC, etc. Toutefois, les recommandations ne préconisent pas l’ECT en tant que traitement de première ligne et privilégient le traitement des lésions réfractaires ou un contexte palliatif. L’ECT pourrait probablement aussi convenir dans les cas de CBC ou de CEC complexes.
Nouveautés dans le domaine de la radiothérapie
Dr Angela Hong
En raison de la pandémie de COVID19, différentes stratégies ont été élaborées dans le domaine de la RT. L’une d’entre elles consiste à exécuter des schémas hypofractionnés (doses plus élevées mais durée plus courte). Ces schémas ont été adaptés en fonction du statut ECOG et de l’âge du patient. On a également eu recours à la RT topique avec la curiethérapie topique au rhénium-188. Ces schémas ont permis d’obtenir de très bons résultats avec moins de visites. Cependant, avec ces schémas hypofractionnés, le résultat est un peu moins esthétique, avec davantage d’hypopigmentation et d’autres effets secondaires cutanés.
Parmi les nouvelles avancées, citons l’utilisation de bolus imprimés en 3D (comme un moule) pour traiter des surfaces difficiles d’accès, telles que le nez.
Orateur: Dr Emmanuella Guenova
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
La dernière classification du lymphome cutané a subi quelques modifications, avec notamment le changement de nom du lymphome de la zone marginale désormais appelé maladie lymphoproliférative de la zone marginale. Pourquoi ce changement de nom ? Parce que cette entité est tellement indolente que certains auteurs doutaient qu’il s’agisse d’un véritable lymphome.
En ce qui concerne les lymphomes cutanés à cellules T (LCCT), il est important de noter que la présentation classique du mycosis fongoïde n’est pas la plus fréquente. Il faut donc savoir qu’il existe une hétérogénéité clinique.
La stadification du mycosis fongoïde a été actualisée et elle est désormais liée au pronostic, mais il existe un certain chevauchement dans la survie des patients au stade II avancé et au stade III précoce, de sorte que cette classification sera affinée au fil du temps.
En ce qui concerne le traitement, on note un ajout intéressant : l’utilisation du pimécrolimus topique aux stades de la plaque et de la plaque mince (données provenant d’un essai clinique randomisé), qui s’avère efficace et montre qu’il n’y a pas lieu de redouter le recours aux inhibiteurs de la calcineurine topiques dans les lymphomes cutanés, en dépit de la mise en garde encadrée publiée il y a bien longtemps (qui a en fait été supprimée).
Parmi les autres médicaments autorisés pour les LCCT, citons le mogamulizumab (médicament anti-CCR4) et le brentuximab pour les LCCT CD30 positifs. D’autres médicaments contiennent des inhibiteurs d’HDAC tels que la romidepsine, dont les effets sont limités.
Quels sont les besoins non satisfaits dans les lymphomes cutanés ? Contrairement au mélanome pour lequel l’immunothérapie a été développée, dans les lymphomes cutanés, la cellule cancéreuse est en fait la cellule immunitaire, de sorte que les médicaments doivent être sélectifs afin d’éliminer les cellules cancéreuses et non les cellules immunitaires normales.
En fait, certains essais ont fait appel à des inhibiteurs de points de contrôle immunitaire dans les lymphomes cutanés et, si certains patients y répondent, d’autres non. On suppose que les patients non répondeurs ne parviennent pas à produire une réponse immunitaire efficace, mais on ne connaît pas les biomarqueurs exacts qui permettraient de reconnaître les patients répondeurs. Parmi les autres explications possibles, on peut citer les différences dans la réponse de la phagocytose.
Ainsi, d’autres moyens de modifier la réponse immunitaire pourraient être bénéfiques dans les lymphomes cutanés. Par exemple, l’inhibition de la voie JAK/STAT à l’aide de médicaments spécifiques, tels que le tenalisib ou le cerdulatinib, constitue une approche intéressante.
Les nouveaux médicaments s’orientent vers des traitements d’entretien et il s’agira probablement de nouveaux médicaments à base d’HDAC.
Il ne faut pas oublier non plus que dans certains cas bénins, l’observation vigilante est également une option et que, dans les cas avancés, le seul traitement curatif reste la greffe de moelle osseuse.
Orateur: Dr David Whiteman
Compte rendu rédigé par Dr Oriol Yélamos
L’Australie est un exemple en matière de prévention primaire du mélanome. Avant les années 1930, les Australiens ne s’exposaient pas au soleil. Après les années 30, le bronzage est devenu une mode et les Australiens ont commencé à se rendre à la plage sans crème solaire. Comme la majorité des Australiens étaient originaires d’Angleterre et du Pays de Galles (peaux claires) et que l’Australie est proche de l’équateur, les gens attrapaient facilement des coups de soleil. Plus tard, dans les années 50, les épidémiologistes australiens ont constaté une augmentation spectaculaire de la mortalité due au mélanome, mais rien n’a été fait pour y remédier. Dans les années 80, les données épidémiologiques ont montré que les rayons UV étaient responsables de cette augmentation du nombre de mélanomes et les autorités australiennes ont commencé à prendre des mesures pour inverser la situation.
Pour ce faire, l’Australie a mis en œuvre des campagnes de sensibilisation, des modifications législatives, réglementaires et fiscales, entre autres. En ce qui concerne les campagnes de sensibilisation, dans les années 80, l’Australie a lancé une grande campagne intitulée Slip Slop Slap, visant à informer la population des dangers des bains de soleil et de leur lien avec le mélanome. Cette campagne a connu un grand succès et, de nos jours, les gens ne cherchent plus vraiment à bronzer. Toutefois, la priorité est désormais de réduire l’exposition quotidienne au soleil
En ce qui concerne les changements législatifs, certains Australiens atteints de mélanome ont attaqué leurs entreprises en justice parce qu’ils avaient développé un mélanome et que leurs employeurs n’avaient rien fait pour les protéger. Cette situation a entraîné des changements dans les lois et règlements australiens. Par exemple, les personnes qui travaillent au soleil doivent désormais porter des chapeaux à larges bords, des vêtements de protection contre le soleil, etc. Ces équipements doivent être fournis par l’employeur. Des réglementations ont également été adoptées en ce qui concerne les crèmes solaires, afin de s’assurer de leur efficacité. Il est intéressant de noter qu’en Australie, les travailleurs devant s’exposer au soleil et mettre de la crème solaire peuvent déduire le coût de cette dernière de leurs impôts. Il existe également des réglementations concernant l’utilisation de l’ombre, et les écoles, les universités, etc. doivent disposer de zones abritées du soleil. Enfin, l’Australie a également interdit les lits de bronzage. Mais toutes ces mesures sont-elles efficaces ? En termes de mortalité, non, probablement parce qu’il faut des décennies pour que ces campagnes de santé publique portent leurs fruits. En revanche, si l’on examine le nombre de mélanomes, il semble que l’incidence des mélanomes diminue chez les générations nées après la campagne « Slip Slop Slap » des années 80.
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