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Comptes-rendus rédigés par Pr Lise BOUSSEMART Dermatologue, Dr Claudio CONFORTI Dermatologue et Dr Oriol YELAMOS PENA Dermatologue,
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Chers Confrères,
C’est avec plaisir que je vous retrouve en ce jeudi 15 avril 2021, pour ce 17e congrès de l’EADO, cette année couplé au 10e congrès mondial du mélanome.
Cette conférence aurait dû se tenir à Rome, dans le nouveau centre de congrès La Nuvola, inauguré en 2016, mais aujourd’hui reconverti en centre de vaccination Covid-19. S’agissant du second congrès EADO 100 % virtuel depuis le début de la pandémie, j’ai remarqué que les orateurs semblent moins dépités, et plus résilients par rapport à l’impossibilité de tout rassemblement présentiel. C’est malgré tout dans ces moments-là que l’on réalise à quel point les anciens congrès présentiels avaient un intérêt humain (retrouvailles entre pairs, échanges d’idées dans le cadre de discussions informelles autour d’un café, etc.), bien au-delà de leur intérêt purement informatif. Heureusement, les vaccins nous permettent d’espérer un retour prochain au présentiel, qui nous permettra de savourer encore davantage ces contacts dont nous manquons tant aujourd’hui.
Compte rendu rédigé par Pr Lise BOUSSEMART Dermatologue, France
D’après les communications orales de Samantha Guild (Richmond, États-Unis), Chiara Puri Purini (Rome, Italie) et Gillian Nuttall (Manchester, Royaume-Uni)
La première session de ce matin portait sur les « patient advocates ».
Je n’ai pas de traduction exacte en français, au mieux peut-être « patient-expert » ou « patient engagé ». Mais globalement, j’ai compris que le « patient advocate » était une personne experte d’une maladie (souvent pour l’avoir vécue elle-même ou dans son entourage proche), qui s’investit dans l’information et le soutien global d’autres patients, le plus souvent dans le cadre d’une association. Donc, il en existe clairement en France, par exemple dans le cadre de l’association « Vaincre le Mélanome ». J’ai moi-même un néologisme très personnel pour ce genre de patient très actif, et très demandeur de tout comprendre, les « actients », conséquence du triste manque de vocabulaire médical pour désigner un patient « actif ». Car comme le disent Samantha Guild, présidente de l’association américaine « Aim at Melanoma », et ses homologues européennes, « savoir est pouvoir ». Ainsi, toutes les représentantes d’associations de « patient advocates » assistent désormais aux congrès internationaux de cancérologie tels qu’EADO, ESMO, ASCO…
L’une d’elle, Chiara Puri Purini, fondatrice de l’association italienne « Melanoma Italia Onlus », a partagé certains moments de vie émouvants, tels que la fois où elle s’est vu refuser l’entrée à une session de l’ESMO, « car trop sensible à ce qui va être dit », ou encore l’époque où certains patients italiens allaient acheter, il y a une dizaine d’années, leurs thérapies ciblées aux États-Unis, quand celles-ci tardaient à être remboursées chez eux... Toutes ont conscience que parfois, la mise en route d’un traitement est vraiment à la semaine près, ce que je ressens aussi dans ma pratique d’oncodermatologue, bien qu’aucune étude scientifique n’ait prouvé qu’un retard de mise en route de traitement puisse parfois être aussi préjudiciable que de donner un traitement inefficace. D’où leur détermination à accélérer l’accessibilité des nouveaux traitements sans subir le retard trop fréquemment observé en Europe par rapport aux États-Unis. Les « patient advocates » ont pour ambition de s’impliquer dans toutes les étapes d’innovation thérapeutique du mélanome : du développement, aux essais cliniques et à la distribution des nouveaux traitements.
Leurs armes, pour avancer sont leurs sites internet, avec état des lieux actualisés des essais cliniques en cours dans les différentes villes, les échanges via Facebook, Twitter, des campagnes d’affichage dans les transports en commun, incluant « photos choc », notamment de coups de soleil graves, efficaces pour attirer l’attention…
Gillian Nuttall a parlé de la mise en place de son application d’autonomisation des patients vis-à-vis de leurs effets secondaires (« My melanoma app », lancée en 2016). Cette application compte 648 inscrits, dont 60 % de patients atteints de mélanome stade III-IV. De façon intéressante, les patients ont rapporté des effets secondaires a priori non « prévus » par les médecins, tels que « myalgies », « oedème », « insomnies », « anxiété », « tristesse », « sentiment de découragement », etc. Difficile de faire la part entre réel effet secondaire au traitement ou à la maladie, je vous l’accorde, mais ce qui est certain, c’est que ces inconforts de vie existent et doivent être pris au sérieux également.
Ensemble, les associations des divers pays se sont regroupées en « MI-PAC », Melanoma International Patient Advocates Coalition, dont le rôle est de mutualiser les forces pour l’aide psychologique ou socio-économique aux malades, la médiation entre patient et équipe soignante, l’information sur les droits du patient, les démarches législatives impactant les traitements et la recherche, la sensibilisation du grand public, avec notamment des actions de prévention solaire en école primaire, qui ont l’avantage de toucher, via les enfants, leurs parents et leur fratrie.… Et, bénéfice inattendu de la pandémie, les réunions digitales facilitent et démultiplient les échanges entre différentes associations membres.
Compte rendu rédigé par Pr Lise BOUSSEMART Dermatologue, France
D’après les communications orales de Helen Rizos (Sydney, Australie), Teofila Caplanusi Seremet (Lausanne, Suisse) et Renata Varaljai (Essen, Allemagne)
La deuxième session du matin portait sur les avancées dans le domaine de la biopsie liquide, et notamment le dosage d’ADN tumoral circulant muté BRAF. Il s’agit d’une révolution facilitant grandement l’analyse de l’ADN d’une tumeur. Alors que l’on croyait depuis longtemps que l’ADN tumoral circulant était uniquement libéré par les cellules apoptotiques ou nécrotiques, il semble qu’il soit aussi sécrété activement par la tumeur métaboliquement active, en réplication. D’où sa diminution rapide en cas de réponse au traitement.
Helen Rizos a expliqué le mode de fonctionnement de la PCR digitale, rapide et plus sensible que la technique de séquençage haut débit (dite « NGS »). Pour les patients avec faible charge tumorale, un moyen d’augmenter encore la sensibilité, pour éviter les faux négatifs, est d’augmenter le nombre de mutations recherchées en parallèle par PCR digitale : en plus de BRAF, TERT ou CDKN2A… tout en gardant en tête que certaines mutations de ces gènes peuvent être germinales bien entendu. La spécificité de la mutation BRAFV600E, elle, est de 100 %.
Les méthodes de l’avenir seront les méthodes INVAR avec une sensibilité atteignant 0,001 % (Integration of Variants Reads pipeline, Wan et al., Sci Transl Medicine 2020) et IDES-enhanced CAPP-Seq, avec une sensibilité encore meilleure à 0,0025 % (Cancer Personalized Profiling by deep Sequencing, Newman et al., Nat Biotechnology 2016). Si c’est moins la sensibilité que la rapidité de résultat que l’on recherche, Teofila Caplanusi Seremet, de Lausanne, a participé à la validation de la plateforme Idylla, déjà bien répandue pour les tests somatiques, qui rend le résultat BRAF en circulant sur seulement 1 ml de plasma en 2 heures.
Renata Varaljai a montré les résultats de son article paru dans JCO PO en 2019.
Sur sa cohorte allemande, le dosage d’ADN tumoral circulant (combinant BRAF, NRAS et TERT) a montré sa supériorité par rapport au simple dosage des LDH et de la PS100. Ses variations devançaient les réponses radiologiques de 1,5 mois et les progressions radiologiques de 3 mois en moyenne. Cependant, l’ADN tumoral circulant est souvent négatif dans le sang en cas de métastases limitées au système nerveux central (intérêt du dosage dans le LCR) ou strictement cutanés (intérêt du dosage directement sur liquide de rinçage de tumeur ulcérée).
L’ADN tumoral circulant a aussi un intérêt pronostic, aussi bien avant qu’après-curage ganglionnaire.
Quant aux 20 % de patients n’ayant aucune mutation de BRAF, NRAS ou TERT, elle propose de simplement doser l’ADN libre circulant (« cf DNA ») comme démontré dans son article publié dans le JEADV en 2020.
Compte rendu rédigé par Pr Lise BOUSSEMART Dermatologue, France
Ensuite, est arrivée l’heure des sessions plénières.
D’après la communication orale de Thomas Gajewski (Chicago, États-Unis)
Thomas Gajewski a parlé des mécanismes de résistance à l’immunothérapie dans le mélanome, en expliquant les différences entre un microenvironnement inflammatoire - lymphocytes T (« T-cell inflamed ») et un microenvironnement en échappement immunitaire (« non-T-cell inflamed »). Un microenvironnement propice à la réponse immunitaire T est caractérisé par un fort marquage CD8+, la présence de cytokines de type CXCL9 et CXCL10, une signature interféron de type 1, et surtout la présence de cellules dendritiques Batf3. Ces cellules dendritiques sont impliquées à la fois dans la phase initiatrice et effectrice de la réponse anti-tumorale. Elles activent les cellules T d’où leur effet synergique avec le « lever de frein » des traitements anti PD-1.
La cellule tumorale elle-même peut jouer sur ce microenvironnement, par l’activation de bêtacaténine ou la double perte de PTEN. Ainsi quand la tumeur active sa voie bêtacaténine, les cellules dendritiques Batf3 ne sont pas recrutées dans la tumeur : cela entraîne dans les modèles animaux, une résistance à toute immunothérapie, vaccination, ou même thérapie cellulaire basée sur les TILs (tumor infiltrating lymphocytes). Chez l’humain, il a décrit un cas de résistance secondaire à l’immunothérapie avec activation acquise de la voie bêtacaténine.
Par une méthode de screening de CRISPR (extinction élective de gènes), il a également identifié DECR2 comme gène de résistance à l’immunothérapie : en cas d’extinction de ce gène, la tumeur devient résistante.
Ce gène code pour une protéine impliquée dans la peroxydation des lipides membranaires, nécessaire au phénomène de ferroptose, une forme de mort cellulaire récemment décrite, elle-même induite en réponse aux lymphocytes CD8+. (Weimin Wang et al., Nature 2019).
Enfin, le terrain génétique constitutionnel du patient peut aussi jouer sur la réponse immunitaire, avec la découverte récente de l’impact de variants du gène PKC delta (Cron et al., article en préparation).
D’après la communication orale de Jedd Wolchok (New York, États-Unis)
Jedd Wolchok s’est amusé de la pratique planétaire des réunions « zoom » comme un mécanisme de résistance humaine au SARS CoV2. Plus sérieusement, il a refait l’histoire de l’immunothérapie, des anti CTLA-4 aux anti PD-1, jusqu’à aujourd’hui, avec la triple combinaison atezolizumab + anti BRAF + anti MEK, disponible aux États-Unis depuis 2020. Pour demain, il croit au potentiel des agonistes d’Ox-40 comme moyen de surpasser l’hétérogénéité d’expression antigénique (travail de Daniel Hirschhorn en particulier, dans modèle murin).
D’après la communication orale de Jennifer Wargo (Houston, États-Unis)
Enfin, Jennifer Wargo a parlé des facteurs extrinsèques au génome, comme l’exposome externe et interne, qui influencent la santé en général, et la réponse à l’immunothérapie en particulier.
De même qu’elle a remarqué, de façon accidentelle il y a quelques années, qu’une infection de ses cellules in vitro par mycoplasme pouvait leur conférer une résistance à la chimiothérapie, transmissible à toute autre lignée cellulaire, il semblerait que des microbes soient aussi fréquemment détectés dans les mélanomes (mais j’aurais aimé savoir s’il s’agissait de prélèvements cutanés, auquel cas ce n’est pas surprenant, ou de prélèvements internes).
Il est bien démontré maintenant qu’un microbiome diversifié est de meilleur pronostic, avec de meilleures réponses tumorales observées chez les patients atteints de mélanomes. Pour diversifier ce microbiome, des essais cliniques de transplantation fécale de donneurs en réponse complète vers des patients en progression ont montré des réponses spectaculaires sur de faibles effectifs (Baruch et al., Science 2020 ; Davar et al., Science 2021 : 15 progresseurs sous anti PD-1, 7 donneurs : 6 patients ayant tiré un bénéfice clinique). Même les colites auto-immunes secondaires à l’immunothérapie semblent pouvoir être traitées par transplantation fécale ! (Wang et al, Nature Medicine 2018). Attention néanmoins au risque déjà observé, de transmettre des bactéries multirésistantes par l’intermédiaire de ces transplantations fécales.
Alors que le rôle néfaste des antibiotiques reste controversé, le Dr Wargo a insisté sur les bénéfices d’un régime riche en fibre pour diversifier sa flore intestinale et augmenter significativement ses chances de répondre aux anti PD-1. Après avoir mené des études observationnelles encourageantes, le Dr Wargo a débuté des essais interventionnels de modification d’alimentation chez des patients stables sous anti PD-1.
Et pour la blague qui n’en est pas vraiment une, il semblerait que bientôt arriveront sur le marché des toilettes connectées qui analyseront nos selles sur le plan bactériologique, avec réception des caractéristiques de notre flore sur notre smartphone en temps réel ! Il n’est jamais trop tard pour se mettre aux fibres…
Compte rendu rédigé par Pr Lise BOUSSEMART Dermatologue, France
En fin de matinée, s’est tenue une session sur la traversée de la pandémie dans le domaine du mélanome.
D’après la communication orale de Violeta Astratinei (Roumanie)
Là encore, la parole a été donnée à une « patient advocate », Violeta Astratinei.
Je trouve que l’ouverture d’esprit des congrès est en train d’évoluer dans le bon sens, avec cette
parole donnée de plus en plus aux patients. Cette patiente était questionnée sur son ressenti, au nom de son association, de la maladie à l’heure de la pandémie. Elle a déploré le moindre accès aux essais cliniques, les chirurgies retardées, les retards d’examens de suivi, etc.
Certains patients auraient eu tendance à cacher leurs symptômes viraux (fièvre, toux, etc.) de peur de ne pas pouvoir recevoir leur traitement anti-cancéreux.
L’Europe de l’Est, ou centrale, était plus démunie en matière de possibilités (légales et/ou techniques) de téléconsultations.
D’après la communication orale de Hussein A. Tawbi (Houston, États-Unis) & Paolo Ascierto (Naples, Italie)
Côté hôpital : Paolo Ascierto à Milan a été très touché : sa priorité a été de protéger à la fois les patients et les soignants. Il a appris au fil des mois, avec l’ensemble de notre communauté, que les patients traités par immunothérapie ou thérapie ciblée n’étaient pas exposés à un risque particulier supplémentaire vis-à-vis du coronavirus. Il a participé à un consensus multidisciplinaire d’experts de l’ESMO pour établir des recommandations européennes accessibles à tous, sur la prise en charge des cancers en temps de pandémie (Curigliano et al., Annals of Oncology 2020).
Soutenu par la Société pour l’immunothérapie des Cancers, il est convaincu que cibler l’IL6 serait une piste très intéressante dans le traitement des formes graves de covid-19.
Hussein Tawbi a lui aussi décrit comment il a vécu la pandémie aux États-Unis, un peu en décalé par rapport à l’Europe : eux aussi ont privilégié la télémédecine ou les appels téléphoniques selon la législation de chaque état. A cause des chirurgies retardées, notamment les curages ganglionnaires, ils ont parfois traité de façon néo adjuvante. Quand la chirurgie avait lieu, si le risque de récidive était < 50 %, ils ont annulé des traitements adjuvants. La pandémie a eu aussi comme conséquence d’accélérer l’autorisation d’espacer les injections de pembrolizumab à toutes les 6 semaines aux US.
Enfin, au stade métastatique, ils ont privilégié les anti PD-1 par rapport à la double immunothérapie, sauf en cas de métastases cérébrales non mutées BRAF.
Pour ce qui est du vaccin des patients, il recommande de l’espacer de 3 jours minimum avec les injections d’immunothérapie. La discussion a montré des disparités en matière d’accès aux vaccins, et même au sein du même pays, avec la même maladie.
Ainsi, Caroline Robert a dit que son Institut (Gustave Roussy) avait donné accès au vaccin à tous ses patients quel que soit leur stade de maladie, ce qui est loin d’être le cas partout en France. En ce qui concerne les vaccins des soignants, le Dr Tawbi a reconnu la chance qu’il avait dans son centre (MD Anderson Cancer Center) de pouvoir faire vacciner chaque soignant(e) en même temps que son/sa conjoint(e).
Compte rendu rédigé par Pr Lise BOUSSEMART Dermatologue, France
Enfin, un symposium a porté sur le nouveau test pronostic MelaGenix.
Un test de profilage d’expression génique, créé, validé cliniquement (sur des mélanomes de stades I à III) par l’entreprise allemande Neracare, en partenariat avec des académiques. Il s’agit d’un test statistiquement significatif pour prédire la survie spécifique au mélanome, qui sera bientôt sur le marché.
Ce test prend en compte l’expression de 8 gènes pronostiques parmi les 11 qui corrélaient à la survie dans la publication de Brunner et al., 2008 : KRT9, DCD, PIP, SCGB1D2, SCGB2A2, COL6A6, GBP4, KLHL41. Après quelques ajustements mathématiques, l’expression de chaque gène permet de classer les patients à haut vs faible risque de récidive, indépendamment du ganglion sentinelle. Même si le traitement adjuvant a un intérêt démontré sur l’ensemble des mélanomes stade III (hormis les stades IIIa < 0,3 mm, car pronostic très bon de base), il est certain que des patients reçoivent ce traitement inutilement (plus probablement des patients en stade IIIa) alors que tous en subissent les effets secondaires.
A l’inverse, on ne propose pas de traitement adjuvant aux mélanomes de stade II bien que les stades IIc aient un pronostic bien plus sombre que les stades IIIa. Melagenix a donc pour ambition de mieux personnaliser la balance bénéfice-risque de chacun vis-à-vis des traitements adjuvants.
Dirk Schadendorf a ainsi initié un essai clinique multicentrique allemand testant Melagenix sur des mélanomes de stade II, avec, pour les patients classés à haut risque Melagenix, une randomisation 2 :1 pour du nivolumab en adjuvant. 130 patients sont déjà inclus.
Compte rendu rédigé par Pr Lise BOUSSEMART Dermatologue, France
Enfin, comme tout congrès en 2021 qui se respecte, il fallait aborder le sujet de l’intelligence artificielle.
D’après les communications orales de Friedrich Overkamp (Berlin, Allemagne), Alexander Radbruch (Bonn, Allemagne), Titus Brinker (Heidelberg, Allemagne), Viktor H. Kölzer (Zurich, Suisse) et Olivier Michielin (Lausanne, Suisse)
Globalement, l’intelligence artificielle, avec le deep learning et le machine learning, a débuté très fort dans les domaines de la radiologie et de l’anatomo-pathologie. Elle arrive aussi en oncodermatologie, et tous les orateurs se sont accordés sur le fait qu’on ne peut aller contre : il va falloir faire avec.
Les quelques exemples d’applications de nouvelles données aujourd’hui étaient : la différenciation possible entre polype bénin ou malin à partir d’une image de coloscopie, avec 98 % d’exactitude (F. Overkamp) la génération automatisée d’images IRM avec gadolinium, sans injection préalable de gadolinium (A. Radbruch, neuroradiologue) ou enfin la distinction histologique entre mélanome ou naevus, où l’intelligence artificielle surpass les anatomopathologistes (T. Brinker et al., JAAD 2021), ainsi que la capacité à prédire le statut BRAF ou NRAS des mélanomes à partir de leur image anatomo-pathologiques (Kim et al., preprint). la classification des tumeurs de mélanome en fonction de leur densité d’infiltrat en lymphocytes T CD8+ (tumeur chaude vs froide, V. Kölzer)
Et voilà, c’est tout pour aujourd’hui ! J’espère que ces sujets vous auront plu autant qu’à moi, j’ai trouvé cette première journée riche en informations autant sociétales que biologiques, et laisse maintenant le champ libre à mes co-reporters Oriol YELAMOS PENA et Claudio CONFORTI.
Prenez soin de vous !
Compte rendu rédié par Dr Claudio CONFORTI, Dermatologue, Italie
La dermoscopie peut-elle sauver des vies ?
D’après la communication orale de Harald Kittler (Vienne, Autriche)
La dermoscopie est un outil non-invasif utilisé dans la détection précoce du mélanome.
Le diagnostic précoce du mélanome repose sur l’utilisation de la dermoscopie, mais également sur l’étude dermatopathologique adéquate des lésions suspectes et sur le dépistage de masse.
Il est intéressant de se demander si la dermoscopie et le dépistage permettent de sauver des vies.
Diagnostiquer un mélanome à un stade très précoce revient à résoudre le problème quasiment à
100 % dans certains cas, dans d’autres, cela suppose de procéder à un suivi rigoureux. En revanche, un diagnostic tardif nécessiterait des traitements et des thérapies plus invasifs pour le patient.
Cependant, seules de futures études permettront de savoir quel est le risque de métastases entre les mélanomes excisés précocement et tardivement, bien que le taux de métastases soit plus élevé dans les stades diagnostiqués tardivement.
D’après la communication orale de Iris Zalaudek (Trieste, Italie)
Il existe plusieurs approches pour diagnostiquer le mélanome de manière précoce : l’approche analytique, qui consiste à observer la lésion afin de déterminer si elle est atypique et l’approche comparative, qui consiste à comparer les lésions entre elles pour déterminer laquelle est différente des autres. L’approche comparative peut être illustrée par la règle dite du « vilain petit canard » : la lésion qui se démarque des autres sur le plan dermatoscopique doit être excisée. Dans d’autres cas, la dermoscopie est moins importante que l’évaluation clinique. Il existe en effet des cas où l’examen dermoscopique n’est pas dirimant, mais la lésion est unique, c’est-à-dire présente chez un patient sans grains de beauté, mais ayant récemment remarqué un grain de beauté en expansion. Dans ce cas, il convient de l’enlever pour suspicion de mélanome.
Autre règle importante : les grains de beauté plats (ou jonctionnels) sur le visage chez les personnes âgées n’existent pas. Toute lésion pigmentée plate sur le visage d’une personne âgée doit donc être analysée pour une forte suspicion de lentigo melanoma maligna.
En ce qui concerne le mélanome des ongles, les critères atypiques sont la présence d’une couleur grise et noire, la granularité et une bande englobant les 2/3 de la plaque unguéale.
En outre, pour améliorer les chances de diagnostic du mélanome, il est toujours important de combiner les données cliniques et dermatoscopiques.
D’après la communication orale de Zoe Apalla (Thessalonique, Grèce)
La dermoscopie peut être utile pour déterminer où effectuer une biopsie cutanée dans certaines conditions, par exemple dans le cas d’un mélanome malin ou de lésions appelées « lésions de collision ». De plus, la dermoscopie permet d’évaluer l’étendue de la tumeur voire de procéder au suivi postchirurgical.
En effet, l’utilisation de la dermoscopie permet de distinguer un nævus récurrent d’une récidive de mélanome. Dans le cas du carcinome basocellulaire, la dermoscopie permet de distinguer les formes superficielles des formes profondes ; point important pour déterminer s’il faut utiliser des thérapies topiques (cryothérapie, imiquimod) ou recourir immédiatement à la chirurgie. Par ailleurs, si le carcinome basocellulaire est pigmenté, il ne répond pas à la thérapie photodynamique. La règle veut que si l’on observe des nids ovoïdes bleus, il sera nécessaire de l’enlever par chirurgie.
L’utilisation de l’examen dermatoscopique est également utile pour évaluer la réponse aux thérapies topiques du carcinome basocellulaire et son risque de récidive.
La dernière application concerne le carcinome épidermoïde : la présence de cercles blancs et de kératine indique des formes bien différenciées tandis que les formes peu différenciées présentent des zones ulcérées de couleur rouge très intense, mais sans caractéristiques pathognomoniques.
D’après la communication orale de Josep Malvehy (Barcelone, Espagne)
Le terme e-santé fait référence à la pratique de la médecine assistée par des dispositifs mobiles.
Dans le domaine des cancers de la peau, ils peuvent être utilisés à différentes fins, notamment pour partager avec d’autres collègues (oncologues, chirurgiens) les clichés des tumeurs diagnostiquées ou pour effectuer un tri des lésions nécessitant une évaluation par un spécialiste. En outre, il existe de nombreuses applications destinées à l’évaluation des grains de beauté. On télécharge sur une plateforme la photo clinique et la localisation du grain de beauté et un algorithme détermine et exprime le risque de cette lésion. Bien sûr, la précision et la sensibilité ne sont pas encore très avancées. En revanche, il peut être utile de procéder à des téléconsultations pour le suivi de certaines lésions ou pour certaines thérapies, afin de désengorger les hôpitaux et les cliniques. De fait, la télédermatologie a connu son essor durant le confinement lié à la pandémie de Covid.
En conclusion, grâce aux progrès technologiques, de nouvelles versions et mises à jour d’applications vont inévitablement jouer un rôle dans le traitement des cancers de la peau dans un avenir proche. Leur innocuité et leur efficacité devront toutefois être démontrées avant de les intégrer dans la pratique courante. Il est donc urgent de mettre en place une réglementation intégrant la recherche scientifique et la validation en situation réelle afin de fournir aux consommateurs des informations fiables.
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Paolo Ascierto (Naples, Italie)
Le carcinome épidermoïde cutané n’est pas rare. Il représente 20 % des cancers de la peau non mélanocytaires, mais un CEC avancé n’est pas fréquent → il s’agit de la manifestation peu commune d’une maladie courante.
Le CEC avancé comprend le CEC métastatique et le CEC irrésécable et leur traitement a récemment évolué.
Par le passé, on utilisait uniquement la radiothérapie et la chimiothérapie, qui ne permettaient pas une amélioration clinique notable. Par la suite, pour un groupe de patients sélectionnés, on a eu recours aux inhibiteurs de l’EGFR, avec des taux de réponse (TR) d’environ 25 à 35 %. La véritable révolution a eu lieu lors de l’introduction des anti-PD1 dans le traitement du CEC.
Pourquoi utiliser les anti-PD1 dans le traitement du CEC ? Parce que le CEC présente une charge mutationnelle élevée, due à une forte exposition aux UV qui induit de multiples mutations. De fait, le CEC cutané présente une charge mutationnelle plus élevée que le mélanome ou le cancer du poumon, ce qui signifie que le CEC peut répondre à l’immunothérapie.
En outre, on a observé que la réponse aux anti-PD1 est plus élevée dans les CEC avancés que dans les CEC localisés, probablement parce qu’ils ont une charge mutationnelle plus élevée.
Il existe actuellement un traitement d’immunothérapie approuvé pour le CEC : le cemiplimab. Le TR objective avec le cemiplimab dans le traitement du CEC avancé est de 46 % (réponse complète 16,1 %, réponse partielle 30,1 %), avec un taux de contrôle de la maladie de 72,5 %. La toxicité est similaire à celle des autres immunothérapies.
Cependant, d’autres anti-PD1 ont également été étudiés pour le traitement du CEC :
Le pembrolizumab a également été testé dans le traitement du CEC métastatique → TR autour de 25 % Le nivolumab a également été expérimenté dans le traitement du CEC avancé (travaux préliminaires) → réponse partielle de 50 %
Quelles sont les perspectives d’avenir ? Quelques essais d’immunothérapie ont été menés dans le cadre d’un traitement adjuvant ou néoadjuvant du CEC avancé.
En résumé, les anti-PD1 constituent actuellement l’option de première ligne dans le traitement du CEC avancé selon la plupart des directives relatives au CEC (NCCN, EADO).
D’après la communication orale de Dirk Schadendorf (Essen, Allemagne)
Nous disposons de plusieurs médicaments d’immunothérapie qui régulent les PD1/PD-L1 et les CTLA4. Cependant, il existe plusieurs autres pistes immunologiques à suivre.
L’une d’entre elles est liée aux caractéristiques métaboliques des tumeurs → blocage de l’IDO → Keynote-252 : pembro + placebo vs placebo + IDO (épacadostat) → cette étude ne s’est pas avérée concluante et n’a montré aucune amélioration clinique (in vitro, elle a montré une amélioration, mais pas dans le contexte clinique).
Autres molécules :
L’inhibiteur d’HDAC (entinostat) peut être efficace lorsqu’il est associé à une immunothérapie ;
L’anti-LAG3 (relatilimab) : La LAG3 est également exprimée dans la synapse immunitaire. La bloquer équivaut donc à bloquer la PD1 → l’idée est de l’utiliser chez les patients réfractaires aux anti-PD1 à TR de 18 % chez les patients réfractaires.
Il existe de nombreux autres essais où les anti-LAG3 sont utilisés en première ligne, ainsi que d’autres molécules que le relatlitinib, car la LAG3 semble être la nouvelle tendance (la nouvelle PD1).
De nombreuses autres molécules sont à l’étude chez les patients réfractaires à la PD1, notamment les cytokines, les interleukines, les inhibiteurs de tyrosine kinase (ITK), les agonistes des récepteurs de type Toll...
Le lenvatinib : ITK utilisé chez les patients réfractaires à la PD1 avec une SG médiane de 13,9.
Utilisé en première ligne dans certaines études, toujours en attente de résultats.
L’anti-CD122 utilise une IL2 pégylée : la bempegaldesleukine → données préliminaires encourageantes en première ligne associée à une immunothérapie mais une étude multicentrique en cours avec les anti-PD1 fournira des données cliniques réelles.
L’agoniste des TLR (Tilsotolimod), utilisé lors d’un essai en association à l’ipilimumab, n’a pas montré de résultats concluants (aucune différence)
Les virus oncolytiques :
Le T-VEC : le 3 février 2021, un communiqué de presse révélait que l’étude n’avait pas atteint le critère d’évaluation principal. Le T-VEC n’aura donc probablement pas d’avenir car il existe d’autres immunothérapies plus efficaces.
On constate ainsi que de nombreux médicaments qui ont fonctionné in vitro n’ont montré aucun avantage sur le plan clinique. Tout l’enjeu est de savoir quand sélectionner une molécule ayant fonctionné au stade préclinique mais ayant échoué lors des études cliniques.
D’après la communication orale de Grant McArthur (Melbourne, Australie)
Qu’est-ce qui est médicamentable dans le mélanome ?
1) Les molécules de surface cellulaire
2) Les enzymes
3) La protéine de liaison au ligand des petites molécules
4) Autres éléments non médicamentables a priori :
Les interactions protéine-protéine
Nouvelles technologies : ARN
PROTAC
1) Les molécules de surface → ce sont les molécules typiquement ciblées en immunothérapie telles que PD1, CTLA4, LAG3...
2) Les enzymes
Les protéines kinases :
Ciblage des RAF de type sauvage / des dimères de RAF : nouveaux inhibiteurs de RAF comprenant le lifirafenib et le belvarafenib → ils peuvent être indiqués dans les mélanomes à mutation NRAS, les mélanomes réfractaires aux BRAFi de première génération, les mélanomes à mutation non V600.
Les inhibiteurs de CDK4/6 : les produits approuvés sont le palbociclib, le ribocclib, l’abemaciclib → ils augmentent la mémoire immunitaire et diminuent l’immunosuppression.
Les modificateurs épigénétiques :
Ils constituent une bonne approche pour transformer les tumeurs froides en tumeurs chaudes.
L’inhibiteur de EZH2 (tazemetostat) → augmente l’afflux de cellules immunitaires dans la tumeur.
L’inhibiteur d’HDAC (entinostat) → entraîne une régulation à la baisse des cellules immunosuppressives dans le microenvironnement tumoral. → Synergie avec les anti-PD1 : l’entinostat est très efficace lorsqu’il est associé à une immunothérapie.
Les enzymes métaboliques :
Phosphorylation oxydative/complexe mitochondrial 1 : quelques essais sur des métastases cérébrales à l’aide de molécules expérimentales, mais pas encore en milieu clinique.
L’inhibiteur d’IDO (épacadostat) → résultats décevants d’un essai clinique montrant que l’utilisation d’épacadostat n’offre aucun avantage supplémentaire.
3) La protéine de liaison au ligand des petites molécules
Antagoniste de RXR : un essai a montré un bénéfice lorsqu’il est ajouté à l’inhibiteur de BRAF/MEK.
4) Éléments non médicamentables a priori
Les interactions protéine-protéine : Membres de la famille BCL2 → venetoclax : encore en phase de validation du concept.
Le ciblage de l’ARN : ciblage de l’épissage de l’ARN dans l’amyotrophie spinale → comme preuve de concept, il pourrait être utilisé dans le traitement du mélanome dans la mesure où l’on peut cibler l’ARN.
PROTAC : quelques tentatives en vue de traiter la chimère de ciblage de la protéolyse (PROTAC)
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Boris Bastian (San Francisco, États-Unis)
Les mélanomes acraux apparaissent sur une peau glabre qui présente certaines différences biologiques. En outre, les mélanomes acraux ne semblent pas influencés par l’exposition au soleil ou l’origine ethnique (distribution similaire dans le monde entier).
La charge mutationnelle des mélanomes cutanés est très élevée, alors que celle des mélanomes acraux est beaucoup plus faible. De fait, les mélanomes acraux, ainsi que les mélanomes muqueux, présentent des amplifications chromosomiques plutôt que des mutations génétiques.
De plus, on retrouve ces amplifications dans les mélanocytes entourant un mélanome acral. Ces mélanocytes sont appelés cellules de champ. Cela pourrait suggérer que ces cellules de champ sont effectivement à l’origine des mélanomes acraux. Ce phénomène peut également être observé sur le plan clinique, puisque de nombreux mélanomes acraux présentent de multiples macules. Cependant, si l’on effectue des tests moléculaires entre les macules sur une peau apparemment saine, on peut trouver des cellules de champ présentant les mêmes aberrations génomiques que le mélanome primaire.
Les réarrangements génomiques dans les mélanomes acraux ont des caractéristiques uniques : ils présentent des typhonas (de nombreuses mutations dans les zones d’amplifications chromosomiques), et on retrouve ces typhonas dans d’autres tumeurs comme les sarcomes.
Les mélanomes acraux peuvent être causés par des défauts de réparation génomique pouvant affecter la réparation des télomères, entre autres gènes de réparation de l’ADN. De fait, dans les syndromes présentant des défauts au niveau des gènes de réparation de l’ADN, comme le syndrome de Werner, on observe une augmentation des mélanomes acraux.
De même, certains mélanomes situés dans la région acrale ne comportent pas de typhonas et peuvent présenter des fusions de kinases (NTRK), ou des mutations de KIT, NF1 ou SPRED1 (mutations de SPRED1 dans le syndrome de Legius) → il ne s’agit pas de véritables mélanomes acraux, mais peut-être de mélanomes cutanés low-CSD (à faible dommage chronique du au soleil) situés dans la région acrale. Par conséquent, il existe un sous-groupe de mélanomes acraux qui sont effectivement provoqués par l’exposition aux UV.
Le mélanome acral présente donc une très forte hétérogénéité génétique, ce qui peut compliquer sa prise en charge thérapeutique.
D’après la communication orale de Reinhard Dummer (Zurich, Suisse)
Le TuPro (tumor profiler) est un ensemble de technologies développées au sein de l’hôpital universitaire de Zurich afin de fournir une analyse multidimensionnelle de la tumeur d’un patient. De nombreuses techniques diagnostiques et thérapeutiques sont utilisées pour obtenir des informations pertinentes pour la prise en charge du patient. Quelles sont ces technologies ? Pathologie standard, pathologie numérique, NGS, CyTOF, analyse des cellules tumorales vivantes, scDNA, scRNA, prétotypage, etc. Un tumor board multidisciplinaire analyse ensuite l’échantillon, puis les résultats sont présentés au tumor board conventionnel et des décisions thérapeutiques sont prises. Pour que ce processus soit pertinent, il doit être rapide et réalisé en moins de 4 semaines.
Quelques unes des technologies utilisées dans le projet TuPro :
La pathologie numérique : l’intérêt d’utiliser l’intelligence artificielle en pathologie est d’être objectif et d’identifier des marqueurs.
L’imagerie par cytométrie de masse : peut être utilisée dans les lames de pathologie. Elle peut permettre de prédire les cibles médicamenteuses.
Intégration de la transcriptomique et de la génomique des cellules uniques : il s’agit de cellules uniques et de multiples études peuvent être réalisées → profilage des aberrations génétiques, analyse des cibles médicamenteuses, découverte de biomarqueurs, etc.
Plateforme Deep Drug : permet de documenter l’activité des différentes pistes pour différentes populations de cellules.
Exemple d’utilisation du TuPro : chez un patient atteint de métastases cérébrales, on a analysé le tissu d’une de ces métastases et constaté une charge mutationnelle élevée (sans doute un bon candidat à l’immunothérapie). La tumeur présentait une mutation BRAFV600E, des amplifications EGFR. Différentes thérapies ciblées ont été essayées avant de tester le cabozantinib (inhibition de MET et VEGFR2) → on a utilisé ce médicament et prolongé la survie du patient.
D’après la communication orale de Anja Bosserhoff (Erlangen, Allemagne)
On retrouve la mutation BRAF dans 90 % des nævi → elle active la prolifération mais la prolifération s’arrête : c’est la sénescence. Par conséquent, les nævi apparaissent parce qu’ils entrent en sénescence. En revanche, si ces mélanocytes n’entrent pas en sénescence, ils continuent à proliférer pour former un mélanome.
Qu’est-ce qui perturbe la sénescence ?
MIA : il régule positivement les métastases → potentiellement médicamentable. Le MIA peut nécessiter des mutations supplémentaires afin de devenir oncogène.
Le rôle de la HuR : La HuR est régulée à la hausse en cas de mélanome. Lorsque l’on régule la HuR à la baisse, cela réduit la prolifération du mélanome et augmente considérablement la sénescence → la HuR peut également constituer une cible thérapeutique.
Influence de l’acidose dans le microenvironnement tumoral : si l’on applique un pH acide sur la tumeur, la prolifération ne s’arrête pas mais elle est réduite → l’acidose induit donc la sénescence.
Futurs axes de recherche :
Les modèles en 3D : de nombreuses études utilisent des colonies de cellules en 2D qui ne représentent pas fidèlement la structure tumorale en 3D → Schmidt et al ont développé des modèles imprimés en 3D → biofabrication en 3D
Les marqueurs sériques peuvent-ils orienter les choix thérapeutiques ?
D’après la communication orale de Bastian Schilling (Wuerzburg, Allemagne)
Les indications fournies par ces marqueurs doivent être fiables, donner des résultats concluants et non négatifs, et être reproductibles.
Mélanome :
Les patients présentant une mutation BRAF peuvent recevoir des thérapies ciblées (TC) avec des inhibiteurs de BRAF/MEK mais aussi des inhibiteurs de points de contrôle immunitaire (IPCI) : par quoi faut-il commencer ? On a pensé que la LDH serait un bon marqueur : un taux élevé de LDH orienterait vers une TC, mais des études menées sur les IPCI ont montré que ces derniers fonctionnent également très bien chez les patients présentant une LDH élevée. Par conséquent, ces nombreuses études ont démontré qu’il valait peut-être mieux commencer directement par les IPCI, même en cas de mutations BRAF. La LDH ne semble donc pas être un bon marqueur dans ce scénario.
Chez les patients présentant un mélanome à mutation BRAF + des métastases cérébrales, il peut être préférable de recourir à la TC car on a besoin d’obtenir une réponse rapide et les IPCI peuvent également provoquer d’importants effets secondaires. Parfois, il vaut tout simplement mieux ne rien faire, car les médicaments comportent des effets secondaires et le patient a déjà un très mauvais pronostic. Il est donc préférable de prodiguer des soins de soutien aux patients présentant des métastases cérébrales et un taux élevé de LDH (très mauvais pronostic). Dans ce cas, la LDH nous indique qu’il ne faut pas nuire.
Conclusion : les marqueurs sériques peuvent-ils orienter les choix thérapeutiques en cas de mélanome ? Non, car ils ont une valeur pronostique et/ou il n’y a pas de choix possible. Mais les marqueurs sériques tels que la LDH peuvent indiquer les meilleurs soins de soutien à prodiguer lors de l’évaluation de patients au pronostic défavorable → les traitements peuvent parfois être nocifs et si le patient a un très mauvais pronostic, il est préférable d’améliorer sa qualité de vie.
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Jeffrey Weber (New York, États-Unis)
Les thérapies adjuvantes ont débuté avec l’ipilimumab à fortes doses (10 mg/kg pendant 3 ans en 2015) qui a apporté un net bénéfice dans un contexte adjuvant avec 65 % de survie globale à 5 ans (chez des patients de type IIIB et IIIC). Cependant, 21 % des patients présentaient des toxicités significatives. Ces résultats ont abouti à la validation de l’ipilimumab en adjuvant aux États-Unis, mais pas en Europe ni en Australie.
Des études ultérieures ont montré que les résultats sont similaires avec 3 mg vs 10 mg/kg d’ipilimumab. Donc si l’ipilimumab doit être utilisé dans le cadre d’un traitement adjuvant, il convient de l’administrer à des doses plus faibles, bien qu’il puisse ne pas être validé à cette posologie dans certains pays.
Lors d’autres études, l’ipilimumab a été utilisé conjointement avec le nivolumab, mais pendant 1 an seulement, car les patients pourraient ne pas tolérer un traitement adjuvant de 3 ans. Checkmate- 915 : Étude ipi + nivo vs nivo → étude négative pour la RFS mais les données finales doivent être encore présentées. Jusqu’à présent la combinaison ipi + nivo n’est pas supérieure au nivo seul.
Une étude embrolizumab vs placebo d’une durée d’1 an donne 59 % de survie sans rechute à 42 mois (moins de données à long terme).
D’après la communication orale de Georgina Long (Sydney, Australie)
Environ 50 % (46 %) des mélanomes présentent des mutations de BRAF, et la majorité est de type V600E (73 %) ou V600K (19 %), pouvant donc être ciblées.
Le traitement adjuvant est administré pendant 12 mois et la seule TC approuvée est le dabrametinib 150 mg BID + Trametinib 2 mg QD → étude COMBI-AD : Un traitement de 12 mois entraîne une réduction de 50 % du risque de récidive par rapport au placebo.
Mais la question est de savoir s’il faut administrer un traitement adjuvant ou bien attendre que le patient rechute pour le traiter. Nous n’avons toujours pas la réponse.
Les biomarqueurs : La combinaison dabra+trame fonctionne bien chez la plupart des patients, même s’ils ont une faible charge tumorale. Ceux qui ne répondent pas à la combinaison dabra+trame sont ceux qui ont une charge tumorale élevée et un faible IFN.
Comment comparer les différents protocoles adjuvants (ipi, nivo, pembro, dabra+trame) ? Nous ne le savons pas encore, car les résultats sont similaires, ce qui signifie qu’ils sont concluants quel que soit le protocole utilisé.
A l’avenir, nous pourrons sans doute utiliser les TC dans le cadre d’un traitement néoadjuvant, car elles induisent une fibrose hyalinisée → les fibroses hyalinisées sont corrélées à une moindre rechute → bonne survie globale et bonne réponse pathologique.
Qui a besoin d’un traitement adjuvant si le mélanome peut être guéri à l’aide de traitements néo-adjuvants ou palliatifs ?
D’après la communication orale de Christian Blank (Amsterdam, Pays-Bas)
Le traitement néo-adjuvant est sans doute plus efficace que le traitement adjuvant, car la réponse immunitaire sera plus forte si l’on n’enlève pas la tumeur → plus de lymphocytes T résidents → plus de réponse à l’immunothérapie → meilleure survie potentielle.
En outre, les patients répondant au traitement bénéficient d’une chirurgie moins agressive, ce qui améliore leur qualité de vie. Le traitement néoadjuvant pourrait ne pas être efficace si le taux d’IFN est faible et si la charge tumorale est faible.
Immunothérapie néoadjuvante personnalisée : on procède à de multiples analyses pour identifier les meilleurs patients répondeurs.
À l’avenir, la thérapie néoadjuvante remplacera probablement le traitement adjuvant, car il sera possible de faire des choix thérapeutiques personnalisés.
De nombreux essais sont actuellement menés et les résultats seront disponibles au cours des 2 prochaines années.
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Richard Marais (Manchester, Royaume-Uni)
Qu’est-ce qui provoque un mélanome ? Selon la classification traditionnelle des mélanomes en fonction des UV, on peut diviser les mélanomes en deux catégories : ceux qui sont provoqués par l’exposition aux UV et ceux qui ne le sont pas (zones protégées telles que les muqueuses) :
Le mélanome cutané sur une surface pileuse est provoqué par l’exposition aux UV.
Mélanome acral : 50 % sont provoqués par l’exposition aux UV et 50 % ne le sont pas.
Mélanomes non provoqués par l’exposition aux UV : Mélanome muqueux, mélanome uvéal, mélanome conjonctival.
Mais en réalité la situation est plus complexe. Les différents types de mélanomes présentent des mutations génétiques différentes (leur contexte) :
Mélanome cutané : principalement BRAF ;
Mélanome muqueux : principalement NRAS (modifications majeures du génome) ;
Mélanome uvéal : principalement GNAQ et GNA11 ;
Mélanome acral et mélanome conjonctival : nous ne connaissons pas encore bien leur contexte et nous sommes en train d’en tirer des enseignements.
Nous savons toutefois que le contexte n’est pas le seul facteur important, mais également l’environnement, notamment le rayonnement UV. Ainsi, la mutation BRAF et les rayons UV peuvent interagir pour créer un mélanome provoqué par l’exposition aux UV (Viros et al. Nature 2014). Et, de fait, 85 % des mélanomes sont provoqués par l’exposition au rayonnement UV.
En revanche, les muqueuses ne sont en général pas exposées au soleil, mais nous verrons que certaines muqueuses peuvent l’être. Que se passe-t-il au niveau de l’oeil ? Comme la conjonctive, qui est une muqueuse, est en contact direct avec les UV, l’hypothèse est qu’il pourrait y avoir des points communs avec les mélanomes cutanés (qui sont provoqués par l’exposition aux UV) : les mélanomes de la conjonctive partagent la même signature que les mélanomes cutanés (signature 7), qui est liée au rayonnement UVB, mais ils présentent aussi certains aspects liés aux mélanomes muqueux (puisque la conjonctive est une muqueuse). un phénomène similaire se produit avec l’uvée. Si l’on observe les mélanomes uvéaux situés sur l’iris, qui est exposé au soleil, ils présentent également la signature 7, causée par les UV.
Le facteur pertinent, c’est le microenvironnement des mélanocytes (mécanisme sous-jacent, contexte) + l’action des UV qui accélère la mélanomagenèse :
Mélanome cutané : mécanisme sous-jacent à BRAF
Mélanome conjonctival : mécanisme sous-jacent à aberrations chromosomiques
Mélanome de l’iris : mécanisme sous-jacent à GNAQ/GNA11
Par conséquent, les mélanomes de la conjonctive et de l’iris sont en réalité provoqués par l’exposition aux UV, ce qui illustre bien la nécessité de protéger ses yeux des rayonnements UV !
D’après la communication orale de Georgina Long (Sydney, Australie)
Aujourd’hui, nous disposons de thérapies qui augmentent le taux de survie mais il y a encore beaucoup à faire pour guérir le mélanome.
Au début, les patients sous BRAFi/MEKi s’en sortent très bien, mais par la suite, la combinaison ipi+nivo est plus efficace (mais avec une toxicité plus importante).
Il semble que les patients qui s’en sortent le mieux sont ceux qui présentent :
une réponse complète ;
une affection peu étendue ;
une LDH de base normale ;
un faible nombre de sites métastatiques.
Tous ces aspects peuvent être utiles pour déterminer le risque d’un patient donné. Un simulateur de risque sera bientôt disponible sur le site www.melanomarisk.org.au.
Qu’avons-nous appris au cours de la dernière décennie ? Nous avons essayé de développer des biomarqueurs, mais nombre d’entre eux sont mal corrélés. Jusqu’à présent, seuls la charge tumorale mutationnelle (TMB) et l’IFN gamma semblent être en corrélation avec la réponse au traitement. Au cours de la dernière décennie, les chercheurs ont également étudié le concept consistant à rendre plus immunogènes les tumeurs ne répondant pas à l’immunothérapie. En d’autres termes, rendre chaudes des tumeurs froides. Mais cette approche a-t-elle fonctionné ? Jusqu’à présent, la réponse est non : Les tentatives telles que le blocage de l’IDO, visant à rendre une tumeur chaude, ont échoué : L’épacadostat n’a pas permis de rendre la tumeur chaude.
Cela s’est également produit avec les essais T-VEC qui ont donné des résultats négatifs.
Les BRAFi semblent également réchauffer les tumeurs, aussi la nouvelle approche consiste-t-elle à utiliser une trithérapie (BRAFi + MEKi + anti-PD1) dans les essais cliniques, on observe une tendance à l’amélioration, mais de nombreuses études utilisant des trithérapies ont donné des résultats négatifs, de sorte qu’il faudra sans doute attendre d’autres données. Quand les trithérapies pourraient-elles alors être utiles ? Dans les cas de mutations BRAF progressant vers l’immunothérapie.
Les approches thérapeutiques actuelles sont les suivantes :
Inhibiteurs de la LAG3 (relatlimab) → essai positif pour la SSP.
Inhibiteur multikinase (lenvatinib) → résultats peu probants.
Actuellement, le traitement le plus efficace reste la combinaison ipi + nivo. Cependant, ipi + nivo n’est pas plus efficace que le nivo seul dans le cadre d’un traitement adjuvant.
Le problème de l’immunothérapie c’est que nous ne savons pas quels patients vont y répondre → la recherche translationnelle est cruciale pour identifier les patients répondeurs : de nombreuses études sont en cours mais ces biomarqueurs doivent encore être validés. le microbiome peut également avoir une influence.
Thérapie néoadjuvante → l’un des axes de recherche actuels les plus intéressants. Le principal avantage du traitement néoadjuvant est qu’il nécessite 6 semaines d’administration avant la résection du mélanome. Par conséquent, la recherche peut aller beaucoup plus vite (6 semaines). C’est la raison pour laquelle de nombreux traitements sont étudiés en tant qu’agents néoadjuvants.
L’administration du médicament se faisant sur 6 semaines, les études peuvent donc être menées beaucoup plus rapidement. En outre, il est possible de savoir si le traitement fonctionne en analysant le spécimen excisé et en analysant la réponse pathologique.
Mais le traitement néoadjuvant est-il plus efficace que le traitement adjuvant ? Nous ne le savons pas encore, mais certains essais en cours (par exemple l’essai NADINA) permettront de répondre à cette question.
Bilan des traitements actuels :
Avec les IPC, la survie globale à 5 ans est de 50 %.
Il faut se méfier des études translationnelles pour identifier les patients répondeurs.
L’avenir est probablement à la thérapie néoadjuvante.
D’après la communication orale de Olivier Michielin (Lausanne, Suisse)
Le SARS-CoV2 interagit avec l’enzyme ACE2 par l’intermédiaire de la protéine S. La première préoccupation en oncologie est de savoir si l’ACE2 est impliquée dans le cancer. En réalité, pas vraiment, mais nous savons que le tabac interagit avec l’ACE2.
De plus, certains patients réagissent très bien au SARS-Cov2 et d’autres non. Mais le problème en oncologie c’est que les patients sont immunodéprimés. Alors la COVID est-elle plus dangereuse chez les patients oncologiques ? Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire aggravent-ils la COVID ?
En réalité, les patients cancéreux sont fortement impactés par la COVID-19 → immunodépression, moins d’admission en USI en raison de la présence de patients COVID, moins de disponibilité chirurgicale...
Le Consortium CCC-19 a établi que les patients atteints de cancer connaissaient un pronostic défavorable en raison de la COVID : âge > 40 ans, hommes, comorbidités ECOG, hémopathies malignes, cancer en progression.
Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire donnent des résultats contradictoires puisque certaines études démontrent un effet néfaste en cas de COVID, ce que d’autres études ne peuvent pas confirmer. Cette situation peut être due au fait qu’il existe différents sous-groupes de patients atteints de COVID, certains présentant des niveaux plus élevés de cytokines que d’autres → globalement, les IPC n’ont pas un impact massif sur le pronostic des patients atteints de COVID.
Peut-être faudrait-il y réfléchir à deux fois si l’on devait utiliser ipi + nivo, car on pourrait alors avoir besoin de stéroïdes, qui ont un impact plus important en cas de COVID.
Qu’en est-il de la vaccination ? Tous les patients atteints de cancer devraient se voir proposer la vaccination, mais la question est de savoir si ces patients seront en mesure de produire une réponse immunitaire efficace contre le SRAS-CoV2. Toutefois, les preuves apportées par les vaccins contre la grippe montrent que les patients atteints de cancer peuvent produire une bonne réponse immunitaire.
En résumé, nous devons veiller à ne pas sous-traiter les patients atteints de cancer du fait de la pandémie, car ces patients ne mourront pas davantage du COVID que de leurs cancers.
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Céleste Lebbé (Paris, France)
L’une des plus grandes inquiétudes lorsque l’on utilise l’immunothérapie chez des patients greffés atteints de cancer est que l’immunothérapie puisse provoquer le rejet de l’organe transplanté. Cependant, dans le cas des cancers de la peau non mélanocytaires avancés, si l’on ne fait rien, le patient peut également mourir de son cancer. Par conséquent, l’utilisation d’anti-PD1 chez les patients greffés peut aussi permettre une survie plus longue :
● Par exemple, les taux de réponse sont d’environ 60 % pour le CEC.
Que se passe-t-il en cas de rejet de l’organe lors de l’utilisation d’IPC ? Cela dépend de nombreux facteurs, notamment de l’influence sur l’organe transplanté, du médicament immunosuppresseur utilisé, des facteurs de risque, etc.
Organes :
● Rein : 54,5 % de rejet en cas de recours aux IPC, moins si l’on utilise les inhibiteurs de mTOR comme immunosuppresseurs.
Autres facteurs :
Moins de rejet si la greffe date de plus de 8 ans, ou si au moins un médicament autre que les corticostéroïdes est utilisé.
● Risque de rejet plus important en cas d’antécédents de rejet.
De plus, lorsqu’il y a rejet du greffon :
● il a tendance à se produire peu après le début de l’administration des IPC (22 jours en moyenne), voire plus tôt en cas de transplantation hépatique.
● fréquence élevée de rejet vasculaire à le rejet vasculaire peut résulter de mécanismes médiés par les cellules T et les anticorps.
○ rejet aigu pur des cellules T dans la plupart des cas : 61 %
○ mixte médié par les cellules T et les anticorps dans 38 % des cas.
● mortalité associée au rejet du greffon.
○ survie plus faible chez les receveurs de foie et de coeur.
○ meilleure survie chez les receveurs de rein.
○ Cependant, la mortalité due au cancer est plus élevée que la mortalité due au rejet de la greffe (51 % contre 10 %).
◌◌ Par conséquent, si le cancer est mortel, il faut recourir aux IPC plus tôt pour réduire la mortalité due au cancer, indépendamment de la possibilité de rejet de la greffe.
La toxicité associée aux IPC est similaire à celle des patients non transplantés.
L’un des schémas suggérés (schéma de Dana Farber) consiste à passer des inhibiteurs de la calcineurine aux corticostéroïdes associés à mTOR (nécessite des études prospectives).
Il est également possible d’identifier des biomarqueurs du rejet aigu du greffon : CXCL9, CXCL10…
D’après la communication orale de Brigitte Dréno (Nantes, France)
Les patients greffés présentent un risque accru de mélanome (multiplié par 2,4) et de mélanomes généralement épais. → La mortalité liée au mélanome est plus également plus élevée. Le risque de CEC est aussi plus élevé, de 60 à 250 fois.
La chirurgie reste la meilleure option pour les patients transplantés qui développent des métastases isolées lorsque l’excision complète avec marges est possible. Cependant, la discussion porte sur l’opportunité d’utiliser l’immunothérapie dans le cadre d’un traitement adjuvant en raison du risque de rejet de l’organe. En ce sens, les médicaments intralésionnels peuvent être la solution. Le talimogène laherparepvec (T-VEC), un virus oncolytique, peut potentiellement être efficace et sûr chez les patients transplantés. De même, l’ajout d’imiquimod topique peut être une option.
Qu’en est-il des autres immunothérapies ? L’IFN et l’IL12 ne sont pas recommandés chez les patients greffés. Les IPC augmentent le taux de destruction de la tumeur avec un risque de rejet du greffon, principalement un rejet vasculaire. Le problème avec les IPC, c’est que les patients transplantés ont été exclus des essais cliniques et que nous ne disposons d’aucunes données. Ainsi, la preuve de l’efficacité des IPC chez les patients transplantés provient de revues rétrospectives, de bases de données et de la littérature médicale.
Une cohorte rétrospective (Eur J Cancer nov. 2018), incluant 16 centres avec des patients sous IPC, a révélé que, parmi les 6 patients ayant subi une transplantation d’organe solide, on comptait 2 rejets de greffe et 2 réponses partielles, suggérant ainsi que le rôle des IPC devait être soigneusement examiné.
Une analyse de la littérature (Manohar et al. 2020) a recensé 27 articles concernant 44 patients atteints de cancer (dont 30 mélanomes) + IPC + transplantation d’organe solide, dont 18 ont présenté un rejet aigu du greffon et parmi eux 15 (83 %) ont connu un échec complet et 8 sont décédés, avec un temps médian de rejet de 24 jours.
Une autre cohorte rétrospective (Abdel-Wahab et al., 2019) a montré des résultats similaires chez des patients atteints de mélanome métastatique, mais 36 % ont répondu aux IPC.
On pourrait donc penser que la réduction du protocole d’immunosuppression avant l’utilisation de l’inhibiteur de la PD1 est une bonne chose. Pourtant, une étude publiée en 2019 dans Int. J. Mol. Sci. a montré que la réduction des immunosuppresseurs augmente en réalité le risque d’échec de la greffe dans une cohorte de patients ayant subi une transplantation rénale.
Certaines données semblent montrer qu’une modification du protocole d’immunosuppression peut être un moyen de prévenir le rejet du greffon (les inhibiteurs de mTOR comme le sirolimus et les anti- VEGF sont préférables).
Les biomarqueurs tels que le PD-L1, bien que prometteurs, ne semblent pas être utiles pour prédire la réponse ou le rejet. Cependant, l’une des options serait de contrôler l’expression de PD-L1 dans les greffons (principalement le rein).
Il peut être préférable d’utiliser l’anti-CTLA4 chez les patients transplantés, car le rejet d’organe est plus fréquent avec l’anti-PD1.
Par ailleurs, si le patient présente une mutation BRAF, la thérapie ciblée est le traitement de première ligne dans le mélanome avancé.
D’après la communication orale de Eggert Stockfleth (Bochum, Allemagne)
Le cancer est la première cause de décès chez les patients transplantés d’organes solides (TOS), et le cancer de la peau est le plus fréquent chez les TOS. Il est donc important d’attirer l’attention des patients sur → l’augmentation du nombre de CEC cutanés et de mélanomes, qui sont donc potentiellement plus agressifs.
Étant donné que de nombreux CEC proviennent de kératoses actiniques (KA) causées par les UV, la protection solaire est cruciale chez les patients TOS pour prévenir l’apparition de CEC. Outre les crèmes solaires et la protection physique, la chimioprévention par nicotinamide ou rétinoïdes est une bonne stratégie. En outre, il est important de traiter le champ de cancérisation avec du 5FU, de la thérapie photodynamique ou d’autres produits pour prévenir l’apparition de kératoses actiniques et, pour finir, de CEC.
Le HPV est une autre cause probable de CEC chez les patients TOS. Par conséquent, la vaccination contre le HPV est une bonne stratégie pour prévenir les CEC liés au HPV chez les patients TOS, car ces patients semblent produire une bonne réponse immunitaire au HPV.
Autre moyen de prévenir les tumeurs cutanées chez les patients TOS : remplacer les immunosuppresseurs par des inhibiteurs de mTOR tels que le sirolimus, même s’ils sont administrés conjointement avec la ciclosporine.
Enfin, la prévention de la progression des tumeurs cutanées passe par une détection précoce, idéalement par dermoscopie
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Robert Coffin (Woburn, États-Unis)
Les virus oncolytiques sont potentiellement de bonnes cibles dans le traitement du mélanome, car les cellules tumorales perdent souvent ou ont régulé à la baisse les voies de défense antivirale qui sont actives dans les cellules saines.
En outre, les virus oncolytiques peuvent améliorer l’immunothérapie, car les tumeurs possèdent des mécanismes d’évasion immunitaire.
RP1, RP2 et RP3 sont des herpèsvirus oncolytiques humains, modifiés pour transporter GALV, une protéine fusogène, afin d’améliorer la réponse immunitaire antitumorale :
RP1 : protéine fusogène, GM-CSF → fournit une efficacité systémique puissante sur les grosses tumeurs chez le rat, ayant même un effet abscopal, c’est-à-dire que la réponse se produit non seulement dans les tumeurs injectées, mais aussi dans les tumeurs non injectées, → ce qui n’est pas le cas du T-VEC qui ne produit pas de réponse dans les tumeurs non injectées.
L’association de RP1 et de nivolumab dans les cancers de la peau non mélanocytaires présente un taux de réponse élevé (RC/RP) de 72,8 %, dont un grand nombre de RC (45,5 %).
De plus, RP1 pourrait potentiellement être utilisé chez les patients réfractaires au PD-1 → le concept de rendre chaudes des tumeurs froides → est particulièrement intéressant, car le combo avec les IPC pourrait bénéficier de l’effet abscopal.
RP2 : protéine fusogène, GM-CSF, anti-CTLA-4
RP3 : protéine fusogène, GM-CSF, CD40L, 4-1BBL
D’après la communication orale de Art Krieg (Cambridge, États-Unis)
L’ADN de CpG-A pourrait stimuler la sécrétion d’IFN de type 1 et induire les cellules dendritiques plasmacytoïdes de type P1 (P1-pDC).
CMP-001 : Le CpG-A est un agoniste des récepteurs de type Toll 9 (TLR9) utilisant comme vecteur une particule de type viral (PTV) dérivée d’un bactériophage, des nanoparticules auto-assemblées.
Le CMP-001 présente certaines différences avec les virus oncolytiques (VO).
La réplication des VO est inhibée par un IFN de type 1 élevé.
Les VO sont inhibés par la réponse aux anticorps.
Le CMP-001, également appelé vidutolimob, a été utilisé dans des essais avec ou sans anti-PD1 (essais de phase 1/2) : CMP-001 + pembro chez des patients → réfractaires aux anti-PD1 : taux de réponse global de 26 % (ce qui est très élevé pour un traitement de 2ème ligne !).
Il est intéressant de noter que le CMP-001 a également un effet abscopal (réponse sur des lésions injectées et non injectées).
D’après la communication orale de Patrick Brück (Mainz, Allemagne)
Le BNT-111 est un vaccin contre le cancer avec des antigènes de mélanome partagés qui utilise comme vecteur une nanoparticule lipoplex.
Essai clinique utilisant BNT-111 +/- anti-PD1 (essai de phase 1/2)
Ce traitement entraîne une activation immunitaire qui peut être visualisée par une augmentation de l’activité métabolique dans la rate.
Taux de réponse :
- BNT-111 seul : 23,8 %
- BNT-111 + anti-PD1 : 35,3 %
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
Prévention primaire du mélanome en Australie : une mise à jour
D’après la communication orale de David Whiteman (Brisbane, Australie)
Le mélanome constitue un problème majeur en Australie puisqu’il est à l’origine de 14 260 nouveaux cas par an, ce qui en fait le troisième cancer le plus fréquent.
De très nombreuses stratégies ont été développées en termes de prévention du mélanome (mélanomes primaires). En effet, ces stratégies ont été initiées en 1963 par Neville Davis. De nombreuses campagnes de sensibilisation ont été menées, ainsi que le développement d’applications et l’interdiction des cabines de bronzage en 2015.
Les campagnes de sensibilisation sont celles qui perdurent le plus longtemps : Les campagnes SunSmart → elles sensibilisent sur la façon dont les UV favorisent le mélanome, ainsi que sur la façon d’appliquer la crème solaire (campagne Slip, slop, slap), mais également sur le dépistage précoce.
Des réglementations ont également été adoptées, comme l’interdiction des cabines de bronzage, des directives réglementaires sur les crèmes solaires, les vêtements de protection solaire, etc.
Autre instrument : la législation. Certaines lois imposent notamment l’existence de zones ombragées dans les aires de jeux.
De même, si un individu peut prouver que son cancer de la peau est imputable à sa profession, il peut faire valoir ses droits.
Enfin, il existe certains avantages fiscaux tels que les déductions pour l’achat de crème solaire.
Mais est-ce que tout ceci fonctionne ?
Des enquêtes ont montré qu’après certaines campagnes SunSmart, les gens utilisaient davantage de crème solaire et prenaient moins de coups de soleil. Ainsi, la sensibilisation fonctionne, mais cela a-til un impact sur l’incidence du mélanome ? Si l’on considère les mélanomes classés par âge, les individus nés dans les années 80-90 semblent avoir tendance à développer moins de mélanomes. Il y a donc de l’espoir. Le défi consiste désormais à réitérer une grande campagne SunSmart (ce qui n’est pas arrivé depuis 10 ans), opération très vaste et complexe.
D’après la communication orale de Dagmar Whitaker (Le Cap, Afrique du Sud)
Devons-nous modifier nos recommandations en matière de protection solaire ? Le problème est qu’il y a trop de variables : quelle quantité de crème solaire appliquer, à quelle fréquence, quel facteur de protection, quel FPS, lequel est le meilleur ? Il n’existe aucune directive, donc pas de cohérence. En Afrique du Sud, il est recommandé d’appliquer un FPS 50 et de renouveler l’application toutes les 4 heures en cas d’activités de plein air. Le problème est que nous ne touchons probablement pas la bonne cible en ne nous adressant pas aux personnes d’âge moyen travaillant en extérieur. Par ailleurs, nous allons peut-être trop loin en matière de protection solaire. En nous focalisant uniquement sur les effets délétères du soleil (cancer de la peau, ptérygion), nous avons tendance à oublier les bienfaits de la lumière naturelle : amélioration du cycle circadien, prévention de l’apparition de la dépression, prévention de l’apparition de la myopie, augmentation de la vitamine D, etc. Qui est exposé à une carence en vitamine D ? Compte tenu des niveaux actuels, nous pouvons tous être à risque. Alors, est-ce vraiment pertinent ? Présentons-nous tous des symptômes de carence en vitamine D ? Non. Mais, selon l’expression courante, « un peu de soleil vous ferait du bien ». Tout le problème est de savoir quelle quantité de soleil cela représente. Comment prescrire l’exposition au soleil sans qu’elle soit délétère ? Il faut encourager les activités de plein air, mais pas sous un soleil de plomb.
D’après la communication orale de Hans Peter Soyer (Brisbane, Australie)
On a assisté à une hausse rapide du nombre de diagnostics de mélanome. Ce phénomène est lié à l’augmentation du nombre de mélanomes in situ, ce qui peut s’expliquer entre autres par un seuil plus bas pour l’excision des lésions ainsi que pour le diagnostic (même chez les pathologistes). Ce point est controversé mais il est vrai que, globalement, le nombre de diagnostics de mélanome est en hausse.
À l’avenir, il existera une stratification d’intégration du risque de mélanome, dans laquelle la collecte automatisée de clichés + les informations sur le génotype fourniront un score holistique de risque.
Jusqu’à présent, nous calculons le risque à l’aide des simulateurs de risque de mélanome du Melanoma Institute of Australia.
L’intelligence artificielle (IA) permettra d’identifier les changements sur des clichés photographiques du corps entier et de les intégrer aux données génotypiques. Pour accroître la précision du diagnostic de ces algorithmes d’IA, il faut améliorer les jeux de données qui regorgent d’images de sujets de type caucasien, mais devraient également inclure des clichés d’autres phototypes. De même, de nombreux algorithmes d’IA utilisent des images dermoscopiques, qui ne sont pas les images réelles qu’on obtient facilement. Il peut donc être nécessaire d’utiliser des images conventionnelles à large champ. Certaines tentatives montrent d’ailleurs que la chose est faisable et prometteuse. Les clichés provenant de l’imagerie 3D du corps entier seront utiles à cet égard.
En résumé, les activités de prévention primaire ainsi que les tests génétiques et les technologies d’imagerie assistés par l’IA progressent rapidement et nous rapprocheront finalement d’un monde sans mélanome.
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Giuseppe Argenziano (Naples, Italie)
La morphologie clinique et la morphologie dermoscopique vont de pair. S’il est vrai que 70 % des mélanomes sont diagnostiqués à l’oeil nu, les 30 % restants ne le sont pas. C’est pour ces 30 % que nous avons besoin de la dermoscopie. En pratique, la dermoscopie est utile dans 20 % des cas de mélanomes, et pour les 10 % restants, nous devons employer d’autres stratégies telles que les règles.
Dans ce cas, pourquoi avoir recours à la dermoscopie ? Parce qu’elle a une sensibilité élevée dans le dépistage du mélanome. L’utilité de la dermoscopie s’explique par le fait que les mélanomes ne démarrent pas par de grandes lésions irrégulières et multicolores, mais par des changements subtils qui peuvent bien souvent être identifiés par dermoscopie.
La dermoscopie est également très utile chez les patients présentant des mélanomes multiples et disgracieux, ainsi que des lésions amélanotiques.
Autre raison d’utiliser la dermoscopie : elle a une spécificité élevée et permet d’éviter l’excision de nombreuses lésions bénignes. Avec l’analyse clinique, il faut exciser 30 lésions bénignes pour identifier un mélanome, alors qu’avec la dermoscopie, ce nombre est réduit de moitié.
D’après la communication orale de Jean-Jacques Grob (Marseille, France)
De nombreuses publications se sont attachées à comparer l’intelligence humaine et l’intelligence artificielle. Les performances de l’intelligence humaine (IH) dans la détection des mélanomes sont loin d’être parfaites et homogènes. La capacité à décider si une lésion est un mélanome ou non repose sur de nombreux aspects qui sont influencés par des facteurs psychologiques tels que la confiance en soi, les avocats, etc. Comment l’IH fonctionne-t-elle ? Nous pouvons utiliser certains critères pour identifier les mélanomes (liste de contrôle en 7 points, règle ABCDE, etc.), ainsi que des algorithmes dermoscopiques. Cependant, ces méthodes ont leurs limites : simplification excessive et distorsion du processus. Mais ce n’est pas vraiment comme cela que notre cerveau fonctionne, puisque nous identifions des modèles généraux qui classent les images dans une catégorie déjà stockée dans notre cerveau. Par conséquent, la reconnaissance des formes requiert un certain entraînement pour établir les bases dans notre cerveau. La reconnaissance des formes présente l’avantage d’être très rapide car elle a une signification liée à notre évolution : nous devions identifier les dangers et les identifier rapidement.
L’analyse des formes présente cependant deux inconvénients : elle est inutile si l’on n’y a pas été formé et on ne peut pas former quelqu’un si cette personne ne s’y intéresse pas. Donc, si la personne ne s’intéresse pas à la dermoscopie, cela va poser problème. En outre, pour reconnaître un modèle, il faut simplifier le travail (processus d’économie de mémoire). Se pose alors le problème de la sursimplification. Nous pourrions alors apprendre plus de caractéristiques, mais est-ce bien utile ? Quel type de représentation reconnaissons-nous en présence d’un mélanome vs un nævus sur la dermoscopie ?
On peut nous enseigner des caractéristiques, mais nous ne sommes pas vraiment d’accord sur ce que nous voyons, sauf en ce qui concerne la désorganisation/le chaos. En outre, nous avons tendance à apprendre davantage à partir d’images que par l’enseignement réel d’une caractéristique.
Cet aspect est crucial pour les patients, c’est pourquoi les brochures contenant des images de mélanomes sont préférables à un cours sur l’identification d’une caractéristique. De même, pour les dermatologues, le fait de montrer de nombreuses images ou de voir de nombreux patients augmente la précision du diagnostic grâce à la reconnaissance des formes.
Le cerveau est également capable d’identifier les aberrations, c’est-à-dire le vilain petit canard. Cela se révèle utile dans la détection des mélanomes puisque les patients peuvent présenter 2 à 4 motifs de nævi. Par conséquent, la lésion pigmentée qui ne correspond pas à ces modèles est une aberration et peut être un mélanome : c’est le signe du vilain petit canard. En outre, le signe du vilain petit canard améliore les performances de la dermoscopie.
Il existe un autre processus cognitif permettant à l’IH d’identifier les mélanomes, à savoir la capacité à identifier les changements ou reconnaissance chronologique.
Par ailleurs, comment l’intelligence artificielle (IA) fonctionne-t-elle ?
Nous, humains, pouvons créer un algorithme pour identifier les caractéristiques dermoscopiques, le vilain petit canard, etc. Mais cette méthode a ses limites lorsqu’il s’agit d’identifier des choses que nous n’avons pas enseignées à la machine.
On peut aussi recourir à l’apprentissage automatique, qui permet à l’ordinateur d’apprendre seul à distinguer un chien d’un chat, par exemple. Cette méthode nécessite de grands jeux de données, et il est impossible de savoir comment la machine est parvenue à une conclusion, car elle passe par différentes couches.
Quelles sont les performances des algorithmes d’IA actuels dans la détection des mélanomes ? Leurs performances sont équivalentes ou supérieures à celles des dermatologues. Mais cette évaluation est-elle correcte ? Probablement pas, car les algorithmes actuels ont été conçus dans des conditions artificielles avec des jeux de données photographiques standardisés (la plupart du temps avec des images dermoscopiques qui sont assez précises) et incluent de nombreuses lésions fréquentes. Par conséquent, pour être en mesure d’utiliser ces algorithmes, nous avons besoin de plus grands jeux de données avec des images réelles comprenant également des lésions rares et des facteurs de confusion (tatouage, pilosité, etc.).
Alors, quel pourrait être le rôle de l’IA dans la détection du mélanome ? L’IA peut-elle remplacer le praticien ? L’IA pourrait remplacer le praticien si elle avait accès à toutes les informations disponibles lors de l’examen clinique, si elle était conçue à partir de grands jeux de données avec de nombreux échantillons pour les situations rares, si elle était utilisée dans des conditions non standardisées, si elle pouvait remplacer l’interaction sociale, etc. Par ailleurs, si l’IA se trompe, qui est responsable ? Comment l’information est-elle transmise au patient ? Quel est le pourcentage de risque d’un diagnostic ? Pour le moment, l’IA ne va donc pas nous remplacer mais elle viendra compléter le processus de diagnostic. En outre, l’IA pourrait nous permettre d’identifier les patients atteints de mélanomes agressifs, et pourrait aider les patients à s’autodépister (même si cela implique une certaine motivation).
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
Influence de l’âge sur les choix thérapeutiques pour les mélanomes à haut risque et métastatiques
D’après la communication orale de Reinhard Dummer (Zurich, Suisse)
Chez les patients âgés atteints de mélanome, il convient de prendre en compte certaines considérations générales. Les caractéristiques du patient : comorbidités, médicaments, mobilité, qualité de vie (QdV), motivation, et les caractéristiques de la tumeur : localisation, sous-type de mélanome, mutations du gène conducteur, charge tumorale mutationnelle (TMB).
En ce qui concerne la qualité de vie, celle des patients sous dabra+trame s’améliore réellement et est corrélée à l’efficacité clinique. Ainsi, si le patient présente une mutation BRAF, le combo dabra+trame peut être utilisé comme traitement adjuvant chez les patients de stade III.
Le mélanome desmoplastique est un type de mélanome plus fréquent chez les personnes âgées et des études ont montré qu’il répondait très bien au traitement par anti-PD1.
Mais qu’entend-on exactement par personnes âgées ? L’ESMO les définit comme des personnes de plus de 75 ans. Dans ces cas, il faut considérer la nécessité d’une BGLS. Cela dépend toutefois de l’état du patient et des caractéristiques évoquées ci-dessus.
L’âge a-t-il une influence sur les résultats ? L’âge n’a pas à proprement parler d’influence négative sur les résultats. Par conséquent, l’âge ne doit pas limiter l’usage d’IPC ou de TC.
Que faire en cas de cancer métastatique ? En général, l’immunothérapie est le traitement de première ligne, mais il faut évaluer si le patient est symptomatique, son état d’esprit, son taux de LDH, les organes concernés, etc.
Quels traitements peuvent-ils être employés ? La combinaison ipi + nivo est le traitement le plus puissant. Le bénéfice supplémentaire par rapport au nivo seul n’est pas aussi élevé que le taux de survie à 5 ans. En outre, le bénéfice supplémentaire avec ipi + nivo est plus marqué chez les patients plus jeunes. Par conséquent, en raison des toxicités et de ces données d’efficacité, il est généralement préférable d’utiliser l’anti-PD1 seul chez les personnes âgées. Les seules exceptions sont sans doute les métastases cérébrales ou un taux élevé de LDH, mais il est important d’individualiser la décision. De même, en cas de mutation BRAF, les personnes âgées ont tendance à répondre aussi bien que les patients plus jeunes.
D’après la communication orale de Ashani Weeraratna (Baltimore, États-Unis)
Le cancer est une maladie de la personne âgée due à de multiples facteurs tels que l’accumulation des altérations génétiques. Mais il semble que le microenvironnement ait aussi un impact. Lors d’expériences sur des souris, au cours desquelles on a injecté les mêmes cellules de mélanome à des souris jeunes et âgées, on a observé que le mélanome se développait plus rapidement chez les souris âgées. Il semble que les fibroblastes dans le microenvironnement soient modifiés en raison d’une diminution des gènes liés à la dormance et d’une augmentation des gènes de prolifération.
Les lipides jouent également un rôle important dans le microenvironnement en étant régulés à la hausse : Le FATP2 est augmenté dans les fibroblastes âgés et dans les mélanomes chez les vieux animaux (Alicea et al., Cancer Discovery) → par conséquent, le fait de cibler FATP2 (qui apparaît dans les modèles de personnes âgées) pourrait permettre à un mélanome de répondre aux BRAFi/MEKi.
Les chercheurs ont également étudié le dimorphisme sexuel dans les cas de mélanomes (l’incidence et la survie sont différentes chez l’homme et la femme). Les fibroblastes féminins sont plus sénescents que ceux des hommes, et le deviennent davantage avec l’âge. Il en va de même pour la forme des fibroblastes : l’asymétrie de la forme des cellules augmente avec l’âge. De même, les ROS mitochondriaux sont différents et plus nombreux chez l’homme que chez la femme.
D’après la communication orale de Jean-Christophe Marine (Leuven, Belgique)
Les tumeurs forment un écosystème complexe et évolutif et les mélanomes se développent selon un modèle hiérarchique.
L’expérience a permis d’observer que :
Les cellules de mélanome de type souche sont situées dans la niche périvasculaire des lésions primaires de mélanome.
Les clones producteurs se trouvent à proximité des vaisseaux sanguins.
De plus, il est important de savoir si dans cette niche se trouvent des cellules qui vont provoquer une maladie métastatique. Les résultats indiquent que la croissance et la dissémination métastatique sont induites par des sous-populations de mélanomes distinctes sur le plan transcriptionnel et spatial.
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
Enquête sur les modalités de prise en charge en Europe
D’après la communication orale de Simone Ribero (Turin, Italie)
Le mélanome représente 31 % des tumeurs malignes observées chez les femmes enceintes. La question se pose toujours de savoir si un mélanome est plus dangereux durant la grossesse. Jusqu’à présent, on ne peut pas dire avec certitude si la grossesse aggrave la progression du mélanome. Une enquête a également permis d’évaluer les mesures prises par les praticiens dans ces cas. Cette enquête présentait différents cas illustrant différents scénarios de mélanome chez la femme.
Le risque de rechute des mélanomes de stade IA et IB est presque constant au cours des 10 premières années. La présence de mélanomes minces durant la grossesse n’est donc pas nécessairement un problème.
On ignore ce qu’il en est pour les mélanomes épais mais il serait sans doute préférable d’attendre 2 ans, car le risque de rechute est plus élevé au cours des premières années. Le problème c’est qu’il n’existe pas de consensus dans la littérature médicale.
Autre scénario, celui d’une femme en post-ménopause sous traitement hormonal substitutif : rien ne prouve que l’hormonothérapie augmente le risque de mélanome.
Autre scénario enfin : la BGLS est-elle conseillée ou non durant la grossesse ? Le risque lié à la procédure est très faible, l’anesthésie et le technétium ne présentant pas de contre-indications durant la grossesse. De plus, on peut recourir à l’IRM et à l’échographie pour la stadification.
D’après la communication orale de Emi Dika (Bologne, Italie)
Les hormones sexuelles peuvent être oncogènes, notamment dans le cancer du sein. En outre, le pronostic est meilleur chez l’homme que chez la femme. Il existe donc une hypothèse selon laquelle les oestrogènes pourraient jouer un rôle dans la mélanomagenèse. Cette hypothèse a été étudiée au cours des 20 dernières années avec l’apparition du tamoxifène. Généralement, deux récepteurs ont été étudiés : les récepteurs d’oestrogènes alpha et bêta. Cependant, il existe une nouvelle voie potentiellement impliquée dans l’apparition du mélanome : Le RCPG → récepteur d’oestrogène couplé aux protéines G.
Les cellules de mélanome sont dépourvues de RO classique significatif mais expriment le RCPG.
La liaison de l’oestrogène ou d’un agoniste sélectif du RCPG (G-1) signale à l’adénylate cyclase d’activer la PKA. La phosphorylation de CREB par la PKA entraîne l’expression de MITF, augmentant ainsi la pigmentation et la différenciation. La PKA appauvrit ensuite le c-Myc, ce qui entraîne une diminution de la prolifération cellulaire.
La double expression des récepteurs d’oestrogènes (RO) bêta et RCPG a été détectée dans 73 % des mélanomes associés à la grossesse (PAM) et a été associée à des marqueurs pronostiques positifs tels qu’une épaisseur de Breslow plus faible, moins de mitoses et la présence d’un infiltrat lymphocytaire péritumoral.
Le RO alpha et le récepteur de la progestérone (RP) étaient positifs dans les cas de mélanomes survenant chez des femmes après une fécondation in vitro. Ces mélanomes étaient également très pigmentés sur les plans clinique et dermoscopique.
D’autres études présentent des résultats contradictoires : Giorgi et al. ont montré que le RO bêta favorise la prolifération des cellules mélanocytaires, alors que le RO alpha a un effet inhibiteur et régulateur sur la qualité invasive du mélanome.
En 2020, une autre étude leur a permis de constater que, chez les patientes atteintes d’un cancer du sein, les inhibiteurs de l’aromatase pouvaient contribuer à la localisation nucléaire du RO bêta, qui est un récepteur sensible aux oestrogènes connu pour son activité répressive, jouant ainsi un rôle protecteur → les inhibiteurs de l’aromatase peuvent avoir un effet préventif sur le mélanome.
En ce qui concerne les femmes sous stimulation ovarienne, ils n’ont pas trouvé de récepteurs nucléaires d’oestrogènes dus à la stimulation ovarienne.
En résumé, le rôle du RO dans le mélanome fait toujours débat et des études complémentaires sont nécessaires.
D’après la communication orale de Catarina Longo (Reggio, Italie)
Le mélanome est le cancer le plus fréquent durant la grossesse (31 %, incidence de 5 à 10 cas pour 100 000 grossesses).
La grossesse se caractérise par une immunosuppression physiologique visant à augmenter la tolérance pour ne pas rejeter le foetus. Cependant, il n’existe aucune preuve que cette immunosuppression augmente l’incidence de mélanome. On peut également se demander si le
pronostic du mélanome durant la grossesse est plus mauvais ou non. De nombreuses études se sont penchées sur la question, mais le problème est qu’il n’existe pas de définition claire de ce que l’on considère comme un mélanome associé à la grossesse (PAM) --> certaines études incluent les mélanomes du post-partum, d’autres non.
Kygidis et al. ont réalisé une méta-analyse pour évaluer les PAM, et ont démontré que les PAM étaient associés à une mortalité supérieure de 17 % par rapport aux mélanomes diagnostiqués chez les femmes non enceintes. De plus, le PAM était associé à un taux de récidive 50 % plus élevé. Ils ont donc conclu que le PAM est associé à un plus mauvais pronostic.
Byrom et al. ont également effectué une autre revue systématique et confirmé une augmentation de la mortalité associée au PAM. Cependant, de plus amples études sont nécessaires car le sujet reste controversé.
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Iwei Yeh (San Francisco, États-Unis)
Les tumeurs de Spitz correspondent à la voie IV de la nouvelle classification de l’OMS pour les proliférations mélanocytaires.
Le nævus de Spitz (NS) est généralement plus fréquent chez les enfants et peut se présenter sous forme de papules roses ou de macules fortement pigmentées (nævus de Reed).
Sur le plan histologique, on observe : hyperplasie de l’épiderme, corps de Kamino, mélanocytes de grande taille avec des noyaux volumineux.
Les mutations sont variées dans les nævi de Spitz, et beaucoup sont des fusions de kinases activatrices. Les mutations peuvent être des mutations HRAS, des fusions BRAF, des fusions ROS, des fusions ALK, des fusions NTRK1 entre autres (MET...).
De plus, ces fusions peuvent être organisées de multiples façons, et l’expression de la protéine de fusion dépend de l’initiateur du gène. Il est intéressant de noter que les différentes mutations et fusions ont des présentations histologiques différentes :
NS à mutation HRAS : Sur le plan histologique, mélanocytes hypertrophiés, nucléoles proéminentes. Ils présentent parfois un gain en 11p.
Fusions NTRK3 : peuvent présenter une morphologie de cellules en fuseau.
Fusions NTRK1 : peuvent présenter des rosettes sur le plan histologique.
Il est important d’utiliser des tests auxiliaires pour identifier la mutation initiatrice :
Immunohistochimie : outil potentiellement très efficace et facile → peut colorer pour ALK, NTRK et ROS. FISH CGH Tumeurs spitzoïdes vs tumeurs de Spitz : Les tumeurs de Spitz sont les tumeurs de Spitz atypiques classiques, désormais appelées mélanocytomes de Spitz.
Comment se présentent les mélanomes spitzoïdes ? Les chercheurs ont analysé les mélanomes spitzoïdes et ont constaté que les mélanomes purement Spitz présentaient des mutations et des fusions HRAS, tandis que d’autres n’ayant pas ces caractéristiques présentaient des mutations ponctuelles BRAF, des mutations dans la voie MAP-kinase (ces mélanomes sont peut-être provoqués par l’exposition aux UV), puis des mélanomes de type MAPK sauvage ne présentant pas non plus de mutations HRAS ni de fusions.
Les mutations du promoteur de TERT permettent de prédire un comportement clinique agressif chez les patients atteints de néoplasmes spitzoïdes.
D’après la communication orale de James Wilmott (Sydney, Australie)
Tous les patients ne répondent pas à l’immunothérapie, et ces thérapies présentent également une toxicité. Il est crucial de déterminer qui répondra ou non afin d’améliorer la réponse et d’éviter la toxicité.
On utilise de très nombreuses données pour trier les patients et il est probable qu’à l’avenir, on intègre les données cliniques, sérologiques et pathologiques.
Leur groupe a effectué un séquençage du génome entier, un RNAseq et une immunohistochimie pour PD-L1/TILS afin d’évaluer la réponse. Ils ont constaté que les patients répondeurs ont des TILS plus élevés et une plus forte expression de PD-L1 (bien que d’autres études soient controversées). Ces études ont été réalisées à l’aide de l’immunofluorescence en multiplexe et de la pathologie quantitative. Ils ont ensuite évalué ces informations au moyen de la pathologie spatiale qui calcule les distances et les interactions entre les cellules. Ces informations ont ensuite été utilisées comme données d’entrée dans les modèles de réponse afin de déterminer si les tumeurs pouvaient réagir. Ils ont ainsi pu prouver que la pathologie spatiale pouvait être appliquée en pratique clinique pour prédire la réponse au traitement. Plus tard, ces informations ont été intégrées à des données cliniques telles que le LDH, les traitements antérieurs, etc. et des algorithmes d’apprentissage automatique ont été utilisés pour fournir des modèles de prédiction de traitement. La pathologie spatiale pourrait donc être un outil prometteur pour intégrer la pathologie dans la détermination de la réponse au traitement du mélanome.
Comment reconnaître les tumeurs mélanocytaires avec inactivation de BAP1 et quelle est leur importance ?
D’après la communication orale de Arnaud de la Fourchadière (Lyon, France)
La protéine BAP1 est exprimée naturellement dans les cellules. Lorsqu’elle disparaît, cela peut provoquer l’apparition de tumeurs mélanocytaires avec inactivation de BAP1 (TMIB) → lésions sporadiques uniques, ou lésions multiples associées à des mutations germinales de BAP1 et associées à un syndrome cancéreux.
Une mutation germinale de BAP1 peut être associée à de multiples TMIB, mais également à un mélanome uvéal, à un mélanome cutané, à un mélanome leptoméningé, à un mésothéliome, à un cancer rénal à cellules claires, à des méningiomes, à de multiples carcinomes basocellulaires, à des cholangiocarcinomes intrahépatiques, ainsi qu’à d’autres maladies qui n’ont probablement pas encore été décrites.
Sur le plan clinique, les TMIB se présentent sous la forme de papulonodules polypoïdes, avec des zones en relief qui se dépigmentent. Sur le plan histologique, elles présentent une population clonale intradermique expansive de mélanocytes spitzoïdes atypiques, de grande taille, non pigmentés et épithélioïdes, entourés d’un nævus plus banal. On peut également observer des sortes de « baisers » : les mélanocytes sont proches des lymphocytes, ce qui suggère une interaction entre mélanocytes et lymphocytes.
L’immunohistochimie de la BAP montre que la BAP1 est perdue dans les noyaux des cellules atypiques. De plus, elles sont positives pour BRAF V600E.
Si une seule TMIB est trouvée, le risque de mutation germinale de BAP1 est de 12 à 16 %. Par conséquent, il n’existe pas de directives sur ce qu’il convient de faire. Pour l’instant, on se contente d’une exérèse avec des marges de 2 mm et on propose éventuellement un test génétique et un contrôle ophtalmologique.
Il est également possible que certains mélanomes se développent à l’intérieur d’un nævus avec inactivation de BAP1. Bien qu’ils soient rares, ils peuvent être très agressifs.
D’après la communication orale de Amaya Viros (Manchester, Royaume-Uni)
L’exposition aux UV augmente l’incidence du mélanome : Les UV provoquent une inflammation et endommagent l’ADN.
Cependant, l’exposition aux UV influence-t-elle la survie au mélanome ? Certaines études témoignent d’un effet protecteur des UV dans certains cas de mélanomes, alors que d’autres études démontrent le contraire. Ce que le laboratoire de Viros a fait, c’est d’analyser l’action des UV sur les fibroblastes et le collagène. Ils ont découvert que la signature 7 est liée aux dommages causés par les UV. Ils expliquent que les UV dégradent le collagène et ils ont pu observer le même phénomène avec le collagène entourant les mélanomes. En outre, ils ont pu constater que le collagène entourant les cellules du mélanome avait une capacité d’invasion différente. L’intégrité du collagène modulerait donc l’invasion du mélanome. Plus tard, ils ont évalué ces résultats dans une cohorte d’échantillons de mélanomes pour étudier la survie au mélanome. Ils ont constaté que les dommages chroniques dus au soleil (CSD) peuvent avoir des effets différents sur le mélanome en fonction du microenvironnement lié au collagène : si le collagène est dégradé, la capacité d’invasion diminue. En revanche, si le collagène est inversé, ces mêmes mélanomes ont une capacité d’invasion plus importante et leur état s’aggrave. Le collagène peut donc être un marqueur prédictif de la réponse des mélanomes.
En résumé, la présence de CSD sévères peut provoquer une dégradation du collagène, une diminution de l’invasion et de meilleurs résultats. Mais si le collagène est restauré, l’invasion augmente et le pronostic est moins bon.
Similitudes et différences entre les nævi bleus et tumeurs apparentées et les mélanomes uvéaux. S’agit-il de jumeaux ou de parents éloignés ?
D’après la communication orale de Klaus Griewank (Mainz, Allemagne)
Les nævi bleus et les mélanomes uvéaux présentent des mutations GNAQ et GNA11. Mais sont-ils pour autant apparentés ?
Par la suite, d’autres mutations telles que BAP1, SF3b1 EIF1AX ont également été découvertes.
La protéine BAP1 est importante dans le mélanome uvéal. Ce dernier comporte deux sousensembles de patients, l’un qui évolue très bien et l’autre qui évolue très mal. Les patients les plus mal en point présentent généralement une perte d’expression de la protéine BAP1, liée à des pertes sur le chromosome 3p. Le tebentafusp est un nouveau médicament qui pourrait s’avérer efficace sur le mélanome uvéal. Idéalement, on aimerait cibler BAP1 et restaurer sa fonction.
Il existe une autre tumeur : le nævus bleu malin, également connu sous le nom de mélanome de type nævus bleu. Il est probable qu’il ne soit pas souvent désigné comme tel sur le plan histologique. Les métastases lymphatiques semblent être fréquentes et doivent faire l’objet d’une surveillance. En termes de traitement, les BRAFi ne sont pas utiles puisqu’ils ne présentent pas de mutations BRAF. Alors, ces lésions « bleues » sont-elles apparentées ? La réponse est probablement oui car elles partagent des anomalies génétiques.
Compte rendu rédigé par, Dr Oriol YELAMOS PENA, Dermatologue, Espagne
D’après la communication orale de Adi Diab (Houston, États-Unis)
Nemvaleukin :
il existe une nette activité de réponse antitumorale, mais très limitée si elle est utilisée en monothérapie.
les effets indésirables sont principalement des symptômes de type grippal qui ne s’aggravent pas
lorsqu’on l’associe aux anti-PD1.
peut être administré par voie sous-cutanée ou intraveineuse.
THOR 707 : IL2 R-alpha pégylée
les effets indésirables sont principalement des symptômes de type grippal qui ne s’aggravent pas lorsqu’on l’associe aux anti-PD1.
NKTR-214 (nektar) bempegaldesleukine : autre IL2 modifiée
il existe une nette activité de réponse antitumorale, mais très limitée si elle est utilisée en monothérapie.
les effets indésirables sont principalement des symptômes de type grippal qui ne s’aggravent pas
lorsqu’on l’associe aux anti-PD1.
associé au nivolumab : RC 34 %, RO 53 %
Bilan : efficacité et profil de sécurité similaires. Ils fonctionnent mieux avec les anti-PD1, la plupart donnent des symptômes de type grippal qui sont de grade I et transitoires. Nécessité de mener davantage d’essais de combinaisons en dehors de la PD1, comme par exemple un combo avec anti- LAG3, entre autres.
D’après la communication orale de Inge-Marie Svane (Copenhague, Danemark)
Les approches de transfert adoptif de cellules T (ACT) font intervenir des TIL (lymphocytes infiltrant la tumeur) ou des cellules T génétiquement modifiées (par TCR ou CAR).
Malgré l’efficacité de l’immunothérapie, 50 % des patients ne répondent toujours pas et nécessitent des traitements complémentaires.
Le Lifileucel est un groupe de TIL qui permet d’obtenir une réponse de 36,4 % chez les patients réfractaires aux anti-PD1. Un essai est en cours pour comparer ces TIL à l’ipi chez les patients réfractaires aux anti-PD1. Parmi les patients atteints de mélanome, quels sont les candidats aux TIL en tant que traitement standard potentiel du cancer ?
Âge < 70 ans Bon score ECOG de 0 ou 1
Pas de métastases cérébrales
Fonctionnement satisfaisant des organes
Pas d’infections actives
En résumé, la thérapie TIL en est encore au stade expérimental mais elle a du potentiel puisque, si les patients y répondent, il peut y avoir des réponses complètes même chez les patients métastatiques. Cependant, on ignore encore comment prédire la réponse, définir la puissance des TIL et développer de meilleures thérapies TIL.
D’après la communication orale de Ignacio Melero (Pampelune, Espagne)
Certaines cytokines sont maléfiques en cas de cancer : TGF bêta, VEGF, GDF-15, LIF. Il en existe peut-être d’autres, mais elles sont encore inconnues à ce jour.
Le TGF bêta a une immunobiologie complexe, avec différentes sous-unités : 1, 2 et 3.
Fresolimumab : bloque le TGF bêta 1, 2 et 3.
Bintrafusp-alpha : fraction anti-PD-L1 + fraction piégeant le TGF bêta → échec dans l’essai de phase 2 vs pembro.
D’autres cytokines intéressantes dans les toxicités liées au traitement du mélanome sont le TNF alpha et l’IL8 : En ce qui concerne le TNF alpha : dans les cas de toxicités des IPC, il y a une augmentation du TNF alpha → par exemple dans la colite induite par ipi + nivo. Ces effets secondaires peuvent donc être améliorés par des anti-TNF alpha.
En ce qui concerne l’IL8 : elle est néoangiogénique et déclenchée par le TNF alpha. Certaines études ont montré que plus l’IL8 est élevée, plus le pronostic est mauvais → l’IL8 induit une libération de neutrophiles, connue pour aggraver le pronostic du mélanome. Ainsi, l’IL8 est une cible potentielle. Un essai vient d’ailleurs de débuter en vue de bloquer l’IL8.
D’après la communication orale de Ryan J. Sullivan (Boston, États-Unis)
Bien que les IPC aient révolutionné le traitement du mélanome, de nombreux patient n’y répondent toujours pas. Pour quelle raison ? Il y a plusieurs explications à cela : points de contrôle immunitaire alternatifs : TIM3, LAG3
amorçage insuffisant TMB/néoantigènes insuffisants présence de cellules T régulatrices et/ou macrophages associées à la tumeur recrutement/infiltration inadéquat(e) des cellules T perte du mécanisme de présentation de l’antigène tumoral/perte de la signalisation de l’IFN.
L’épigénétique peut également jouer un rôle important dans les voies oncogènes et les régulations immunitaires du cancer. Par conséquent, les régulateurs épigénétiques sont des cibles thérapeutiques potentielles dans le traitement du cancer.
G9a supprime DKK1 et supprime la voie WNT → cet élément est conservé dans tous les cancers associés à un microenvironnement immunitaire « froid ». G9a est oncogène grâce à des gains de copie ou des mutations activatrices. Fonctionne par activation de Wnt canonique. Favorise un environnement froid. La suppression de G9a agit en synergie avec le blocage des points de contrôle immunitaires, ces inhibiteurs qui sont en plein développement dans l’industrie pharmaceutique.
Ainsi, le fait de cibler ces régulateurs épigénétiques pourrait inverser les voies immunosuppressives (Wnt par exemple).
La bêta2-microglobuline (B2M) est un autre exemple de l’importance de l’épigénétique :
Les aberrations de la B2M sont associées à une résistance acquise aux IPC.
La perte d’hétérozygotie (LOH) de la B2M dans les échantillons pré-traitement est associée à de moins bons taux de réponse, de PFS et d’OS avec l’ipi et les anti-PD1.
Les stratégies potentielles pour cibler les mécanismes de résistance comprennent des agents qui augmentent/renforcent le nombre de cellules NK/leur activation et des agents qui surmontent le silençage épigénétique du mécanisme de présentation de l’antigène B2M.
Une autre modification épigénétique pourrait renforcer l’inhibition des points de contrôle immunitaires :
L’inhibition de HDAC → l’entinostat (ENT) montre une synergie avec les anti-PD1 dans les modèles cliniques. En pratique clinique, ENT + pembro ont montré des réponses plus durables chez certains patients.
D’après la communication orale de Samra Turajlic (Londres, Royaume-Uni)
Les néoantigènes sont des cibles clés pour les réponses immunitaires spécifiques aux tumeurs.
L’objectif des vaccins contre les néoantigènes est de prolonger la réponse de l’immunothérapie.
Cependant, les immunothérapies ciblant les néoantigènes comportent certains enjeux :
1. L’identification des néoantigènes (NA)
2. Le prélèvement adéquat de tissus (TIL)
3. Les méthodes d’administration (vaccins)
4. Des thérapies auxiliaires pour protéger les mécanismes immunosuppresseurs des cellules T spécifiques aux tumeurs
5. L’hétérogénéité intratumorale