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Compte-rendus rédigés par le Pr Anna Zalewska-Janowska (Dermatologue, Pologne), le Dr Ricardo Limongi Fernandes (Dermatologue, Brésil), le Dr Lucija Vanjaka-Rogošić (Dermatologue, Croatie), et le Pr Mirjana Milinković Srećković (Dermatologue, Serbie)
Sujets liés
Orateurs : Dr M. Peter Marinkovich, Pr Anne Dompmartin-Blanchère, et Dr Sonja Ständer
Compte rendu rédigé par Pr Anna Zalewska-Janowska
Dr M. Peter Marinkovich (Redwood City, États-Unis)
La première conférence plénière a été donnée par le Dr M. Peter Marinkovich, de Redwood City (États-Unis). L’orateur a abordé la question de la thérapie génique topique pour le traitement de l’épidermolyse bulleuse dystrophique récessive (EBDR), qui se caractérise par une déficience de la protéine des fibrilles d’ancrage du collagène de type VII dans la peau. Le Dr Marinkovich a présenté au public la procédure de thérapie génique épidermique par ingénierie du collagène de type VII (C7) (en détail : Siprashvili Z et al JAMA 2016;316(17):1808-17). En bref, une biopsie de peau atteinte d’EBDR est prélevée pour la production et l’expansion de cultures cellulaires. On procède en général à 6 greffes par patient. Le patient passe une semaine à l’hôpital pour le prélèvement de la greffe et les biopsies suivantes sont réalisées à intervalles réguliers afin de vérifier que la cicatrisation se déroule en toute sécurité. L’orateur a ensuite présenté l’essai de phase III portant sur la thérapie génique du fibroblaste C7. Des fibroblastes dermiques sont prélevés sur un patient à l’aide d’une série de trois biopsies de 3 à 4 mm et cultivés en laboratoire. Un vecteur est créé à l’aide d’un lentivirus auto-inactivé modifié pour coder le gène COL7A1 sous le contrôle d’un promoteur CMV. Le vecteur est ensuite introduit dans la culture de fibroblastes et délivre le gène thérapeutique aux cellules du patient ex vivo, ce qui favorise l’expression du collagène de type VII. Les fibroblastes génétiquement modifiés sont ensuite administrés au patient par voie intradermique. Dans le cadre de cet essai, les injections intradermiques réalisées sur la plaie du patient ont permis d’administrer des fibroblastes autologues surexprimant le gène C7. Cette procédure repose à la fois sur une correction cutanée ex vivo, où la peau est prélevée et traitée en laboratoire avec intégration d’un gène viral et réalisation d’un greffon, et sur la mise en place d’un greffon in vivo, appelée Beremagene Geperpavec (B-VEC), réalisée sous anesthésie générale au bloc opératoire dans la semaine suivant l’hospitalisation. Les phases 1 et 2 de la thérapie génique topique in vivo pour l’EBDR sont décrites en détail dans Nat. Med. 2022;28:780-8. L’orateur a présenté des photographies magnifiques et convaincantes de la peau de patient greffés par B-VEC au début de l’étude et des plaies parfaitement cicatrisées après trois mois. Cette procédure a été présentée dans N. Engl. J. Med. 2022;387:2211-9 par Guide SV et al. qui décrivent l’essai de phase 3 en double aveugle, intra-patient, randomisé et contrôlé par placebo visant à évaluer l’efficacité et l’innocuité du B-VEC dans l’EBDR. Un traitement hebdomadaire a été réalisé jusqu’à la fermeture de la plaie et repris en cas de réouverture de la plaie. Aucun événement indésirable (EI) n’a conduit à l’arrêt du traitement et les EI les plus fréquemment rencontrés étaient les suivants : prurit, frissons et carcinome épidermoïde (CEC) cutané, qui sont apparus chez 3 patients (10 %). Les 3 CEC sont apparus sur des plaies n’ayant bénéficié ni du B-VEC ni du placebo. La thérapie B-VEC a prouvé son efficacité et sa durabilité à long terme, puisqu’après 17 mois de traitement, les patients concernés n’ont pas eu besoin d’une nouvelle greffe. Le traitement topique de l’œil par B-VEC a également été mis en œuvre avec succès, marquant une nouvelle avancée dans le traitement de l’EBDR et une amélioration considérable de l’acuité visuelle. L’orateur a conclu son exposé avec modestie, en soulignant qu’un suivi plus long et des études ultérieures de plus grande envergure sont nécessaires pour obtenir des preuves supplémentaires fiables.
Pr Anne Dompmartin-Blanchère (Caen, France)
La deuxième conférence plénière a été tenue par le Pr Anne Dompmartin-Blanchère, de Caen (France), sur le thème de l’approche théranostique des malformations vasculaires. Elle a présenté au public de belles images cliniques d’une grande variété d’anomalies vasculaires, suivies d’une nouvelle classification visant à les répartir en tumeurs et malformations vasculaires (http://issva.org/classification). La conférencière a mis l’accent sur les malformations vasculaires en soulignant la variabilité clinique au sein d’une même famille et la nécessité d’identifier l’étiopathogénie et les voies moléculaires. Il est indispensable de poser un diagnostic précis, pour lequel seul quelques examens complémentaires sont nécessaires, notamment l’écho-doppler, l’IRM, l’artériographie et les tests de coagulation (D-dimère et fibrinogène). Un traitement personnalisé est ensuite élaboré pour le patient, toujours par le biais d’une équipe interdisciplinaire : oncologue, chirurgien translationnel, dermatologue plasticien, pédiatre, radiologue, hématologue, orthopédiste pédiatrique, chirurgien ORL maxillo-facial, stomatologue, neurochirurgien, neurologue, chirurgien vasculaire, anesthésiste, anatomopathologiste, cardiologue pédiatrique, ophtalmologue, kinésithérapeute, le tout coordonné par une équipe de médecins et d’infirmières. Le fait d’élucider les mécanismes génétiques sous-jacents a permis de mieux comprendre la physiopathologie de ces lésions et a ouvert la voie à l’utilisation de thérapies ciblées telles que la rapamycine, l’alpelisib (inhibiteur de PIK3CA), le trametinib (inhibiteur de MEK), la thalidomide (anti-VEGF). Toutefois, malgré l’espoir que ces traitements ont suscité, les professionnels doivent être prudents sur les questions de sécurité à long terme. Il faut souligner que les mutations génétiques observées dans les cellules endothéliales dont le génome est stable sont souvent impliquées dans le cancer, mais que les mutations cancéreuses apparaissent dans d’autres types de cellules présentant de nombreuses autres mutations somatiques, alors que les anomalies vasculaires sont des lésions bénignes. Il convient de garder à l’esprit cette information.
Dr Sonja Ständer (Münster, Allemagne)
La dernière conférence de la première session plénière a été donnée par le Dr Sonja Ständer, de Münster (Allemagne) et intitulée « Axe cerveau-peau : le prurit et au-delà ». Les connexions cerveau-peau sont actuellement considérées comme un thème majeur en dermatologie. Le cerveau et la peau partagent une origine ectodermique avec des facteurs moléculaires communs. Il existe donc un lien anténatal clair entre la peau et le développement neurologique. En ce qui concerne le lien post-natal, une connexion neuro-anatomique existe et les kératinocytes expriment de nombreux récepteurs présents dans le cerveau dans de nombreuses dermatoses (Jameson C. et al. Mol. Psychiatry 2023;28: 108-17). L’axe cerveau-peau est une relation bidirectionnelle dans les dermatoses prurigineuses impliquant les kératinocytes, le système endocrinien et immunitaire, les fibres nerveuses, les hormones de stress et la gestion des émotions. La conférencière a rappelé que le prurit peut être induit dans l’ensemble du système nerveux périphérique et central et que le grattage réduit le nombre de fibres nerveuses intra-épidermiques dans les maladies prurigineuses chroniques, mais induit également un modèle de ramification plus fort dans ces fibres, de sorte que les observations selon lesquelles on observe plus ou moins de fibres nerveuses sous l’effet du grattage sont toutes deux vraies. Les conclusions finales de ces études dépendent de la méthode utilisée. L’orateur a également souligné que le grattage dans le groupe prurit chronique était considéré comme un plaisir et a suggéré que le grattage addictif pouvait induire ou contribuer à l’hypersensibilisation neuronale. On peut donc affirmer que les démangeaisons qui incitent au grattage modifient la neuroanatomie cutanée, induisent une hypersensibilité neuronale, augmentent l’expression des récepteurs pruritogènes de la colonne vertébrale et activent le système de récompense. De telles situations créent sans aucun doute une dépendance au grattage. L’orateur a également fait valoir que le cerveau est très réceptif aux instructions verbales (IV) et que ces dernières peuvent fortement orienter les attentes en matière de résultats. Les effets placebo et nocebo sont susceptibles de moduler le prurit (plus de détails dans Meeuvis SH et al. Neurosci Biobehav Rev 2020;113:325-37). Il existe également des preuves tangibles qu’il est possible de moduler les fonctions immunitaires par le biais d’un conditionnement comportemental. Prenons l’exemple de la cyclosporine administrée parallèlement à un stimulus gustatif (conditionnement). Une nouvelle exposition à ce stimulus gustatif seul réduit de manière significative les niveaux d’IL-2 dans les PBMC, même 5 à 11 jours après le conditionnement. Le stress active l’axe HPA et les kératinocytes produisent des hormones de stress telles que la CRH et l’ACTH (pour plus de détails, voir Papa V. et al. Cells 2023 Jul12;12(14):1828). En conclusion, on peut dire que le prurit implique de nombreux mécanismes dans l’axe cerveau-peau et que la modulation cérébrale est un facteur important dans le comportement de grattage et l’aggravation du prurit. La persistance des démangeaisons à long terme implique davantage de mécanismes, comme par exemple, l’activation de l’axe HPA, du système immunitaire, de l’inflammation cutanée neurogène. Les traitements pharmacologiques et non pharmacologiques (IV) jouent un rôle important dans la prise en charge des patients et il faudrait insister sur la psychoéducation de ces derniers et étudier le rôle des attentes en matière de santé et de maladie. L’accent a été mis sur le fait que les antidépresseurs améliorent la fonction de barrière épidermique et la théorie sous-jacente consiste à dire que le stress et les glucocorticoïdes endogènes activent l’axe périphérique de l’AH dans la peau et détériorent ainsi sa fonction barrière. (Choe SJ et al. Sci Rep 2028;8:6334). Les thérapies actuellement disponibles (antidépresseurs, modulateurs opioïdes, gabapentinoïdes, produits biologiques, petites molécules) constituent des approches prometteuses pour rompre le cycle prurit-grattage et l’inflammation.
Orateurs : Dr Chris Callewaert, Pr Brigitte Dréno, Pr Gregor Borut Jemec, et Pr Dr Tilo Biedermann
Compte rendu rédigé par Pr Anna Zalewska-Janowska
Dr Chris Callewaert (Gand, Belgique)
La première conférence sur le microbiote et la fonction barrière de la peau a été donnée par le Dr Chris Callewaert de Gand en Belgique. Ce dernier est également surnommé Dr Armpit (Dr Aisselle) sur les réseaux sociaux (https://drarmpit.com/). Bravo pour ce surnom !
La peau humaine abrite environ 1000 milliards de bactéries. Le microbiome cutané est essentiel à la fonction de barrière cutanée et joue les rôles suivants : microbien, chimique, physique et immunologique. La barrière microbienne est constituée de différents microbes et, en conditions normales, elle est diversifiée et varie d’un endroit à l’autre de l’anatomie. Le microbiome cutané produit des bactériocines, des peptides antimicrobiens, des lantibiotiques et des facteurs de virulence qui tuent ou inhibent l’activité d’autres bactéries. En ce qui concerne la barrière chimique, les microbes présents dans la peau produisent des lipases et décomposent les lipides sébacés en acides gras libres. Ainsi, la peau se dote d’un manteau acide d’un pH d’environ 5,5 et produit des bêta-défensines humaines. En ce qui concerne la barrière physique, le microbiome cutané favorise les kératinocytes et produit des antioxydants. En outre, les enzymes du microbiome cutané produisent des céramides et limitent la PIE. Quant à la barrière immunitaire, le microbiome cutané s’efforce de préserver l’homéostasie, d’empêcher le développement de dysbioses et d’exercer un effet anti-inflammatoire. Aujourd’hui, différentes espèces de microbiote interviennent dans différentes maladies ou symptômes tels que la dermatite atopique, la cicatrisation des plaies, la rosacée, le psoriasis, le vieillissement de l’acné ou les pellicules. Le microbiome des aisselles est le principal responsable des odeurs corporelles (Callewaert et al., Plos. One 2013). Plus la diversité sous les aisselles est importante, plus les odeurs sont désagréables. La transplantation bactérienne des aisselles consiste, par définition, à transférer le microbiome de l’aisselle d’une personne dépourvue d’odeurs corporelles (le donneur) vers l’aisselle lavée d’une personne souffrant d’odeurs corporelles (le receveur) (Callewaert et al., Exp. Dermato. 2016 ; Callewaert et al., Comput. Struct. Biotechnol. J. 2021). Cette procédure modifie le microbiome et, associée à la bactériothérapie, elle modifie le microbiome et améliore l’odeur des aisselles. On notera que les Staphylococci contenus dans le spray bactérien peuvent remplacer les bactéries associées aux mauvaises odeurs et que l’utilisation d’un tel spray permet d’améliorer l’odeur des aisselles. Au cours de son exposé, le Dr Callewaert a également déclaré que les gros consommateurs de fast-food sentent moins bon et qu’en raison de la grande quantité de bactéries présentes dans la région anale, cette zone se régénère très facilement. Notons que l’on trouve encore plus de bactéries dans l’intestin que sur la peau.
Pr Brigitte Dréno (Nantes, France)
La deuxième conférence a été proposée par le professeur Brigitte Dréno sous le titre « Microbiome et acné ». L’acné est un trouble de la barrière cutanée caractérisé par une augmentation de la PIE. Le microbiome de la peau normale contrôle l’activation de l’immunité innée et la pénétration de tout antigène. L’altération de la barrière cutanée induit une dysbiose avec activation de l’immunité innée et pénétration d’antigènes et de bactéries pathogènes.
Dans l’acné, la dysbiose est liée à une perte de diversité des phylotypes C. acnes avec une prédominance du phylotype IA1. L’acné de la femme adulte n’est pas associée à un type spécifique de C. acnes. Le phylotype prédominant de C. acnes est le même dans l’acné de l’adulte et l’acné sévère que chez l’adolescent. C. acnes n’est pas la seule bactérie impliquée dans l’acné. C. acnes inhibe la prolifération de S. epidermidis et de S. pyogenes, induit la sécrétion d’AMP par les kératinocytes et hydrolyse les triglycérides du sébum avec production d’acide propionique. S. epidermidis inhibe la prolifération de C. acnes en favorisant la fermentation du glycérol, naturellement produit par la peau, et en induisant la production d’acide succinique. Les bactéries interagissent entre elles en produisant des AMP. La question se pose de savoir si S. epidermidis est un autre responsable de l’acné.
Dans l’acné sévère, aucune différence n’a été observée entre C. acnes et S. epidermidis, mais on a noté l’abondance de certaines bactéries Gram négatives et de champignons moins connus. Les études métabolomiques ont révélé des modifications des fonctions du microbiome cutané, à savoir des modifications du métabolisme de substances clés telles que les lipides, les vitamines et les acides aminés, susceptibles de perturber de façon significative l’état de la peau de l’hôte.
Le microbiome bactérien du comédon présente une activité métabolique plus importante que le microbiome de la surface de la peau, y compris la production d’enzymes liées à l’acné.
Les séquences complètes de l’ADN des souches de C. acnes révèlent que les souches liées à l’acné portent des gènes de virulence par rapport aux souches saines du même phylotype. Les souches générées par l’acné produisent plus de porphyrine et plus de facteurs inflammatoires dans les kératinocytes (ERO, cytokines) IL-8, 17, 1 bêta, facteur CAMP, lipase, MMP.
Les C. acnes provenant d’une peau saine ou d’une peau acnéique activent différemment la voie Th1/Th17. L’utilisation d’inhibiteurs de Th-17 pourrait être intéressante pour le contrôle de la réponse de Th17.
Les chercheurs ont également découvert que les patients atteints d’acné vulgaire ont un microbiote intestinal distinct de celui des témoins sains.
Notons que l’isotrétinoïne modifie le microbiome cutané. Il est indispensable d’y ajouter un nettoyant d’un pH d’environ 5 et une crème hydratante afin de restaurer la barrière cutanée et le microbiome. Il a été question de l’influence des médicaments prescrits aux patients atteints d’acné sur le microbiote cutané. Ainsi,
Le microbiome cutané ouvre la voie à la bactériothérapie en ce qui concerne la vaccination, les bactériophages, les probiotiques/prébiotiques et les postbiotiques. En ce qui concerne la vaccination, les résultats ex vivo, portant sur la modulation de l’inflammation par des anticorps monoclonaux dirigés contre le facteur CAMP2, ont montré que l’injection du vaccin contre l’acné ciblant le facteur CAMP directement dans les lésions acnéiques pourrait être proposée à l’avenir. Les bactériophages de C. acnes sont présents dans l’unité pilo-sébacée et une thérapie phagique potentielle ciblant uniquement le phylotype C. acnes, impliqué dans l’acné (principalement IA1), a également été proposée pour de futures recherches. Le rôle potentiel des probiotiques (micro-organismes vivants) ou des prébiotiques se justifie par leur capacité à corriger la dysbiose. Les postbiotiques, à savoir les peptides antimicrobiens produits par les bactéries commensales du microbiome, pourraient également être utiles.
Le rôle crucial du microbiome dans le maintien de la fonction de barrière cutanée a été largement mis en exergue. Il constitue la première barrière contre l’environnement et contribue à la différenciation et à l’épithélialisation de la barrière cutanée par le biais du facteur de transfert signalant le récepteur des hydrocarbures aromatiques (AhR). En outre, il renforce la barrière chimique de la peau en produisant des lipases qui digèrent les triglycérides du sébum en acides gras libres, ce qui accroît l’acidité de la peau et limite la colonisation par des bactéries pathogènes. Par ailleurs, le microbiome module les immunités innées et adaptatives, en libérant des peptides antimicrobiens (AMP) directement ou en activant leur sécrétion par les cellules de la peau. Dans les médias, le microbiome cutané a même été qualifié de « seconde peau ». Notons que l’effet protecteur du microbiote sur la colonisation de la peau par S. aureus dépend de l’intégrité de la barrière épithéliale.
Le microbiome cutané joue un rôle central dans l’inflammation liée à l’acné. Dans l’acné, la dysbiose se caractérise par la perte de diversité des phylotypes C. acnes. C. acnes IA1 est le phylotype prédominant. D’autres bactéries commensales jouent un rôle, principalement S. epidermidis et peut-être d’autres dans l’acné sévère. La glande sébacée joue un rôle clé dans l’interaction avec C. acnes, en induisant un profil virulent. La dysbiose des bactéries est associée à une modification de leur métabolisme. Les microbes de la peau et de l’intestin agissent en interaction. Les médicaments anti-acné peuvent induire une dysbiose et doivent donc être associés à des produits de soin de la peau.
Pr Gregor Borut Jemec (Roskilde, Danemark)
La troisième conférence de la session n’a pas eu lieu en raison de l’absence du professeur Gregor Jemec.
Pr Dr Tilo Biedermann (Munich, Allemagne)
La dernière conférence de la session a été donnée par le professeur Tilo Biedermann de Munich en Allemagne sur le thème : le microbiome et la barrière cutanée dans la dermatite atopique (DA). Le conférencier a mis l’accent sur trois points :
La pathogenèse de la DA repose sur trois piliers : la détérioration de la fonction barrière (peau sèche, barrière défaillante), l’augmentation de l’immunité de type 2 (allergie, maladie Th2) et la dysbiose microbienne (avec prolifération de S. aureus). Notons que le dysfonctionnement de la barrière et l’inflammation de type 2 se stimulent l’un l’autre. La mutation de la fillagrine et le dysfonctionnement de la barrière favorisent la propagation de S. aureus, l’augmentation de l’inflammation et le passage d’une DA aiguë à une DA chronique. En bloquant l’inflammation de type 2, il est possible de réduire la quantité de S. aureus et de restaurer la fonction barrière.
Une fois de plus, au cours de cette session, la barrière cutanée a été divisée en 4 entités, à savoir le microbiome, la barrière chimique, la barrière physique et, enfin, la barrière immunologique (Eyerich S. et al., Trends Immunol. 2018). Point important : dans la DA, S. aureus est associé à la fois à la fonction barrière de la peau et à l’activation immunitaire. En fait, les trois piliers décrits dans la pathogenèse de la DA sont interconnectés.
Le professeur Biedermann a rappelé à l’auditoire les travaux historiques visant à utiliser un émollient pour traiter la DA. Nul doute que les antibiotiques produits par les commensaux de la peau sont efficaces contre S. aureus, comme par exemple les lantibiotiques produits par les souches de S. hominis. Cependant, les bons microbes ont besoin que l’inflammation de type 2 diminue pour contrôler S. aureus. Les microbes bénéfiques pourraient donc avoir un rôle préventif plutôt que curatif dans la DA.
Orateurs : Pr Thomas Tüting, Pr Georg Stary, et Dr Victoria P. Werth
Compte rendu rédigé par Pr Anna Zalewska-Janowska
Pr Thomas Tüting (Magdebourg, Allemagne)
La première conférence sur l’immunothérapie du mélanome a été donnée par le professeur Thomas Tüting, de Magdebourg, en Allemagne.
Le conférencier a retracé l’historique de la découverte expérimentale de l’immunité des cellules T anti-tumorales dans les années 1960, lorsque « la vision est devenue réalité ». Dans les années 1980, une autre étape a été franchie : la découverte des mécanismes moléculaires par lesquels les cellules T reconnaissent les cellules tumorales. Les années 1990 ont permis d’identifier les antigènes de mélanome reconnus par les cellules T. Cette décennie a également été marquée par le contrôle moléculaire des cellules T par les cellules dendritiques présentatrices d’antigènes. La découverte du renforcement de l’immunité antitumorale par le blocage du CTLA-4 a ainsi été récompensée par le prix Nobel en 2018. Il ne fait aucun doute que la recherche en immunologie fondamentale et les progrès de la biotechnologie ont permis de mettre l’immunothérapie à la disposition des patients atteints de mélanome. C’est la première mission importante qui a été accomplie.
Un concept radicalement nouveau a été mis au point pour le traitement du cancer : les cellules T peuvent reconnaître spécifiquement les cellules cancéreuses génétiquement endommagées et les contrôler. La « preuve de concept » de l’immunothérapie par cellules T grâce au transfert adoptif de cellules (TAC) constitue une véritable percée dans la recherche sur le cancer. En résumé, la tumeur est excisée et des fragments sont placés sur des plaques, puis cultivés en laboratoire et des cellules T anti-tumorales spécifiques sont produites selon la procédure de TAC. Ces cellules sont ensuite réinjectées aux patients après la déplétion lymphocytaire afin d’agir dans l’organisme.
Le professeur Tüting a également souligné que les approches adjuvantes et néoadjuvantes améliorent l’efficacité du traitement, mais que les cellules de mélanome peuvent toujours échapper à la reconnaissance immunitaire au cours de leur évolution. Notons qu’un traitement adjuvant précoce, par exemple avec le pembrolizumab, permet d’améliorer la survie des patients.
Il est important de noter que les cellules T CD4+ effectrices productrices d’IFN-g peuvent contribuer à l’immunité antitumorale ! Les cellules T CD4+ se groupent avec les cellules présentatrices d’antigènes aux marges invasives de la tumeur, où elles coopèrent avec les cellules immunitaires myéloïdes antitumorales activées par l’IFN pour éradiquer les mélanomes déficients en CMH qui échappent à la reconnaissance des cellules T CD8.
Le perfectionnement des techniques disponibles, leur maîtrise et l’introduction de nouvelles technologies (telles que les cellules T issues du génie génétique, les vaccins à ARNm), capables de surmonter la résistance aux immunothérapies bloquant les points de contrôle, constituent la prochaine mission importante à accomplir à l’avenir et semblent tout à fait réalistes pour la décennie actuelle, avec pour objectif de transformer le cancer en une maladie chronique.
Pr associé Georg Stary (Vienne, Autriche)
La deuxième conférence plénière de la journée, portant sur l’état actuel de la vaccination contre les IST a été donnée par le professeur Georg Stary, de Vienne (Autriche).
Les stratégies de prévention des IST présentées sont les suivantes : interventions comportementales (actions de sensibilisation, amélioration des connaissances), interventions structurelles (politiques, économiques et éducatives) et interventions biomédicales (PrEP/PEP, traitement préventif, vaccination prophylactique). En général, on attend des vaccins qu’ils induisent une mémoire immunologique. Il existe plus de 30 agents pathogènes à l’origine des IST. L’orateur a donné un aperçu concis, sous forme de graphique, des vaccins contre les IST. Le professeur Stary a souligné qu’en recherche fondamentale, il existe des vaccins contre trichomonas vaginalis, mycoplasma genitalium et treponema pallidum, en développement préclinique, Neisseria gonorrhoeae, en évaluation clinique, le virus herpès simplex, chlamydia trachomatis et le VIH, en pratique clinique, le HPV, le virus de l’hépatite B et le MPX. Les espèces mises en avant ont fait l’objet d’une présentation plus détaillée par l’orateur.
Point important : les vaccins administrés par la peau induisent des lymphocytes T mémoire dans les nœuds lymphatiques drainant et présentent malheureusement une faible migration vers les surfaces muqueuses. Il est essentiel de protéger les muqueuses, mais il existe peu de vaccins contre les agents pathogènes vivants atténués approuvés pour les muqueuses en raison de risques potentiels pour la sécurité.
L’orateur a également souligné la différence entre vaccins prophylactiques et vaccins thérapeutiques. Notons que dans les vaccins viraux prophylactiques, des anticorps neutralisants sont souvent utilisés, ce qui limite l’efficacité du vaccin contre certains agents pathogènes. Les vaccins viraux thérapeutiques ont principalement des effets immunitaires à médiation cellulaire et utilisent des cytokines dérivées des CTL et des lymphocytes T.
Le professeur Stary a présenté l’état actuel des vaccins contre le HPV, composés de particules pseudo-virales (PPv) HPV 16, 18, 31, 33, 45, 52 et 58 pour l’un et de HPV 6 et 11 pour l’autre. Les PPV sont une coquille vide (capsides virales) auto-assemblée à partir de la protéine majeure de la capside L1 (vaccins sous-unités L1). Ils sont hautement immunogènes et sûrs (absence de réplication et d’ADN viral). L’efficacité du vaccin peut atteindre 100 % contre les infections et les maladies causées par les types de vaccins. La protection est limitée au type et médiée par des anticorps neutralisants dirigés contre la protéine majeure de la capside L1.
Quatre ans après l’introduction du vaccin contre le HPV en Australie (vaccination des filles de 12 à 17 ans), l’incidence des verrues génitales a diminué de 90 %. Point important : l’orateur a présenté un graphique très informatif illustrant la réduction prévue d’une cohorte correctement vaccinée, neutre sur le plan du genre et négative pour le HPV au cours de sa vie : diminution de 77 % de tous les cancers liés au HPV (femmes et hommes), 90 % de réduction du cancer du col de l’utérus, réduction de 80 % des précancers du col de l’utérus de haut grade et diminution de 90 % des verrues génitales (les deux/tous les sexes).
Le vaccin prophylactique de nouvelle génération contre le HPV devrait être basé sur des épitopes linéaires L2 N-terminaux. De tels vaccins induisent de faibles titres d’anticorps neutralisants et une neutralisation croisée des types de HPV in vitro et pourraient conférer une protection croisée in vivo. Les vaccins L2 auraient une immunogénicité accrue. L’orateur a détaillé les méthodes de laboratoire sophistiquées visant à améliorer l’immunogénicité. Il s’est ensuite concentré sur l’insertion génétique du peptide L2 RG1 dans L1 (VLP chimérique, en détail dans Schellenbcher 2009). Un tel vaccin, à savoir le vaccin RG1-VLP HPV, offrirait une protection aux types de muqueuses ainsi qu’aux types de peau à plus haut risque et à faible risque. Ce vaccin aurait une formulation à antigène unique, ce qui entraînerait une baisse des coûts de production. Son profil de sécurité serait similaire à celui des vaccins actuels. Actuellement, un programme prevent sous forme d’essai de phase I sur l’homme est prévu.
Des vaccins thérapeutiques contre le HPV sont actuellement en cours de développement pour le traitement des infections aux HPV existantes. Il existe plusieurs vaccins contre le HPV en cours d’essais cliniques afin d’évaluer leur sécurité et leur efficacité, parmi lesquels les vaccins à ARNm contre le HPV16 E6/E7, les vaccins à base de protéines, les vaccins à base de peptides, à base d’ADN, à virus recombinant et à base de cellules dendritiques.
La suite de la conférence portait sur l’état actuel des connaissances en matière de vaccination contre N. gonorrhoea. Il existe une menace croissante de résistance gonococcique aux antimicrobiens et cette observation a conduit à un regain d’intérêt pour les vaccins. L’OMS s’est fixé pour objectif de réduire l’incidence de la gonorrhée de 90 % d’ici à 2030. Dans les études précliniques sur des modèles murins pour les infections gonococciques, les vaccins suivants ont été utilisés : vaccins à vésicules de membrane externe gonococciques (OMV), vaccins à épitopes lipopolysaccharidiques, vaccins à sous-unités protéiques purifiées et vaccins à ADN/ARN. De nouveaux systèmes d’administration des vaccins ont également été étudiés et sont toujours à l’étude.
Une étude cas-témoins rétrospective menée en Nouvelle-Zélande sur l’efficacité d’un vaccin contre le méningocoque groupe B à base de vésicules de membrane externe utilisé contre la gonorrhée a été publiée dans Lancet en 2017. Elle comprenait 1430 personnes et l’efficacité du vaccin était estimée à 31 %. Actuellement, des essais multicentriques randomisés en double aveugle de phase 3, contrôlés par placebo, sont déjà en cours en Australie sur 730 participants, tandis que 2200 participants devraient être recrutés aux États-Unis. Il ne reste plus qu’à attendre les résultats.
La dernière partie de la conférence était axée sur Chlamydia trachomatis contre laquelle aucun vaccin n’est disponible actuellement. Historiquement, dans les années 1960 et 1970, des C. trachomatis atténuées ou inactivées ont été testées chez l’homme et les primates non humains. Cependant, ces vaccins ont induit une protection incomplète ou de courte durée et une inflammation post-vaccination plus grave. Les perspectives actuelles de vaccins à protéines et à ADN recombinants, en cours de développement préclinique, ont démontré une faible induction de l’immunité cellulaire et donc une protection partielle. Actuellement, des études sont menées sur les vaccins contre la chlamydia muqueuse à base de nanoparticules. Ils semblent présenter un modèle convaincant pour l’immunisation contre C. trachomatis. Ils expliquent également l’hyperinflammation (tolérance) post-vaccinale lors des essais cliniques. Ces vaccins offrent une protection muqueuse à distance. Il est important de noter que les lymphocytes T mémoire présents dans les tissus sont hautement protecteurs contre l’infection génitale à C. trachomatis.
Les récentes publications du groupe du professeur Frank Follmann ont démontré que l’administration sous-cutanée et intranasale simultanée du vaccin contre la chlamydia avec l’adjuvant CAF01 provoque des réponses IgA élevées et protectrices de Th1/Th17 dans le tractus génital. Le premier essai de phase 1 chez l’homme, randomisé, en double aveugle, contrôlé par placebo, publié dans Lancet Infect. Dis. en 2019, a démontré l’innocuité et l’immunogénicité du candidat vaccin contre la chlamydia CTH522 avec adjuvant de liposomes CAF01 ou d’hydroxyde d’aluminium. Nous sommes donc sur la bonne voie.
Dr Victoria P. Werth (Philadelphie, États-Unis)
La troisième conférence, portant sur les nouvelles connaissances et approches thérapeutiques dans le lupus érythémateux, a été présentée par le Dr Victoria Werth de Philadelphie, aux États-Unis. L’orateur a donné un aperçu de sa conférence en mettant l’accent sur les facteurs pesant sur les essais menés sur le lupus érythémateux cutané (LEC), des nouvelles connaissances sur sa pathogenèse et ses approches thérapeutiques.
Le Dr Werth a souligné les difficultés cliniques liées au processus de diagnostic approprié du LEC. La présentation clinique précoce peut être insuffisante à déterminer le sous-type concerné et il peut être difficile de différencier les cicatrices de la dyspigmentation. 20 % des patients présentent plus d’un sous-type de LEC. Les dermatomyosites amyopathiques (DM) sont souvent diagnostiquées à tort comme des LES. La biopsie cutanée échoue souvent à distinguer un LES d’une DM. Il est important de noter que les critères de Bohan et Peter nécessitent la présence d’une maladie musculaire pour poser un diagnostic de DM. L’orateur a démontré l’utilité clinique de l’indice de superficie et de gravité de la maladie du lupus érythémateux cutané (CLASI) (en détail dans Albrecht et Werth JID 2005, 125: 889). Cet indice présente une bonne fiabilité, une bonne réactivité et est en corrélation avec la qualité de vie spécifique de la peau (Skindex).
En ce qui concerne les nouvelles connaissances sur la pathogenèse du LEC, les interférons de type I, l’efficacité des médicaments ciblant les pDC et la production d’interférons de type I jouent un rôle important. Différents sous-ensembles cellulaires et signatures de cytokines dans le LEC sont associés à l’hétérogénéité de la réponse au traitement. Les pDC jouent un rôle essentiel dans la maladie chez de nombreux patients. L’augmentation des CD myéloïdes est en corrélation avec la réponse à la quinacrine.
Enfin, l’algorithme de traitement du LEC a été présenté et indiqué en première intention avec le glucocorticoïde topique (GKS), avant d’envisager le tacrolimus ou le pimécrolimus topique comme alternative à long terme au GKS ou dans les zones à la peau fine.
En cas de gravité ou d’étendue importante, on ajoute de l’hydroxychloroquine (<5 mg/kg de poids corporel, une fois par jour). En cas de réponse partielle ou inexistante, on ajoutera de la quinacrine (100 mg une fois par jour, PO). En l’absence de réponse à la quinacrine, on remplace l’hydroxychloroquine par la chloroquine (<2,3 mg/kg de poids corporel, une fois par jour, PO). Comprimés de 9250 mg, 4 à 7 jours par semaine (Borucki R et Werth VP, Arthritis Rheumatol. 2020:72: 1777-1785)
En cas d’absence de réponse, on envisagera d’ajouter de la dapsone (25 à 125 mg, une fois par jour, PO). Si toujours pas de réponse, on ajoute du méthotrexate (15 à 25 mg, une fois par semaine, PO ou IM) ou du mycophénolate mofétil (1,440 à 3,00 mg, une fois par jour, PO). Si toujours pas de réponse : on doit administrer du lénalidomide, un analogue de la thalidomide (5 à 10 mg, une fois par jour, PO). Méthotrexate (MTX) et mycophénolate mofétil (MMF) sont interchangeables ou basés sur les comorbidités du patient.
Le rituximab est une bonne option pour le LE bulleux réfractaire à la dapsone et aux stéroïdes oraux/médicaments immunosuppresseurs. Il convient cependant de noter que le rituximab peut induire un LED et un lupus érythémateux cutané subaigu (LECS) chez les patients atteints de LES.
En général, le traitement du LEC doit comprendre l’évitement du soleil, l’utilisation d’écrans solaires à large spectre, des vêtements de protection, l’arrêt des médicaments susceptibles d’exacerber la maladie, si possible, et l’arrêt définitif du tabac.
En ce qui concerne les médicaments systémiques, l’iberdomide est un nouveau ligand présentant une haute affinité avec la cereblon (CRBN) qui a été sélectionné car plus puissant que la thalidomide ou la lénalidomide. Autre option dans les essais cliniques : le bélimumab, un anticorps monoclonal anti-BlyS. Nouveaux médicaments ciblant la voie IFN : anifrolumab, litifilimab daxdilimab, deucravacitinib (inhibiteur de Tyk2).
En conclusion, il est évident que des essais cliniques sur le LEC sont nécessaires afin de fournir aux patients un arsenal adéquat de médicaments efficaces.
Orateurs : Dr Mojca Bizjak, Dr Pavel Kolkhir, Pr Dr Emek Kocatürk Göncü, et Dr Clive Grattan
Compte rendu rédigé par Pr Anna Zalewska-Janowska
Dr Mojca Bizjak (Golnik, Slovénie)
La première conférence, portant sur les nouveautés en matière d’urticaire chronique inductible (CIndU), a été donnée par le Dr Mojca Bizjak de Golnik, en Slovénie.
Cette conférence avait pour objectif de présenter les sous-types de CIndU, l’approche pratique, les nouveautés et les besoins non satisfaits, le tout illustré par une expérience personnelle. Il toujours convient de préciser le sous-type de CIndU, car on identifie généralement un seul déclencheur, mais il est très rare d’en trouver deux ou plus. Les formes les plus fréquentes de CIndU sont :
Tous ces pourcentages se rapportent à l’ensemble du groupe CIndU. L’anamnèse détaillée est cruciale et un diagnostic de CIndU ne doit être posé que lorsque le test de provocation est positif. Il faut savoir que des stimuli externes peuvent exacerber l’évolution de l’urticaire chronique spontanée (UCS). Les patients soumis à des tests de provocation ne doivent pas prendre d’antihistaminiques pendant plus de 3 jours, ni de glucocorticoïdes pendant plus de 7 jours, et les sites de provocation ne doivent pas être affectés d’un wheals/angiœdème pendant plus d’1 jour (Maurer et al., Allergy 2019;74:2550-3). Il est recommandé d’utiliser un outil standardisé pour les tests de provocation lorsque c’est possible. Il n’existe pas de biomarqueur de l’activité de la maladie dans aucun des sous-types de CIndU. Le test de contrôle de l’urticaire (UCT) devrait être utilisé pour tous les sous-types.
En ce qui concerne les besoins non satisfaits, il existe peu de données sur l’évolution naturelle de la CIndU, les protocoles de provocation actuels échouent souvent à confirmer la CIndU, le bilan de laboratoire de routine est mal défini et il est nécessaire de trouver de nouvelles options thérapeutiques. Il reste donc de nombreux domaines à étudier.
Dr Pavel Kolkhir (Berlin, Allemagne)
La deuxième conférence, portant sur les biomarqueurs pertinents dans l’urticaire chronique, a été donnée par le Dr Pavel Kolkhir de Berlin, en Allemagne.
La définition brève de ce qu’est un biomarqueur, telle que présentée par l’orateur, est la suivante : « caractéristique objective et quantifiable d’un processus biologique ». Il existe actuellement plus de 300 publications portant sur les biomarqueurs dans l’urticaire chronique spontanée (UCS). Quant aux biomarqueurs permettant de prédire la durée de cette maladie solitaire, il n’en existe pas de vraiment fiables, mais il existe des preuves de la présence d’anticorps antithyroïdiens. Les caractéristiques associées à une durée plus longue de l’urticaire chronique (UC) sont les suivantes : gravité de l’UCS, urticaire chronique inductible (CIndU) concomitante, hypertension systémique et nécessité de plusieurs doses d’antihistaminiques par jour ou de traitements de deuxième intention. Aucun biomarqueur fiable ne permet de prédire l’activité de la maladie, mais il existe certaines preuves de niveaux accrus de D-dimères, F1+2, CRP, IL-6, MPV. Aucun biomarqueur fiable ne permet de prédire la récidive de l’UC, mais il existe des preuves de niveaux accrus d’IgE et d’anticorps anti-thyroperoxidase. Les caractéristiques associées à la récidive de l’UC sont les suivantes : étiologie inconnue de l’urticaire, présence d’asthme bronchique, utilisation d’autres agents et caractère réfractaire aux antihistaminiques. De plus, il n’existe pas de biomarqueur fiable en matière de diagnostic différentiel et d’identification des endotypes d’UCS.
Le test des basophiles positif constitue probablement le meilleur test unique pour diagnostiquer l’UCS auto-immune (UCSai). De faibles IgE totales et des IgG-anti-TPO élevées sont liées à l’UCSai. Les IgG-anti-TPO sont un marqueur de la thyroïdite auto-immune et tous les patients atteints d’UCS doivent être interrogés sur les signes et symptômes de la thyroïdite d’Hashimoto.
La CRP et les D-dimères sont corrélées et associées à une plus mauvaise réponse à une dose unique d’antihistaminiques. Des IgE totales faibles au départ sont associées à la non-réponse à l’omalizumab (OMA), tandis que des IgE totales élevées sont associées à une réponse positive et précoce à l’OMA. Un faible taux d’IgE totales à l’inclusion et un test des basophiles positif sont associés à une bonne réponse à la cyclosporine. Le Dr Kolkhir a conclu que les biomarqueurs suivants devraient être vérifiés chez tous les patients atteints d’UCS : CRP+/-ESR, nombres absolus de basophiles et d’éosinophiles, IgG anti-TPO et IgE totales. Chez certains patients sélectionnés, en revanche, il faut effectuer des tests de basophiles afin de vérifier la présence d’UCSai.
Pr Dr Emek Kocatürk Göncü (Istanbul, Turquie)
La troisième conférence, portant sur les nouveaux traitements de l’urticaire chronique, a été donnée par le Pr Emek Kocatürk Göncü d’Istanbul, en Turquie. Le présentateur a présenté les nombreux facteurs qui mènent à la dégranulation mastocytaire (MC) et libèrent un grand nombre de médiateurs différents, impliqués dans l’allergie, l’auto-allergie, l’auto-immunité, la cascade du complément, l’inflammation, la cascade de la coagulation, l’infection et l’inflammation neurogène. D’un point de vue clinique, l’algorithme de traitement conforme aux directives actuelles est le suivant : on démarre avec des anti-H1 de deuxième génération, à raison d’1 comprimé par jour et, si ce n’est pas efficace, on passe à 4 comprimés par jour avant d’ajouter l’omalizumab (OMA). S’il n’y a toujours aucun effet, on augmente l’OMA jusqu’à 600 mg et/ou on raccourcit les intervalles avant de passer à la cyclosporine et on continue les bloqueurs H1 de deuxième génération. Cependant, les traitements disponibles laissent encore 15 à 30 % des patients sans contrôle de leur pathologie. L’orateur a évoqué les nombreuses options de traitement de l’UCS, notamment
D’autres options thérapeutiques sont également en cours de développement et des essais cliniques sont en cours afin de « convenir à tous » les patients et de les aider à combattre leur maladie selon une approche individualisée.
Dr Clive Grattan (Londres, Royaume-Uni)
La dernière conférence de la session portant sur la prise en charge de l’angiœdème sans urticaire, a été donnée par le Dr Clive Grattan de Londres, au Royaume-Uni. Le Dr Grattan a fait référence aux directives qui ont été publiées (Zuberbier et al., Allergy 2022;77:734-66, Maurer et al., WAO Journal 2022;15:1006-27). Il a donné des conseils sur la façon de distinguer un angiœdème bradykininergique d’un angiœdème histaminergique. L’angiœdème bradykininergique est d’apparition plus lente (quelques heures), il est douloureux, sans démangeaisons, les papules ne sont JAMAIS présentes. Dans l’angiœdème histaminique (HEA), les intestins, le visage et le larynx peuvent être affectés, dans les angiœdèmes induits par les IECA, le visage et l’oropharynx sont affectés. Le doute doit être levé chez les enfants ayant des antécédents familiaux d’angiœdème héréditaire (AOH) et ne répondant pas aux antihistaminiques, aux stéroïdes ou à l’adrénaline. L’angiœdème histaminergique apparaît rapidement (quelques minutes), peut démanger, avec présence possible de papules au début (souvent asymétriques), sans atteinte intestinale sauf en cas d’anaphylaxie, suffocation très rare sauf en cas d’anaphylaxie, répond aux antihistaminiques, aux stéroïdes ou à l’adrénaline. Les caractéristiques ci-dessus pourraient permettre de distinguer ces deux entités et de mettre en œuvre un traitement efficace.
Orateurs : Pr Sara Brown, Pr Knut Schäkel, Dr Clarisse Ganier, et Dr Fernando Larcher
Compte rendu rédigé par Pr Anna Zalewska-Janowska
Cette année, la session de l’ESDR (European Society for Dermartological Research) était consacrée à la dermatite atopique, aux monocytes non classiques dans l’inflammation cutanée, au carcinome basocellulaire et aux génodermatoses.
Pr Sara Brown (Édimbourg, Royaume-Uni)
Lors de la session concernant l’application de la GWAS (étude d’association pangénomique) dans la prise en charge des patients, le premier exposé était présenté par le professeur Sara Brown d’Édimbourg, au Royaume-Uni. Cette dernière abordait une question délicate : l’utilité des analyses génétiques dans la pratique clinique, plus particulièrement dans le domaine de la dermatite atopique. Une méta-analyse multi-ascendance portant sur 1 086 394 individus a montré que la barrière cutanée (complexe de différenciation épidermique comprenant de la filaggrine) et le système immunitaire (cluster cytokinique IL-4, IL-13) jouent un rôle tout aussi important dans la pathogénie de la DA et doivent tous deux être inclus dans le traitement. Par ailleurs, si la peau est très importante en ce qui concerne l’expression des gènes de la DA, il est possible que le sang soit encore plus important au vu du signal très puissant émis par ce dernier, comme observé dans le cadre des études. Il convient d’en tenir compte dans la pratique clinique. Parallèlement, le Pr Brown a souligné que l’épidémiologie observationnelle montre une association entre l’obésité et les maladies de peau inflammatoires. Néanmoins, on ignore s’il existe un lien de cause à effet. Or ces connaissances sont importantes lorsqu’il s’agit de traiter les patients. Pour étudier ce processus d’association / de lien de cause à effet, le Pr Brown a brièvement présenté la technique de la randomisation mendélienne, qui est semblable à un essai comparatif randomisé. Parce qu’elle utilise la définition génétique de l’exposition, la randomisation mendélienne réduit le risque de données équivoques et de lien de cause à effet inversé. Cette technique étudie le résultat final, mais nécessite de connaître les facteurs génétiques que la GWAS permet de mettre en évidence. Ces études ont montré qu’un IMC supérieur augmente le risque d’eczéma, de 2 % pour chaque tranche de 1 kg/m2 au niveau de l’IMC. L’analyse de l’effet inversé n’a montré aucun lien de cause à effet entre l’eczéma et l’IMC. En quoi ces données peuvent-elles aider nos patients ? L’eczéma est un argument supplémentaire pour inciter les patients à perdre du poids, tandis que le traitement agressif de l’eczéma afin de faire baisser l’IMC n’est pas justifié.
Pr Knut Schäkel (Heidelberg, Allemagne)
Le professeur Knut Schäkel d’Heidelberg, en Allemagne, a présenté un exposé concernant les monocytes non classiques dans l’inflammation cutanée. Il a tout d’abord passé en revue le large éventail des fonctions assurées par les monocytes dans de nombreux processus, comme la présentation des antigènes, la réparation tissulaire, l’immunité adaptative, la monopoïèse d’urgence, l’inflammation, les patrouilles et le réservoir tissulaire. Chez l’homme, il existe 3 types de monocytes : les monocytes classiques CD14+CD16- et CD14+ CD16+ intermédiaires (iM) ; et les monocytes non classiques, CD14dimCD16+, à partir desquels il est possible de différencier les monocytes 6-sulfo LacNAc (slan)+. En quoi ces connaissances sont-elles importantes ? Les monocytes non classiques possèdent une capacité pro-inflammatoire élevée et sont présents dans différentes maladies inflammatoires de la peau. Ils possèdent également une capacité unique à traiter les immunoglobulines en complexes. Enfin, il faut savoir que les complexes immunitaires immobilisés induisent une migration directionnelle des monocytes non classiques. À noter qu’en cas de psoriasis, les monocytes non classiques forment un sous-ensemble IL23+ TNF-alpha+ qui est inflammatoire sur le plan dermique. Ils affichent une réponse élevée aux ligands de TLR7/8 et ont une capacité élevée à induire une réponse des lymphocytes Th17/Th1. Le Pr Schäkel a présenté une diapositive très prometteuse concernant plusieurs affections : psoriasis, dermatite atopique, glomérulonéphrite lupique, lupus érythémateux, sclérose en plaques, maladie de Crohn, VIH, carcinomes, carcinome à cellules rénales et lymphome diffus à grandes cellules B. Cette diapositive montrait la localisation et le rôle potentiel des monocytes slan+ dans l’évolution de ces maladies.
Dr Clarisse Ganier (Londres, Royaume-Uni)
Le Dr Clarisse Ganier de Londres, au Royaume-Uni, a présenté la cartographie précise des états cellulaires dans divers sites d’une peau humaine en bonne santé et dans le carcinome basocellulaire (CBC). Le Dr Ganier a tout d’abord présenté l’immense projet Human Cell Atlas (https://www.humancellatlas.org). Autre lien à consulter : https://cellgeni.cog.sanger.ac.uk/browser.html. Ce projet a pour mission de créer des cartographies de référence complètes de toutes les cellules humaines afin de comprendre la santé humaine et d’appuyer le diagnostic, le suivi et le traitement des maladies. Le Dr Ganier a montré de nombreuses images très impressionnantes de cellules dans différentes parties anatomiques du tissu cancéreux. En conclusion, le Dr Ganier a expliqué qu’en associant le profil transcriptionnel de chaque cellule, la transcriptomique globale et le séquençage in situ ciblé, le groupe a pu décrire un atlas des populations de cellules dans plusieurs localisations de la peau humaine en bonne santé et dans le CBC. À noter que les cellules épithéliales et mésenchymateuses sont présentes dans des zones limitées de la peau. Par ailleurs, les populations de cellules sont conservées entre les sites anatomiques et le CBC. Les fibroblastes POSTN+, qui se trouvent près des follicules pileux, sont étendus en cas de CBC. Enfin, le profilage spécial et l’analyse des lignées cellulaires in silico confirment l’origine folliculaire du CBC. À l’avenir, les fibroblastes associés au cancer dans l’évolution des tumeurs et l’invasion des cancers de la peau non mélanomes devraient être davantage étudiés.
Dr Fernando Larcher (Madrid, Espagne)
Le dernier exposé de cette session, consacré aux approches thérapeutiques reposant sur l’édition du génome selon la technique CRISPR/Cas face aux génordermatoses (GE), était présenté par le Dr Fernand Larcher de Madrid, en Espagne. Parmi un groupe d’environ 6 000 à 7 000 maladies rares figuraient plus de 300 génodermatoses, dont des troubles de la kératinisation / cornification (par exemple, des ichtyoses), une fragilité de la peau (par exemple, l’épidermolyse bulleuse), des troubles de la réparation de l’ADN (par exemple, le xeroderma pigmentosum), des troubles de la pigmentation (par exemple, l’albinisme), des dysplasies ectodermiques et des troubles du collagène.
L’édition du génome est un type de thérapie génique élaborée pour le traitement des génodermatoses. Cette technique consiste à réparer ou remplacer un gène muté au niveau de la cellule à l’aide d’outils spéciaux. Ainsi, l’expression protéique est rétablie, suivie d’un phénotype normal. Il faut savoir que l’expression génique ne dépend pas du nombre de copies d’un vecteur donné, si bien qu’il n’existe aucun risque de mutagenèse par insertion.
Plusieurs génordermatoses se prêtent à l’édition du génome par CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeat) / Cas (protéine associée au CRISPR). Les outils d’édition du génome sont de plus en plus nombreux et permettent une manipulation très précise et diverse des gènes. Lorsqu’elles ont été appliquées aux kératinocytes, des stratégies d’édition du génome, comme la jonction d’extrémités non homologues (NEHJ), la recombinaison homologue (HDR) et l’édition de base, ont montré une efficacité élevée, comparable aux stratégies d’ajout de gènes conventionnelles. L’aspect non viral de ces méthodes d’édition du génome devrait faciliter leur application dans la pratique clinique. À noter que les Cas (systèmes de protéines associés au CRISPR) génèrent une cassure double brin hautement spécifique au niveau du site cible, qui peut ensuite être réparé par NHEJ.
Un essai clinique a été lancé concernant l’édition du génome dans l’épidermolyse bulleuse dystrophique récessive (EBDR) à l’aide d’une peau autologue soumise à une bio-ingénierie. Cette peau contient des kératinocytes du patient et des fibroblastes modifiés par une méthode CRISPR/Cas9 non virale, via l’excision précise de la mutation au niveau de COL7A1 exon 80". Cette peau doit être greffée sur une surface cutanée limitée, au niveau des plaies choniques du patient. Cet essai devrait être mené en 2024.
À l’avenir, des systèmes de mise en œuvre efficaces seront nécessaires pour permettre une édition du génome cliniquement pertinente in vivo, approche qui est très prometteuse face aux génodermatoses. À l’heure actuelle, l’EBDR et la pachyonychie congénitale sont les deux pathologies face auxquelles cette approche thérapeutique est la plus avancée.
Orateurs : Pr Sophia Karagiannis, Pr Rolland Gyulai, Dr Karoline Krause, et Pr Christoph Schlapbach
Compte rendu rédigé par Pr Anna Zalewska-Janowska
Pr Sophia Karagiannis (Londres, Royaume-Uni)
Le professeur Sophia Karagiannis de Londres, au Royaume-Uni, a présenté l’immunologie anti-tumorale et le fondement de l’immunothérapie. Les objectifs de cet exposé étaient les suivants : les anticorps et leur activité anti-tumorale (isotypes d’anticorps, mécanismes d’action des anticorps et action anticancéreuse) ; l’influence du mélanome sur les lymphocytes B infiltrant les tumeurs ainsi que les anticorps exprimés ; et un exemple d’avancée thérapeutique utilisant les anticorps pour activer les réponses immunitaires.
Pour ce qui est des mécanismes d’action des anticorps contre le cancer, il est possible de distinguer les effets suivants : attaque directe des fonctions via le fragment FAB qui inhibe les récepteurs des facteurs de croissance ; arrêt de la prolifération des cellules tumorales ; induction d’une apoptose. Ces anticorps monoclonaux peuvent être munis de toxines, de cytokines ou de radio-isotopes pour renforcer leur action anti-tumorale. Parmi les autres mécanismes d’action, la cytotoxicité dépendante des anticorps (ADCC) recrute des cellules tueuses naturelles (NK), des monocytes, des éosinophiles et des macrophages pour tuer les cellules cancéreuses. La phagocytose à médiation cellulaire dépendante des anticorps (ADCP) est accomplie par les monocytes et les macrophages, tandis que la cytotoxicité dépendante du complément initie une cascade du système du complément avec le complexe d’attaque membranaire. Enfin, la lyse cellulaire participe également à l’activité anti-tumorale. Autre mécanisme d’action, l’inhibition des points de contrôle (c’est-à-dire le PD-L1) au niveau des cellules tumorales utilise la protéine PD-1 présente sur les lymphocytes T. C’est par exemple le cas du nivolumab.
L’intervenante a souligné que le micro-environnement tumoral peut influencer la réponse des anticorps en cas de mélanome ; il est possible que les lymphocytes B présents autour du mélanome fassent partie de la surveillance immunitaire cutanée. Chez les patients atteints d’un mélanome, les lymphocytes B présentent une expression d’IgG favorable aux isotypes IgG4 modulateurs. Or l’IgG4 ne parvient pas à activer les cellules effectrices, nuisant ainsi peut-être à la fonction anti-tumorale des anticorps IgG1 cytotoxiques in vivo.
Dans la pratique clinique, il existe un large arsenal d’anticorps monoclonaux face au cancer, arsenal qui était présenté sous la forme d’un tableau très complet. La grande majorité des anticorps monoclonaux appartient aux IgG1 ; les IgG2 et IgG4 représentent respectivement un seul anticorps (le nivolumab et le pembrolizumab, anti-PD1 approuvés en traitement du mélanome en 2014).
L’immunité humorale fait partie de la surveillance immunitaire faire au mélanome. Les lymphocytes B associés à la tumeur présentent un phénotype altéré. L’inflammation associée à la tumeur favorise un changement de classe au profit des isotypes modulateurs, comme l’IgG4 (troubles de l’activation des cellules immunitaires et de leurs fonctions effectrices, troubles des fonctions de l’IgG1, lien avec le risque d’évolution du mélanome). Les chercheurs élaborent des traitements nouveaux reposant sur des anticorps dont la région Fc est moins sensible aux mécanismes modulateurs des tumeurs. L’IgE anti-tumorale s’avère prometteuse face aux systèmes disparates des cancers. La réponse immunitaire des lymphocytes B pourrait éclairer la conception des traitements à base d’anticorps.
À la fin de son exposé, l’intervenante a posé 3 questions très importantes à l’assistance, de manière à présenter des informations cruciales. Elle a une nouvelle fois insisté sur le fait que les anticorps IgE pourraient représenter une option thérapeutique potentielle face aux tumeurs solides comme le mélanome. Les inhibiteurs des points de contrôle sont des anticorps monoclonaux qui ont été approuvés pour le traitement des mélanomes. Enfin, les anticorps anti-PD-1 ont pour fonction de contrer l’épuisement des lymphocytes T.
Pr Rolland Gyulai (Pécs, Hongrie)
La deuxième présentation de cette session était consacrée aux maladies de peau à médiation par les anticorps, par le professeur Rolland Gyulai de Pecs, en Hongrie. Au tout début de son intervention, le Pr Gyulai nous a promis qu’à l’issue de sa présentation, l’assistance serait à même de comprendre les types d’anticorps et leurs fonctions physiologiques, ainsi que les mécanismes potentiels par lesquels ils peuvent provoquer des maladies de peau. Il prévoyait également de nous expliquer comment reconnaître les grands groupes de maladies de peau à médiation par les anticorps et comment rationaliser le diagnostic et les approches thérapeutiques face à ces maladies.
Cette présentation très dense qui expliquait les phénomènes immunologiques au moyen de nombreux schémas, était complétée par deux questions cliniques autour de cas de purpura rhumatoïde et de dermatite herpétiforme.
Les messages à retenir étaient les suivants : la formation des anticorps repose sur des processus à la fois physiologiques et pathologiques ; elle peut cibler des antigènes étrangers ou présents dans le corps du patient et peut entraîner la formation d’une seule ou plusieurs classes d’immunoglobulines. Ensuite, les anticorps provoquent souvent des réactions de type I (immédiates) et III (complexe immunitaire). Troisièmement, le diagnostic des maladies de peau à médiation par les anticorps est compliqué et nécessite de détecter les immunoglobulines présentes dans la peau et dans le sang (tableau clinique, immunohistologie, sérologie et tests in vivo). Enfin, pour ce qui est de l’approche thérapeutique face aux maladies à médiation par les anticorps, il est recommandé d’inclure une déplétion des lymphocytes B (corticoïdes, anticorps monoclonaux anti-CD20 [rituximab, ofatumumab], inhibiteurs de BAFF [ianalumab], CAR-T cells), une déplétion des anticorps (corticoïdes, omalizumab [anti-IgE], efgartigimod [antagoniste des récepteurs Fc néonatals], IgIV, plasmapherèse) et une réduction de l’inflammation tissulaire (corticoïdes locaux et systémiques, azathioprine, acide mycophénolique, cyclophosphamide, déplétion des cytokines [anti-IL-17, anti-IL-23, anti-IL-6], anti-TNF, anticorps monoclonaux et anti-histaminiques).
Dr Karoline Krause (Berlin, Allemagne)
Le Dr Karoline Krause de Berlin, en Allemagne, a présenté un exposé concernant l’auto-inflammation et les maladies de peau neutrophiliques. Les objectifs pédagogiques étaient le spectre et le concept des maladies auto-inflammatoires, le phénotype de certaines maladies auto-inflammatoires et neutrophiliques, et les mécanismes sous-jacents de l’inflammation cutanée. L’intervenante a insisté sur le fait que l’auto-inflammation et l’auto-immunité font partie du spectre des maladies immunologiques de la peau, tandis que les dematoses neutrophiliques sont des maladies inflammatoires chroniques de la peau caractérisées par des infiltrats cutanés à dominante neutrophilique et associées à une maladie systémique. Elle a présenté la classification de certaines maladies auto-inflammatoires systémiques : monogéniques (par exemple, FMF, TRAPS, CAPS, DIRA), multifactorielles acquises (par exemple, MSA, PFAPA, syndrome de Schnitzler, maladie de Behçet), maladies courantes comportant des aspects auto-inflammatoires (par exemple, goutte, diabète, Alzheimer, insuffisance cardiaque) et maladies à médiation immunitaire (par exemple, PRAAS, PLACID) (voir Bolukbasi and Krause, Clinical Dermatol 2015).
Les messages à retenir étaient les suivants : la dermatose neutrophilique est un signe typique de maladie auto-inflammatoire monogénique et polygénique. Ensuite, les analyses diagnostiques (marqueurs de l’inflammation, biopsie cutanée et tests génétiques) sont essentielles pour poser le bon diagnostic. Enfin, les pièges extracellulaires des neutrophiles (NET) contribuent à l’inflammation cutanée et systémique dans le cadre des dermatoses neutrophiliques. Deux questions intéressantes ont été posées aux participants. La première indiquait qu’il convient de suspecter une dermatose urticarienne neutrophilique en présence des symptômes suivants : papules non prurigineuses, sueurs froides et températures subfébriles, arthralgie et asthénie. La seconde portait sur le spectre des dermatoses neutrophiliques, auxquelles appartiennent le syndrome de Schnitzler, le pyoderma gangrenosum et le syndrome de Sweet, mais pas la sclérodermie systémique.
Pr Christoph Schlapbach (Berne, Suisse)
Le dernier exposé de cette session était présenté par le professeur Christoph Schlapbach de Berne, en Suisse. Il portait sur les maladies inflammatoires chroniques de la peau à médiation lymphocytaire T et sur le lymphome T cutané. Pour mettre l’assistance dans l’ambiance, l’intervenant a montré le cliché clinique d’une aisselle présentant une lésion érythémateuse. Lorsqu’il a demandé un diagnostic, les réponses citées étaient les suivantes : dermatite de contact allergique, dermatite atopique (DA), psoriasis inversé, intertrigo et mycosis fongoïde. En sachant quel était le titre de cet exposé, l’intervenant souhaitait montrer un mycosis fongoïde dans une localisation atypique. Il a ensuite demandé quel type de cellule est le principal moteur du lymphome T cutané, entre les kératinocytes, les cellules dendritiques, les lymphocytes T, les fibroblastes et « C’est difficile à dire ». 78 % des participants ont choisi les lymphocytes T. Dans la DA, 47 % des participants ont choisi les lymphocytes T.
L’intervenant s’est attaché à comparer les maladies inflammatoires de la peau et le lymphome T cutané, à la fois sur les plans clinique et histopathologique. Il a également examiné le profil génétique et l’inflammation chronique de la peau dans ces deux groupes de maladies. En cas de psoriasis et de dermatite atopique, en ce qui concerne les voies de signalisation des cytokines, une variation génétique de STAT3 et STAT5 est observée. En cas de lymphome T cutané, des mutations de la signalisation des cytokines au niveau de STAT3 et STAT5 sont observées. Pour ce qui est de la signalisation des récepteurs des lymphocytes T / la voie NF-kB, des variants sont observés au niveau des gènes CARD11 et TNFAIP3 en cas de psoriasis et DA, tandis qu’une mutation de CARD11 et TNFAIP3 est observée en cas de lymphome T cutané. À noter que plus la DA est sévère, plus le risque de lymphome T cutané augmente. Il convient de s’en souvenir dans la pratique clinique.
À la fin de son exposé, l’intervenant a de nouveau interrogé l’assistance concernant le principal moteur cellulaire de la DA, entre les kératinocytes, les cellules dendritiques, les lymphocytes T, les fibroblastes et « C’est difficile à dire ». Il était satisfait de constater que 69 % des participants choisissaient les lymphocytes T.
Orateurs : Pr Eli Sprecher, Dr Lucinda Claire Fuller, et Pr Axel Hauschild
Compte rendu rédigé par Pr Anna Zalewska-Janowska
Pr Eli Sprecher (Tel Aviv, Israël)
Premier intervenant prévu au programme, le professeur Eli Sprecher, d’Israël, était absent en raison de la guerre qui a éclaté dans son pays.
Dr Lucinda Claire Fuller (Londres, Royaume-Uni)
Deuxième intervenante de cette session, le Dr Claire Fuller de Londres, au Royaume-Uni, s’est demandé comment exploiter l’impact et l’influence de la dermatologie sur la scène de la santé internationale. Le Dr Fuller préside l’International Foundation of Dermatology. Sa présentation était axée sur les difficultés et priorités suivantes en matière de santé mondiale : la couverture santé universelle ; la dermatologie dans le domaine de la santé internationale ; les occasions d’accroître l’influence de notre spécialité à travers le monde ; les stratégies pour favoriser une peau en bonne santé pour tous, partout ; et la santé de la peau en tant qu’enjeu de santé mondiale. Cet exposé visait à informer les participants quant à la position de notre spécialité en matière de santé mondiale, tout en se demandant comment améliorer cette position afin d’être plus visibles et de nous faire entendre au mieux. Le Dr Fuller a souligné que nous devrions faire davantage de lobbying en faveur de la santé de la peau. Pour les organismes de l’OMS, la dermatologie se situe dans la sphère des maladies tropicales négligées (MTN). Il faut dire que les MTN devraient occuper une place importante dans la formation des dermatologues. Le Dr Fuller a présenté plusieurs projets entrepris par le groupe MTN pour rendre la dermatologie plus visible, plus accessible aux patients et donc plus proéminente à l’échelle mondiale. Le Dr Fuller a encouragé les dermatologues et l’EADV à soutenir les projets du groupe MTN et à s’impliquer avec énergie et engagement. Elle a par ailleurs invité tous les participants à intégrer la GLODERM, Alliance internationale pour la dermatologie dans la santé mondiale : https://www.gloderm.org/.
Pr Axel Hauschild (Kiel, Allemagne)
La dernière présentation, par le professeur Axel Hauschild de Kiel, en Allemagne, était consacrée à l’inhibition des points de contrôle immunitaires dans le cancer de la peau, méthode qui a remporté un prix Nobel. Le Pr Hauschild a passé en revue les avancées et les jalons franchis dans le traitement du mélanome. S’il est vrai que les inhibiteurs de BRAF induisent rapidement une réponse positive, confirmée par PET-scan, une résistance à ce traitement est apparue ces derniers mois. En conclusion, la survie globale des patients porteurs d’un mélanome s’est améliorée, mais pas autant que souhaité. La découverte d’inhibiteurs des points de contrôle anti-PD-1 au niveau des cellules tumorales a constitué une véritable avancée. Ainsi, les anticorps anti-PD-1 ont permis d’obtenir de très bons résultats. À l’heure actuelle, 20 maladies ont déjà été atténuées grâce à ces anticorps.
Le Pr Hauschild a par ailleurs souligné les très bons résultats produits par les néo-adjuvants. Ce type de traitement consiste à ne pas exciser immédiatement la tumeur, mais au contraire à attendre d’avoir administré plusieurs cycles d’immunothérapie. Cette stratégie permet d’activer de nombreux lymphocytes T, après quoi la tumeur est retirée par le chirurgien. L’immunothérapie est poursuivie et de nombreux lymphocytes T continuent de chercher les éventuelles cellules tumorales dans le corps. Ces néo-adjuvants sont beaucoup plus efficaces que des adjuvants seuls, c’est-à-dire une exérèse de la tumeur avant l’immunothérapie, auquel cas les lymphocytes T sont à la fois moins nombreux et moins variés, ce qui entraîne un traitement beaucoup moins efficace.
En ce qui concerne l’immunothérapie (néo-)adjuvante : l’administration de pembrolizumab avant la chirurgie permet une survie bien supérieure en cas de mélanome, de 80 %, contre 50 % avec un traitement adjuvant (c’est-à-dire une immunothérapie après la chirurgie). Il s’agit là d’une avancée énorme quand on se souvient qu’il y a 8 ans, la survie moyenne en cas de mélanome était de 8 mois.
Des événements indésirables à court et à long terme d’ordre immunitaire et associés à l’immunothérapie ont été observés chez 2 à 4 % des patients. L’intervenant a rappelé que les événements auto-immuns qui surviennent après la mise en place de l’immunothérapie sont liés à la réussite du traitement. Il convient de bien l’expliquer aux patients. Par ailleurs, la réussite a un prix. Ceci dit, plus les patients sont âgés, plus le traitement est bien toléré.
Parallèlement, le Pr Hauschild a évoqué la « toxicité financière », à savoir la non disponibilité des traitements en raison de leur coût élevé.
L’ensemble de la présentation était très joliment illustré au moyen de clichés cliniques impressionnants, montrant les résultats merveilleux de néo-adjuvants comme l’avélumab (anticorps anti-PD-1) sur des métastases de carcinome à cellules de Merkel, sans intervention chirurgicale.
À noter que les anticorps anti-PD-1 sont systématiquement utilisés comme pierre angulaire d’une association thérapeutique. La transplantation de microbiote fécal et les vaccins à ARNm néo-antigène personnalisés ont également été évoqués en ce qui concerne les mélanomes. D’ailleurs, cette année, le prix Nobel a été décerné à la technologie de vaccination à ARNm.
Lors des questions-réponses, le Pr Hauschild a rappelé que les thérapies ciblées sont excellentes en deuxième ligne après un échec des inhibiteurs des points de contrôle, puisque la survie est inférieure de 25 %. Néanmoins, les thérapies ciblées sont efficaces uniquement en cas de mutation de BRAF (40 % des patients atteints d’un MM). Dans le cas contraire, ces traitements sont inefficaces, faute de cible.
Orateurs : Pr Muzlifah Haniffa, Pr Christine Bodemer, et Dr Andrew F. Alexis
Compte rendu rédigé par Pr Anna Zalewska-Janowska
Pr Muzlifah Haniffa (Cambridge, Royaume-Uni)
Lors de la dernière journée du congrès de l’EADV, la première séance plénière était consacrée à l’ESDR et présentée par le professeur Muzlifah Haniffa de Cambridge, au Royaume-Uni. Cette présentation expliquait comment distinguer la peau saine de la peau inflammatoire à l’échelle unicellulaire. L’intervenante a succinctement présenté le projet d’atlas des cellules humaines, qu’elle a ensuite comparé au projet de génome humain achevé en 2003, surnommé « le livre de la vie » (http://www.genome.gov/genetics-glossary). En effet, un génome code l’ensemble des cellules du corps humain, à savoir environ 37 trillions de cellules.
La Pr Haniffa a ensuite présenté les concepts du séquençage unicellulaire, du profilage multiomique, de la transcriptomique spatiale et de l’atlas des cellules humaines, qui est en cours d’élaboration sous le titre de « livre des cellules ». À noter qu’à l’heure actuelle, cette initiative progresse rapidement (https://www.humancellatlas.org/join-hca/). Cet atlas a vocation à servir de guide et de plan pour la cartographie des troubles cutanés. Un carnet de route pour un atlas consensuel des cellules de la peau et la standardisation des données unicellulaires a été publié par Almet AA et al. dans le JID en 2023.
Fait important, cet atlas répertorie également les cellules cutanées prénatales dans le but de cartographier les maladies de peau pédiatriques, de comprendre la formation des poils et cheveux et le phénomène de cicatrisation sans tissu cicatriciel au premier trimestre (régénération), et de contribuer aux programmes de développement autour des maladies de peau. Cet atlas, qui doit servir de plan pour les modèles in vitro, est conçu pour fournir un accès équitable aux données (cycle d’obtention des données, bio-informatique), à leur analyse et à l’utilisation de logiciels de recherche. Un portail web multimodal a été créé (Horsfal et al. Nat Med 2023). À noter que cet atlas présente 3 modalités de séquençage unicellulaire de l’ARN, dont le séquençage in situ et la technologie de transcriptomique spatiale Visium, qui offre le tableau le plus avancé pour chaque problème étudié.
Pr Christine Bodemer (Paris, France)
Le deuxième exposé, dans le cadre de la séance plénière René Touraine, traitait de la mastocytose et des troubles mastocytaires chez l’enfant. Il était présenté par le professeur Christine Bodemer de Paris. Par définition, la mastocytose se caractérise par la prolifération clonale des mastocytes dans la peau ainsi que potentiellement dans divers tissus. Sa prévalence est de 1/20 000. Chez l’enfant, une rémission spontanée est généralement observée, tandis que chez l’adulte, des lésions non régressives restent présentes et les formes systémiques sont les plus fréquentes. D’après la Pr Bodemer, la mastocytose n’est pas la même maladie chez l’enfant et chez l’adulte. Chez l’adulte, la mastocytose est associée à des mutations de c-KIT qui entraînent une accumulation et une activation anormales des mastocytes. La mutation KIT D816V est présente chez 90 % des adultes porteurs d’une mastocytose, contre seulement 42,4 % des enfants. L’évolution et les facteurs pronostiques de régression ont été examinés par le groupe de recherche de la Pr Bodemer, sur la base de 272 enfants présentant une mastocytose (JACI, 2021). Résultat : une régression spontanée est observée dans plus de 80 % des cas. L’évolution en une forme agressive de sarcome est très rare et en moyenne, la régression commence à l’âge de 6 ans. L’apparition avant l’âge d’un an et l’absence de mutation KIT sont les facteurs pronostiques de régression. Concernant la prise en charge de la mastocytose chez l’enfant, l’intervenante a souligné qu’il n’existe aucun traitement systémique. Il est recommandé aux professionnels de santé de continuer à rassurer les parents quant à la nature bénigne de cette maladie (chez plus de 99 % des enfants), tout en évitant les facteurs déclenchant une dégranulation des mastocytes, comme les stimuli physiques et certains médicaments (aspirine, codéine, morphine, AINS). En présence d’antécédents d’anaphylaxie ou de mastocytose cutanée diffuse, il convient de donner aux patients une carte indiquant des instructions en cas d’urgence et un stylo auto-injecteur. En l’absence d’anaphylaxie sévère, les vaccins habituels peuvent être administrés. Le suivi clinique est à effectuer dans un premier temps tous les 6 mois, puis une fois par an. En cas de symptômes comme des problèmes de croissance, des douleurs, une diarrhée, des éruptions cutanées, un prurit, une sensation de malaise, etc., il est recommandé d’en chercher immédiatement la cause et d’agir en conséquence. Le traitement symptomatique suivant est recommandé : stéroïdes locaux (effet anti-prurigineux), antihistaminiques H1 (effet anti-prurigineux), antihistaminiques H2 (contre les brûlures d’estomac, la diarrhée et les allergies alimentaires), association d’antihistaminiques H1 et H2, antileucotriènes (montélukast) et enfin, omalizumab. Dans les formes sévères comme les cloques diffuses ou l’atteinte systémique : stéroïdes à une dose de 0,5 à 1,0 mg/kg/jour pendant des périodes courtes, imatinib (en présence de mutations pédiatriques), possibilité de mettre en place du sirolimus ou de la midostaurine en cas de mutation c-KIT D816.
La Pr Bodemer a aussi présenté le syndrome d’activation mastocytaire (SAMA), qui se caractérise uniquement par une anomalie qualitative des mastocytes et dont les critères de diagnostic ont été proposés par le prof. Valent en 2020. Le SAMA se divise entre :
En conclusion, la Pr Bodemer a convié les participants au 2e congrès mondial sur les maladies rares de la peau, du 12 au 14 juin 2024 à Paris (https://www.wcrsd.com/en/).
Dr Andrew F. Alexis (New York, États-Unis)
La dernière présentation de cette session était consacrée aux pièges en matière de diagnostic et traitement chez les peaux non blanches, par le Dr Andrew F. Alexis de New York, aux États-Unis L’intervenant a présenté les maladies dermatologiques les plus prévalentes parmi les peaux non blanches : les troubles de la pigmentation, les chéloïdes, les troubles du cuir chevelu / de la pilosité et les troubles multisystèmes, comme le montraient joliment des clichés cliniques. Il est important de noter que les actes reposant sur le laser / la lumière, les injections de corticoïdes et la cryothérapie à l’azote liquide ne présentent pas la même innocuité lorsqu’il s’agit des peaux non blanches. L’intervenant a par ailleurs souligné que comparativement aux patients blancs, chez les patients noirs, asiatiques et hispaniques, le psoriasis a un impact supérieur sur la qualité de vie liée à la santé, tel que mesuré par le DLQI.
Des lacunes considérables sont à déplorer en matière de sensibilisation, car les troubles dermatologiques continuent d’être enseignés du point de vue du tableau clinique chez les patients d’origine européenne. De fait, les études ont montré que 47 % des dermatologues jugent leur formation inadaptée lorsqu’il s’agit de diagnostiquer les patients à la peau non blanche. Or la méconnaissance des peaux sombres peut considérablement retarder le diagnostic, et donc le traitement.
Le Dr Alexis a présenté l’élaboration d’un atlas des zones eczémateuses et de l’index de sévérité chez divers types de peaux (Silverberg JI, Horeczko J, Alexis A, Dermatitis 2023).
Il a ensuite mis en évidence la difficulté suivante dans la classification de la peau : le type de peau et les origines ethniques des patients sont plus complexes que la simple couleur de peau telle qu’elle est perçue. Les suppositions reposant sur une évaluation visuelle de la couleur de peau peuvent déboucher sur des conclusions erronées. Enfin, il est important de diviser les populations entre les peaux blanches ou non blanches.
Pour terminer, le Dr Alexis a présenté une image de visage sur laquelle est indiquée la couleur de peau, le phototype d’après la classification de Fitzpatrick, le phototype d’après la pigmentation, les origines géographiques, l’ascendance génétique et le profil culturel / géographique. À l’issue de toutes ces explications, le visage de l’intervenant lui-même s’est affiché à l’écran. Ce dernier a souligné l’importance d’inclure les peaux non blanches dans les essais cliniques, tout en présentant l’idée d’équité médicale (Davies CM et al. JACI 2021). Le Dr Alexis a d’ailleurs invité les participants à intégrer la Skin of Color Society (https://skinofcolorsociety.org/membership-2/).
Orateurs : Pr Dr Rolf-Markus Szeimies, Dr Lidiya Todorova, Dr Peter Velthius, et Dr Emanuel Carvalheiro Marques
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Pr Dr Rolf-Markus Szeimies (Recklinghausen, Allemagne)
Cette session a été inaugurée par le Pr Dr Rolf-Markus Szeimies sur le thème du rajeunissement facial grâce à la thérapie photodynamique (PDT) en lumière du jour. Selon lui, la PDT exerce des effets directs sur l’épiderme, notamment une diminution de la rugosité cutanée et de l’aspect cireux du teint, un meilleur équilibre de l’architecture épidermique et une amélioration des modifications pigmentaires. Elle exerce également des effets cutanés indirects via l’induction de cytokines (IL-1, TNF-α, etc.), permettant de raffermir la peau, de réduire les ridules et l’érythème. Le photo-rajeunissement grâce à la PDT est la seule indication non oncologique présentant les niveaux de recommandation et de qualité de preuve (A1) les plus élevés, en dehors du traitement de la kératose actinique (KA), de la maladie de Bowen et du carcinome basocellulaire (CBC). Jusqu’à présent, il s’agit toujours d’une utilisation hors indication, notamment aux États-Unis.
Les résultats peuvent être optimisés par des stratégies de prétraitements :
Il faut des semaines, voire des mois, pour obtenir les résultats attendus avec la PDT en lumière du jour (amélioration du grain de peau, de la rugosité, des ridules, des télangiectasies, de la dépigmentation, de la rémission et de la prévention de la KA). Les effets indésirables sont tolérables et réversibles, quasiment sans douleur. En revanche, les attentes doivent être réalistes : seule une légère amélioration est à prévoir. D’autres protocoles thérapeutiques doivent être maintenus en cas de KA/CPNM au niveau de la zone ciblée.
Dr Lidiya Todorova (Plovdiv, Bulgarie)
Le Dr Lidiya Todorova a parlé de la sécurité et de l’efficacité du PRP. Elle a défini le PRP comme un volume de plasma autologue avec une concentration en plaquettes supérieure à la ligne de base (x3 à 7). Les principales limites sont liées à la quasi absence de consensus sur la grande variété de méthodologies disponibles, au manque de standardisation dans l’utilisation du PRP, aux variations potentielles de concentration et de qualité des plaquettes dans le PRP, à l’efficacité variable d’un patient à l’autre, aux les améliorations obtenues qui nécessitent plusieurs séances de traitement, au fil du temps, afin de maintenir les résultats. L’efficacité du PRP est liée aux facteurs de croissance libérés par les granules α des plaquettes, aux cytokines primaires (IL1, IL6, TNF-α), aux substances bioactives présentes dans les granules denses des plaquettes (sérotonine, histamine, dopamine, calcium et adénosine), à l’effet anti-inflammatoire et analgésique, aux peptides antimicrobiens.
Les facteurs de croissance stimulent la prolifération et la différenciation cellulaire, l’activation des fibroblastes, la synthèse du collagène, la granulation et la régénération des tissus, la néo-angiogenèse, la synthèse de la matrice extracellulaire (MEC), la synthèse protéique de novo, la croissance cellulaire, l’action antimicrobienne, la modulation inflammatoire. Ils favorisent la cicatrisation, la réparation des plaies et des tissus, la prolifération des follicules pileux, le rajeunissement de la peau, améliorent l’hyperpigmentation périorbitaire, le mélasma, les formes légères et modérées d’alopécie areata.
Le PRP est associé à un faible profil d’effets secondaires (produit autologue), aucun effet systémique, aucun rapport de réactions immunitaires d’allergies, aucun effet oncogène. La douleur liée à l’injection est modérée. Les effets indésirables rapportés sont liés à la réactivation HSV (virus de l'herpès simplex), comme toutes les interventions traumatiques. Une prophylaxie peut être envisagée. Il est contre-indiqué chez les patients atteints d’une maladie auto-immune active. Un cas de maladie sérique a été signalé après l’administration de PRP. Un cas de cécité permanente a été signalé après un traitement au PRP dans un établissement thermal.
Selon le Dr Todorova, le PRP est une méthode prometteuse et sûre, qui nécessite un protocole de préparation standardisé et des études bien conçues pour devenir un traitement de routine avec des indications claires en dermatologie.
Dr Peter Velthius (Rotterdam, Pays-Bas)
Le troisième conférencier, le Dr Peter Velthius, a évoqué l’intérêt de l’échographie pour améliorer la sécurité du traitement de comblement à l’acide hyaluronique. Selon lui, une puissance de 12 MHz est la condition de base pour une application cosmétique. Une ultra haute fréquence (>50 MHz) est indiquée pour une évaluation épidermique.
Grâce aux ultrasons, n’importe qui est capable de chercher n’importe quelle artère située au-dessus du muscle et de l’éviter (lèvres), et parfois de trouver une artère profonde dans l’espace de Ristow (3 % des patients). Selon le Dr Velthius, de nombreux œdèmes malaires sont causés par une compression des veines, détectable par échographie. La technique d’injection d’Arthur Swift n’est pas toujours sûre, mais les ultrasons peuvent permettre de localiser les artères. Il utilise également les ultrasons pour évaluer les nodules non inflammatoires, liés aux injections au niveau du système musculo-aponévrotique superficiel (SMAS). Cela peut également être un bon outil en cas de complications, pour les injections guidées de hyaluronidase.
D’après le Dr Velthius, l’imagerie par ultrasons à haute fréquence offre une nouvelle et formidable opportunité de mieux comprendre la peau et l’épiderme. Les découvertes liée à l’échographie améliorent déjà la pratique quotidienne en dermatologie esthétique. Des recherches plus approfondies contribueront à faire de la dermatologie esthétique une véritable science.
Dr Emanuel Carvalheiro Marques, PhD (Prague, République tchèque)
Pour finir, le Dr Emanuel Carvalheiro Marques a présenté les dernières avancées concernant les myomodulateurs, et a proposé de nouvelles indications prometteuses basées sur des publications récentes :
En ce qui concerne la durabilité de la BoNTA, des études récentes ont relancé la controverse sur l’efficacité des suppléments en zinc. L’une d’entre elles montre une augmentation d’environ 30 % de la durabilité du produit. Étant donné que 12 % des Américains présentent une carence en zinc et que l’activité protéolytique de la BoNTA dépend du zinc, une supplémentation en zinc (débutant 4 jours avant l’injection) peut s’avérer judicieuse pour certains groupes de patients. Gluconate de zinc 50 mg ou Citrate de zinc 50 mg + Phytase 3000 PU
En ce qui concerne l’immunorésistance, une étude récente suggère que le risque maximal de résistance à la BoNTA est d’environ 0,4 % (chez les patients ayant été exposés à la BoNTA pendant 6 ans au maximum), avec la classification suivante : ABO>ONA>INCO. Le panachage des marques peut augmenter les risques jusqu’à 13 %. Des doses plus élevées, des intervalles plus courts, une exposition globale plus importante au cours de la vie et la pureté de la formulation sont autant de facteurs pouvant être associés à l’immunorésistance. Injections intradermiques > injections intramusculaires (concentration plus élevée de cellules dendritiques).
Points forts des nouvelles thérapies :
Le choix de la toxine appropriée dépend de l’approbation, de la disponibilité, de la sécurité, des problèmes de résistance, du prix, de la préférence du patient et de la durée des effets thérapeutiques.
Orateurs : Pr Jerry Shapiro, Pr Dr Ulrike Blume-Peytavi, Pr Ramon Grimalt, et Dr Sergio Vaño-Galván
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Pr Jerry Shapiro (New York, États-Unis)
Sur le thème « Évaluation et diagnostic de l’alopécie cicatricielle », l’approche du Pr Jerry Shapiro consiste à :
À l’exception de l’AFF, une biopsie est généralement nécessaire pour tous les diagnostics. Il est indispensable de poser un diagnostic et de mettre en place un traitement précoce pour avoir une chance de préserver les follicules.
Pr Dr Ulrike Blume-Peytavi (Berlin, Allemagne)
Le Pr Ulrike Blume-Peytavi a parlé de la prise en charge de l’alopécie fibrosante frontale. Elle a commencé par rappeler les cinq piliers de l’approche thérapeutique :
Recommandations thérapeutiques actuelles :
Pr Ramon Grimalt (Terrassa, Espagne)
Le Pr Ramon Grimalt a évoqué l’intérêt du minoxidil oral à faible dose dans le traitement de l’alopécie androgénétique. Il a adopté une approche fondée sur des données probantes, en présentant une littérature récente et solide concernant l’utilisation du minoxidil à faible dose, et en montrant qu’il était difficile de trouver des publications fiables sur le syndrome post-finastéride. Il a précisé que seuls les patients concernés consultent un dermatologue pour le traitement de l’AGA et qu’ils ont tendance à être plus observateurs. Pour ce type de patients, tout problème de santé, sexuel ou non, pouvant apparaître en cours de traitement pourrait être attribué à tort au médicament. Les hommes préoccupés par la question ont tendance à « remarquer » avec plus de détails, et Internet et les journalistes n’agissent pas toujours comme il le faudrait. C’est pourquoi le Pr Grimalt ne prescrit pas de finastéride aux patients très préoccupés et utilise plutôt du minoxidil oral, avec des résultats visibles en 3 mois. Il commence par 1,5 mg/jour le soir, chez les femmes et 5 mg/jour le soir chez les hommes. Un contrôle est effectué après 3 mois et la posologie est ajustée en fonction de l’hypertrichose.
Dr Sergio Vaño-Galván, PhD (Madrid, Espagne)
Le Dr Sergio Vaño-Galván est ensuite intervenu, sur le thème des thérapies émergentes pour le traitement de l’alopécie androgénétique. Voici les points essentiels de sa présentation :
Pour l’AGA chez l’homme, il recommande le dutastéride 0,5 mg 3 à 7 fois par semaine, +/- minoxidil oral 2,5 à 5 mg par jour, +/- minoxidil topique 5 %, le soir.
Pour l’AGA chez la femme, il recommande le minoxidil oral 0,5 à 1 mg par jour, +/- minoxidil topique 5 %, la nuit, +/- médicaments antiandrogènes oraux (spironolactone ou bicalutamide en préménopause et dutastéride en postménopause).
D’autres traitements peuvent être envisagés en cas d’exception.
Orateurs : Dr Anna Waskiel-Burnat, Pr Dr Lidia Rudnicka, Pr Antonella Tosti, et Pr Bianca Maria Piraccini
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Dr Anna Waskiel-Burnat (Varsovie, Pologne)
Le Dr Anna Waskiel-Burnat a fait sa présentation sur le thème « Effluvium télogène : évaluation et traitement ». L’effluvium est considéré comme chronique lorsqu’il dure plus de 6 mois. Les antécédents suffisent parfois à poser le diagnostic, mais il est préférable d’effectuer un test de traction pour le confirmer. Ce test, consistant à retirer délicatement 40 à 60 cheveux, est considéré comme positif lorsque 10 % des cheveux sont extraits (patient ne s’étant pas lavé les cheveux pendant 5 jours). La trichoscopie permet d’exclure l’AGA (alopécie androgénétique) et l’AA (alopécie aréata). Elle peut révéler des follicules solitaires, des points jaunes. Le trichogramme peut être réalisé avec 20 à 60 cheveux, avec >20 à 25 % de cheveux télogènes. Pour établir le diagnostic, on recherche une cause sous-jacente (la principale), qui peut être décelée dans les antécédents ou par le biais de tests de laboratoire (plus pertinent dans les cas chroniques). Ces analyses doivent toujours comporter une numération sanguine complète, des tests de la fonction thyroïdienne, un profil ferrique et un taux de vitamine D. Si nécessaire, on pourra aussi effectuer des tests de la fonction hépatique et rénale, de la vitamine B12, B2, du zinc, du VIH (virus de l'immunodéficience), du VDRL (Laboratoire de recherche sur les maladies vénériennes), de l’ANA (Anticorps AntiNucléaires), de la prolactine et de la biotine. La plupart du temps, le traitement consiste simplement à expliquer la cause et l’évolution de la maladie. Autres traitements possibles :
Pr Dr Lidia Rudnicka (Varsovie, Pologne)
Le Pr Lidia Rudnicka a présenté un exposé sur la prise en charge de l’alopécie areata par trichoscopie. Il n’est pas possible de prédire la repousse des cheveux lors de la première consultation de trichoscopie, mais certains signes observés après la repousse peuvent être annonciateurs d’une perte de cheveux imminente, ce qui suggère qu’il n’est pas opportun de réduire les doses ou d’interrompre le traitement. Les marqueurs d’activité ou de réactivation de la maladie sont les suivants : cheveux en point d’exclamation, cheveux effilés, points noirs et constrictions de Pohl-Pinkus, cheveux cassés. Dans ce cas, il convient d’augmenter la dose ou d’envisager un second médicament. En revanche, les cheveux repoussant à la verticale et les cheveux en queue de cochon sont des marqueurs positifs. En tenant compte des marqueurs négatifs et positifs, il est possible d’établir un score prédictif qui indique les chances de repousse avec le traitement en cours. Attention à la trichoscopie dans l’AA (alopécie aréata) : l’absence de points jaunes n’exclut pas l’alopécie areata. Cela dépend de l’âge du patient et de la concentration des glandes sébacées. Attention à la tinea capitis : les signes de la trichoscopie disparaissent généralement avant que la culture soit déclarée négative !
Pr Antonella Tosti (Miami, États-Unis)
Le Pr Antonella Tosti a parlé de l’alopécie areata débutant après l’âge de 50 ans, autrement dit « l’alopécie areata d’apparition tardive ». Ce terme fait référence à la première apparition de la maladie et correspond à 7 à 18,7 % des cas. Plus fréquente chez les femmes, la maladie est généralement bénigne, les antécédents familiaux ne sont pas fréquents et le rapport avec la dermatite atopique n’est pas courant. Elle peut être déclenchée par des médicaments, la COVID-19, des vaccins, des anti-TNF, la ribavirine, l’interféron. La réponse au traitement est généralement bonne. Le pronostic est meilleur que dans les cas d’apparition précoce. L’AT (alopécie totale) et l’AU (alopécie universelle) ne suivent pas nécessairement cette règle générale. Elle affecte de préférence les cheveux pigmentés, mais épargnera les cheveux gris/blancs. Il est parfois difficile de la distinguer de l’alopécie cicatricielle, ce qui nécessite parfois une biopsie.
Pr Bianca Maria Piraccini (Bologne, Italie)
Le Pr Bianca Maria Piraccini a parlé de l’utilisation des inhibiteurs de JAK dans l’alopécie areata. Il existe 11 molécules, dont 2 seulement sont approuvées par la FDA pour le traitement de l’AA (Baricitnib, uniquement chez l’adulte, et Ritlecitnib, chez les patients de plus de 12 ans). La repousse des cheveux peut suivre différentes trajectoires : réponse précoce (12 semaines), progressive (24 semaines) ou tardive (>24 semaines). Les effets secondaires sont les mêmes pour tous les inhibiteurs de JAK. L’efficacité et la sécurité semblent similaires. Le choix dépend de l’âge du patient et de la disponibilité du médicament. La bonne indication est l’extension entre 50-95 %, les cas de longue durée répondant moins bien. Les patients doivent être suivis tous les 3 à 4 mois. L’efficacité est évaluée après 9 à 12 mois.
Orateurs : Dr Francesca Pampaloni, Dr Matilde Lorizzo, Pr Asja Prohic, et Pr Bertrand Richert
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Dr Francesca Pampaloni (Bologne, Italie)
Le Dr Francesca Pampaloni s’est exprimée sur le thème de la « Prise en charge des troubles unguéaux par onychoscopie ». Selon elle, l’onychoscopie devrait être utilisée systématiquement dans l’évaluation des affections de l’ongle. Elle peut être réalisée à l’aide d’un dermatoscope portatif, afin de visualiser l’ongle entier en une seule fois, ou à l’aide d’un vidéodermatoscope, qui autorise différents grossissements. Elle permet de mieux visualiser les signes cliniques au niveau de l’ongle. Dans certaines pathologies, elle enrichit le tableau clinique et permet de mettre en évidence des éléments évocateurs. Dans les maladies inflammatoires de l’ongle, l’onycholyse est le signe dermoscopique déterminant à rechercher dans le diagnostic différentiel par rapport à l’onychomycose. Il est important d’examiner le bord distal et les tissus périunguéaux. Ces informations doivent être rapprochées de l’examen clinique et de l’anamnèse.
Dr Matilde Lorizzo (Lugano, Suisse)
Le Dr Matilde Lorizzo était chargée des « Troubles unguéaux chez l’enfant », qui peuvent être héréditaires (à la naissance ou plus tard), congénitaux (dont certains peuvent être évités) ou acquis.
Pr Asja Prohic (Sarajevo, Bosnie-Herzégovine)
Le Pr Asja Prohic a présenté une « Mise à jour sur le traitement de l’onychomycose ». Les organismes pathogènes sont les dermatophytes (60 à 90 %), les moisissures non dermatophytes (10 %) et les levures (20 %). La guérison clinique complète comprend la guérison mycologique + la guérison clinique. Avant de commencer un traitement, il faut confirmer en laboratoire la présence d’une onychomycose, en raison du coût et afin d’éviter les erreurs de diagnostic. Les traitements oraux sont indiqués lorsque l’affection touche >50 % de l’ongle, plusieurs ongles (>3), la matrice de l’ongle, ou en cas de dermatophytome. La terbinafine, l’itraconazole et le fluconazole sont les traitements habituels. Parmi les nouveaux traitements oraux : le posaconazole, le fosravuconazole, l’otéséconazole, le voriconazole et l’albaconazole. Parmi les options topiques, l’amorolfine est associée à de meilleurs taux de guérison. Il est possible d’éviter les récidives en procédant à certaines modifications du mode de vie : garder les pieds au frais et au sec, éviter les chaussures occlusives, utiliser des tongs dans les lieux publics et humides, jeter ou laver les chaussettes à l’eau chaude, couper les ongles pour éviter les traumatismes, recourir à la prophylaxie pour les pieds et les tissus, traiter les membres de la famille atteints d’onychomycose ou de tinea pedis, utiliser un traitement approprié et suivre des conseils en matière d’observance, traiter les chaussures avec des antifongiques, de l’ozone, des UV.
Pr Bertrand Richert (Bruxelles, Belgique)
Le Pr Bertrand Richert est intervenu sur le thème « Trachyonychie : évaluation et plan de traitement ». La trachyonychie est liée à des altérations de surface causées par une inflammation de la matrice proximale. On distingue deux formes : opaque (stries longitudinales subtiles, écailles fines) et brillante (stries superficielles et petites piqûres géométriques). Le Pr Richert a rappelé que le terme « syndrome des 20 ongles » est incorrect, car il existe de nombreuses affections pouvant toucher les 20 ongles. Dans la trachyonychie, c’est toute la surface de l’ongle qui est concernée. Elle touche principalement les doigts et les orteils des enfants. Elle peut être associée à l’alopécie areata (AA), au lichen plan, au psoriasis ou être isolée (trachyonychie idiopathique). L’histologie constitue le seul moyen de connaître l’étiologie. Des publications récentes montrent qu’elle est plus fréquente chez les hommes (2/3), âgés en moyenne de 19 ans, qu’elle est idiopathique dans 55 %des cas et de type opaque dans 78 %, nombre d’ongles touchés : 8 doigts et 4 orteils. Atteinte des 20 ongles : 33 % (AA dans 70 %). Elle guérit d’elle-même (généralement >4 ans). La biopsie n’est pas recommandée chez l’enfant. Une crème à l’urée à 40 % et/ou une laque à l’hydroxypropylchitosan peuvent être indiquées. L’association calcipotriol/bétaméthasone dipropionate, corticostéroïde intralésionnel chez l’adulte, corticostéroïdes systémiques, rétinoïdes systémiques peut également être indiquée.
Orateurs : Dr Natalia Caballero Uribe, Pr Krisztián Gáspár, Dr Petra Dikrama, et Pr Adriana Rakowska
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Dr Natalia Caballero Uribe (Wallisellen, Suisse)
Le Dr Natalia Caballero Uribe a présenté l’« Algorithme diagnostique et thérapeutique dans la folliculite décalvante » :
Traitements proposés : shampooing au clorhexidingluconate 0,2 à 2 %, kétoconazole en cas de dermatite séborrhéique associée, corticostéroïdes topiques et antibiotiques topiques. Par voie orale : acide fusidique + gluconate de zinc, rifampicine + flucloxacilline, rifampicine + clindamycine, dapsone, isotrétinoïne. En phase lichénoïde chronique : corticostéroïdes intralésionnels + Doxycycline, excision à l’emporte-pièce ou par touffes de cheveux, excision d’indication totale avec utilisation d’expandeurs de cuir chevelu dans les cas extrêmes.
Pr associé Krisztián Gáspár (Debrecen, Hongrie)
Le Pr Kristián Gáspár a parlé du « Psoriasis du cuir chevelu », qu’il définit comme une affection courante. Jusqu’à 80 % des patients souffrant de psoriasis présentent une atteinte du cuir chevelu, une zone difficile à traiter, avec un prurit impliquant des médiateurs non histaminergiques. Résultats récents :
Dr Petra Dikrama (Utrecht, Pays-Bas)
Le Dr Petra Dikrama a proposé quelques « Trucs et astuces contre les démangeaisons du cuir chevelu ».
Causes les plus fréquentes : « SCALPP » : dermatite Séborrhéique, dermatite de Contact, Anxiété, Lichen plan pilaire, Poux, Psoriasis.
Les traitements locaux impliquent l’utilisation de glucocorticoïdes, d’inhibiteurs de la calcineurine, d’autres actifs (menthol, capsaïcine, LCD), de combinaisons (5 à 10 % de kétamine, 5 % d’amitriptyline, 5 % de lidocaïne, tacrolimus, gabapentine), de shampooings (zinc, kétoconazole, sélénium, goudron de houille), de photothérapie.
Des médicaments tels que les antihistaminiques, les anticonvulsivants, les opioïdes, les antidépresseurs, entre autres, peuvent également être utilisés pour traiter les démangeaisons du cuir chevelu.
Pr associée Adriana Rakowska (Varsovie, Pologne)
Le Pr Adriana Rakowska a parlé de l’acné, de l’hirsutisme et de la chute de cheveux, ainsi que des troubles à médiation androgénique. Les cas idiopathiques sont liés aux androgènes présents dans l’unité pilo-sébacée. Les cas ovariens sont les plus fréquents (2 à 7 % des femmes en âge de procréer), liés au SOPK (syndrome des ovaires polykystiques), anovulation ou oligoanovulation, hyperandrogénie clinique ou biochimique, morphologie ovarienne polykystique.
Hyperandrogénie biochimique (3ème au 7ème jour du cycle) : testostérone sérique totale, testostérone libre, indice d’androgène libre, androstènedione, dihydrotestostérone (DHT), déhydroépiandrostérone (DHEA), sulfate de DHEA (DHEA-S).
Important :
Les anomalies du glucose sont plus fréquentes chez les patientes atteints du syndrome SAHA (séborrhée, l'acné, l'hirsutisme et l'alopécie) : 21,4 % contre 7 % chez les patientes ne présentant aucune caractéristique clinique.
Le SOPK représente 70 à 80 % des cas d’hirsutisme.
Chez les jeunes patientes atteintes du SOPK, on observe plus d’acné (15 à 80 %) et d’hirsutisme (38 à 80 %) que de calvitie féminine (2 à 24 %). Après 30 ans, la chute de cheveux est la caractéristique la plus importante.
La pilule contraceptive orale entraîne une suppression de la production ovarienne d’androgènes. La drospirénone possède 30 % du pouvoir anti-androgène de l’acétate de cyprotérone.
La dexaméthasone à faible dose est le traitement de l’hyperplasie congénitale des surrénales non classique.
Le traitement de l’hirsutisme peut être assuré par Flutamide + Finastéride (réduction de 70 %), Spironolactone + Finastéride (réduction de 53 %), ou Spironolactone (réduction de 30 %).
La chute de cheveux chez la femme (FPHL) n’est généralement pas associée à un taux élevé d’androgènes. Il existe une sensibilité accrue aux niveaux normaux d’androgènes, l’hyperandrogénisme en lui-même ne provoque pas nécessairement une FPHL.
Le Dr Rakowska a conclu sa présentation en proposant le terme de syndrome SAH plutôt que SAHA, car le FPHL n’est pas un signe d’hyperandrogénisme.
Orateurs : Dr Hugues Cartier, Dr Luigi Leonardo Polla, Dr Pierre André, et Dr Peter Velthuis
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Dr Hugues Cartier (Arras, France)
À propos de l’« Anatomie des zones du visage les plus risquées en cas d’injections », le Dr Hugues Cartier considère que l’échographie change véritablement la donne en matière de sécurité des injections, grâce à la cartographie en temps réel des vaisseaux et à la visualisation des couches situées sous la peau. Selon lui, les ultrasons permettent de localiser et d’évaluer les produits de comblement et de les retirer sous contrôle si nécessaire. Ils permettent de surveiller les effets secondaires (migration, formation de loges, abcès, adénites et pathologies granulomateuses). L’utilisation de l’échographie permet aux praticiens d’éviter la technique classique à l’aveugle « profonde » ou « superficielle » pour garantir la sécurité des patients. En ce qui concerne les injections de BoNT (neurotoxine botulique), le Dr Cartier estime que l’évaluation par échographie fournit des informations sur le mouvement dynamique des muscles faciaux et sur l’application clinique de la BoNT. Elle permet également aux cliniciens de comprendre le mouvement des muscles et d’obtenir de meilleurs résultats en tenant compte de la relation avec les muscles environnants. En outre, il est essentiel de disposer d’informations anatomiques détaillées sur les muscles faciaux afin d’optimiser l’efficacité du traitement par BoNT.
Dr Luigi Leonardo Polla (Genève, Suisse)
Sur le thème « Rhinoplastie médicale : pour un résultat optimal sans complication », le Dr Luigi Leonardo Polla a expliqué qu’il s’agissait d’une procédure très populaire que les patients apprécient et qui s’avère efficace. Il s’agit par ailleurs de la deuxième cause la plus fréquente de nécrose cutanée et de cécité. Les risques ne doivent donc pas être négligés. Selon le Dr Polla, les cliniciens doivent tout d’abord connaître l’anatomie, réaliser les interventions sous la supervision d’un pair expérimenté et commencer par une rhinoplastie primaire, et ce afin d’améliorer la sécurité. Dans le même souci, ils doivent également planifier et concevoir la procédure, recourir à une technique rigoureuse, injecter lentement de façon constante, contrôler la zone et ne jamais injecter trop de produit. Le Dr Polla suggère d’effectuer, si nécessaire, une rhinoplastie complète en deux sessions ou plus, de rester attentif au moindre signe clinique d’embolie, de garder les patients à la clinique pendant au moins 30 minutes après l’injection et de leur donner un numéro de téléphone portable en cas de problème, en expliquant les effets secondaires tardifs. En cas d’embolisation, les événements artériels surviennent rapidement (douleur vive, blanchiment, livedo, remplissage capillaire lent), tandis que les événements veineux surviennent lentement (couleur bleu-violet et douleur sourde). En termes de degré de gravité, les cas légers présentent des modifications au niveau de la couleur de la peau, les cas modérés des pustules et des ulcérations et les cas graves un noircissement et une nécrose de la peau. Pour la prise en charge de l’embolie, avec des antécédents <5 heures, il suggère : massages, compresses chaudes, aspirine, accès veineux, test cutané à la hyaluronidase (5 min), injection IV de solucortef, EpiPen disponible, hyaluronidase profonde et superficielle, à raison d’un point tous les 0,5 cm, et 10 U/point/heure. Dans les cas d’une durée <3 jours : injections de hyaluronidase, injections en IV lente d’alprostadil 10 µg dilué dans 10 ml de solution saline 1X/jour pendant 3 jours, dexamethasone 10 mg dans 100 ml de solution saline 1X/jour pendant 3 jours, antibiotiques oraux, aspirine 100 mg par jour, oxygène hyperbare, si possible, soins de la plaie avec précaution. Pour les cas d’une durée >3 jours : favoriser la cicatrisation des plaies et utiliser le laser pour atténuer les cicatrices. Autres effets secondaires possibles/orientations respectives : diffusion latérale du produit dans la zone sous les yeux/hyaluronidase, œdème du nez/cortisone orale, ecchymoses/PDL, érythème de la pointe du nez/cortisone orale, asymétrie, irrégularités/hyaluronidase, granulomes/cortisone orale, hyaluronidase. L’analyse médicale comprend l’inspection, la palpation et l’échographie. Une attention particulière est accordée à la rhinoplastie post-chirurgicale. Pour réaliser l’injection à l’aiguille, le Dr Polla propose de transférer l’AH dans une seringue de 0,3 cc 8 mm/32G. Avec la canule, l’objectif est de remodeler la pointe du nez. Selon lui, il n’est pas nécessaire de corriger l’angle naso-labial ni d’injecter la base de la columelle.
Dr Pierre André (Paris, France)
À la question de la « Prise en charge des complications liées aux produits de comblement non permanents », le Dr Pierre André commence par les diviser en trois phases :
En cas d’utilisation de hyaluronidase d’origine animale (sur-correction, mauvais positionnement, nodules, granulomes, urgences vasculaires), le Dr André suggère d’effectuer un prick test au préalable, bien que les réactions allergiques soient rares. La Hase humaine recombinante est 100 fois plus pure, mais aussi plus sûre.
Dr Peter Velthuis (Rotterdam, Pays-Bas)
Le Dr Peter Velthius a fait son exposé sur la « Prise en charge de l’atteinte vasculaire avec l’échographie duplex ». Selon lui, l’incidence de l’obstruction vasculaire est estimée à : 1:6600. La plupart des événements semblent être dus à des spasmes (le schéma ressemble à celui du livedo reticularis).
Orateurs : Pr Berthold Rzany, Dr Emanuel Carvalheiro Marques, Pr Christopher Rowland Payne, et Dr Hugues Cartier
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Pr Berthold Rzany (Vienne, Autriche)
Le Pr Berthold Rzany a parlé des « Indications de la toxine botulique en dermatologie », en particulier dans l’hyperhidrose et le bruxisme. Pour l’hyperhidrose axillaire, il utilise l’AbobotulinumtoxinA à raison de 200 à 250 U par côté (en sous-cutané) en 10 à 15 points. Pour l’hyperhidrose palmaire, il utilise 250 U, en surface, en 40 à 50 points par main, de préférence sans bloc nerveux. L’efficacité et la durée dépendent de la dose injectée. Pour le bruxisme, en ce qui concerne l’injection du masséter, il suggère 3 à 4 points, soit un total de 40 à 50 U par côté. Un gonflement paradoxal apparaît en cas de traitement incomplet du masséter et est facile à corriger.
Dr Emanuel Carvalheiro Marques, PhD (Prague, République tchèque)
Le Pr Dr Emanuel Carvalheiro Marques a présenté les « Indications de la toxine botulique (BoNT) en recherche fondamentale, en dehors de la dermatologie ». En ophtalmologie : strabisme, blépharospasme, alternative à la tarsorraphie chirurgicale et kératoconjonctivite sèche. En oto-rhino-laryngologie : rhinite allergique, spasme cricopharyngé, granulomes laryngés, dystonie laryngée/dysphonie spasmodique. En neurologie/psychiatrie : migraine, névralgie du trijumeau, lombalgie chronique/douleur myofasciale, notalgie paresthésique, neuropathie périphérique, paralysie faciale de Bell, dépression, trouble du tic/tourette, dyskinésie tardive, tremblement essentiel, dystonie cervicale, spasticité. En dentisterie : bruxisme, troubles de l’articulation temporo-mandibulaire, spasme mandibulaire. En gastro-entérologie : sialorrhée chronique, achalasie, gastroparésie, fissures anales, stomie contractile. En urologie/gynécologie : instabilité du détrusor, dysfonction érectile, hyperplasie bénigne de la prostate, troubles douloureux de la vulve, vaginisme, douleurs pelviennes chroniques. En chirurgie cardiovasculaire : prévention de la fibrillation auriculaire après une intervention chirurgicale, contrôle de la tension artérielle (plexus cœliaque). Il existe également des applications de la BoNT en médecine vétérinaire.
Pr Christopher Rowland Payne
Le Pr Christopher Rowland Payne a parlé des moyens d’améliorer les techniques d’injection de toxine botulique (BoNT) dans la partie inférieure du visage. Il est favorable à la plupart des injections intradermiques, plus précisément dans les fossettes, les insertions des muscles dans la peau. En cas de rosacée, il suggère 2 U d’AbobotulinumtoxinA/point intradermique, pour la partie inférieure du visage, 20 U d’AbobotulinumtoxinA/total. Pour le masséter, 20 à 40 U d’AbobotulinumtoxinA/côté, en moyenne 10 points (3 le long du bord du masséter). Pour le Nefertiti lift, il recommande 4 points de façon linéaire sous le bord de la mandibule. Si l’injection est trop importante, il recommande le « toilet training » (exercices à pratiquer à chaque fois que le patient se rend aux toilettes).
Dr Hugues Cartier (Arras, France)
Le Dr Hugues Cartier a posé la question : « Peut-on utiliser la toxine botulique pour améliorer la cicatrisation des plaies ? ». La BoNT peut réduire la tension musculaire de la peau et l’activité des fibroblastes. La difficulté consiste à déterminer le moment de l’injection. Des injections tardives et des doses excessives sont liées à une augmentation de la taille de la cicatrice. En prévention, cela fonctionne. Dans de nombreuses études, les injections réalisées entre le premier et le neuvième jour après la chirurgie donnent des résultats prometteurs. Pour prévenir les cicatrices hypertrophiques, peu d’études ont été réalisées chez l’homme, mais elles ont donné de bons résultats chez l’animal. Comparée aux injections de corticostéroïdes, la BoNT diminue les démangeaisons et la douleur, sans atrophie.
Orateurs : Pr Adriana Rakowska, Dr Anna Waskiel-Burnat, Pr Luc Thomas, et Pr Dr Iris Zalaudek
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Pr associée Adriana Rakowska (Varsovie, Pologne)
Le Pr Adriana Rakowska a évoqué les « Résultats de la trichoscopie dans l’alopécie ». Elle préconise de recourir à la trichoscopie dans tous les cas. En fonction du diagnostic, les principaux résultats sont les suivants :
Dr Anna Waskiel-Burnat (Varsovie, Pologne)
Le Dr Anna Waskiel-Burnat a présenté la « Biopsie du cuir chevelu guidée par trichoscopie ». Les principales indications de la biopsie du cuir chevelu sont les troubles inflammatoires, l’alopécie cicatricielle, les tumeurs et, dans certains cas, l’alopécie non cicatricielle. La trichoscopie permet de déterminer la zone la plus représentative pour effectuer une biopsie. Dans les maladies inflammatoires, la zone privilégiée est celle qui présente le plus de caractéristiques de la maladie. Dans l’alopécie cicatricielle, on ne procède jamais sur des zones blanches (fibrose uniquement). Dans le lupus érythémateux (LE), les zones présentant de nombreux points rouges et vaisseaux sont les plus appropriées. On utilisera un instrument de 4 mm au moins. Il est important de suivre l’angle des cheveux pour être sûr de ne pas les couper.
Pr Luc Thomas (Pierre bénite, France)
Le Pr Luc Thomas a partagé 11 conseils et astuces pour l'onychoscopie :
Pr Dr Iris Zalaudek (Trieste, Italie)
Le Pr Iris Zalaudek a présenté les « Caractéristiques cliniques et histopathologiques du signe de Hutchinson », une extension périunguéale de la pigmentation qui peut affecter les plis de l’ongle et/ou l’hyponychium. Le signe de Hutchinson est évocateur d’une phase de croissance verticale du mélanome, il est donc associé à un diagnostic de mélanome avancé. Il faut éviter la biopsie du signe de Hutchinson, car elle peut conduire à un diagnostic erroné dans cette zone très particulière. Il est préférable de procéder à une excision longitudinale englobant la matrice de l’ongle, en particulier le centre de la pigmentation. Facteurs prédictifs du mélanome sous-unguéal :
Autres signes prédictifs de mélanome : une tablette unguéale grise/noire et une pigmentation granuleuse, des bandes régulières MAIS triangulaires au niveau de la tablette unguéale, la forme. Le motif fibrillaire à bords libres récemment décrit semble insuffisant pour distinguer de manière fiable les nævi congénitaux de la matrice de l’ongle d’un mélanome avancé.
Orateurs : Pr Dimitrios Loannides, Pr Harald Kittler, Dr Josep Malvehy, et Pr Aimilios Lallas
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Pr Dimitrios Loannides (Thessalonique, Grèce)
Le Pr Dimitrios Loannides a évoqué les « Caractéristiques dermoscopiques du psoriasis et du lichen plan ».
Les principales caractéristiques du psoriasis en plaques sont les suivantes : squames blanches, vaisseaux en pointillés (répartition uniforme), base érythémateuse, signe d’Auspitz (extravasation du sang). La trichoscopie montre des groupes de points et de globules rouges (qui ont tendance à se positionner de façon linéaire), des vaisseaux glomérulaires ou enroulés, disposés de façon linéaire ou circulaire. Dans les lésions psoriasiques traitées, les vaisseaux tendent à se confondre avec le fond érythémateux et leur structure n’est pas clairement définie. Dans les éruptions aiguës graves, des vaisseaux en pointillés sont visibles autour des pustules. La dermoscopie permet de différencier le psoriasis en gouttes du pityriasis rosea.
Le lichen plan se caractérise par des structures blanc nacré (plus rarement jaune ou blanc bleuté), pouvant présenter plusieurs aspects morphologiques, notamment réticulaire, annulaire, rond, imitant la structure cristalline de la neige, ou l’aspect en « ciel étoilé » (points blancs folliculaires groupés).
Pr Harald Kittler (Vienne, Autriche)
Le Pr Harald Kittler a décrit les « Maladies infectieuses » en les classant dans les catégories suivantes :
Dr Josep Malvehy (Barcelone, Espagne)
Le Dr Josep Malvehy a démontré l’importance de l’« Inflammoscopie du cuir chevelu ». Cette technique permet de différencier la dermatite séborrhéique (lignes rouges arborescentes et points jaunes), la dermatite de contact (boucles rouges torsadées et vaisseaux en virgule répartis de manière irrégulière), la tinea capitis (cheveux en tire-bouchon, en morse, en zigzag, cheveux courbés, desquamation diffuse) et le psoriasis du cuir chevelu (boucles rouges simples réparties de manière régulière, boucles rouges torsadées et globules). Elle permet également de distinguer l’alopécie areata et la trichotillomanie, et de définir le pronostic des traitements de l’alopécie areata, de distinguer le lichen plan pilaire (vaisseaux périfolliculaires, érythème périfolliculaire, perte de cheveux velus) et le LE discoïde (bouchons de kératine).
Pr Aimilios Lallas (Thessalonique, Grèce)
Le Pr Aimilios Lallas a présenté « A-t-on vraiment besoin de l’inflammoscopie ? » et évoqué un changement de paradigme. Il y a quelques années, en 2005, la dermoscopie des troubles inflammatoires était considérée comme inutile. De nos jours, les choses ont changé, de nombreuses études ont été publiées sur des pathologies diverses et l’inflammoscopie est désormais reconnue comme un outil précieux pour la prise de décision en dermatologie. Le Pr Lallas a détaillé quelques situations cliniques où l’inflammoscopie a permis de préciser le diagnostic.
Orateurs : Dr Ediléia Bagatin, Pr Dr Falk Ochsendorf, Pr Dr Alberto Mota, et Dr Hassan Galadari
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Dr Ediléia Bagatin, PhD (Sao Paulo, Brésil)
Le Dr Ediléia Bagatin a fait son exposé sur le thème de l’« Acné prépubère ». Elle a commencé par expliquer le rôle des glandes sébacées chez l’homme : pendant la vie intra-utérine, il s’agit d’une adaptation évolutive visant à protéger les êtres humains bipèdes de la dystocie. Après la naissance, elles jouent un rôle clé dans l’homéostasie des androgènes, avec un effet paracrine et une activité antimicrobienne, immunitaire et inflammatoire. L’acné survient généralement plus tard, lorsque les glandes sont stimulées de façon pathologique en raison d’une combinaison de facteurs, qui provoquent une inflammation (DHT, lésions de la barrière cutanée, modifications du microbiome, alimentation, mode de vie).
La stéroïdogenèse débute à l’adrénarche (8 ans pour les filles et 9 ans pour les garçons), avec la production de DHEA et de DHEAS, qui peuvent être converties en DHT par voie périphérique, ce qui active les glandes sébacées. Il s’agit d’un processus indépendant de l’ACTH et différent de la gonadarche. L’acné prépubère est une maladie rare (infantile, intermédiaire ou préadolescente) liée à une adrénarche prématurée, et non à la gonadarche. Il ne s’agit pas d’une endocrinopathie, car le taux d’androgènes plasmatiques est normal. Elle est liée à la conversion périphérique en DHT. Par conséquent, l’anamnèse, l’examen physique et la radiographie de l’âge osseux et de la courbe de croissance sont suffisants, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une évaluation plus approfondie, sauf en cas de signes de puberté précoce. Dans ce cas, il faut procéder à des analyses de laboratoire (LH/FSH/DHEA/DHEAS/Testostérone totale/libre/17 α-hidroxiprogestérone/prolactine).
Il n’existe aucune recommandation pour la prise en charge de cette maladie, mais la pratique clinique montre qu’un traitement topique léger est généralement suffisant. Les soins de la peau (nettoyant doux + crème hydratante + photoprotection) et les dermocosmétiques peuvent constituer un traitement efficace, afin de prévenir les cicatrices et l’hyperpigmentation. On peut recourir à des produits sur ordonnance tels que l’adapalène, l’acide azélaïque, une combinaison fixe, des antibiotiques (moins il y en a, mieux c’est) et de l’isotrétinoïne par voie orale (0,3 mg/kg/jour jusqu’à résolution complète + 1 mois, plusieurs cycles si nécessaire). Il faut traiter pour guérir ! L’entretien et le suivi sont indispensables.
Pr Dr Falk Ochsendorf (Francfort, Allemagne)
Le Pr Falk Ochsendorf a évoqué la « Prise en charge de l’acné pendant la grossesse ».
Jusqu’à 43 % des femmes enceintes sont touchées par l’acné, généralement au cours des 2ème et 3ème trimestres. Le risque de malformation est de 3 à 6/1000, et ces malformations sont généralement liées à des traitements administrés pendant la grossesse.
L’étiquetage diffère si l’on compare l’Agence européenne des médicaments (EMA) et la FDA. Pour l’EMA, les médicaments sont numérotés de 1 à 8, tandis que pour la FDA, ils portent les lettres X, D, C, B, A. Le Pr Ochsendorf pense que le site www.embryotox.de peut aider les médecins dans la pratique clinique.
La clascotérone, le rétinol et l’acide salicylique topiques ne sont pas recommandés. En revanche, l’acide azélaïque topique, le BPO, la clindamycine, le dapsone, l’érythromycine, le métronidazole et l’acide glycolique peuvent être envisagés.
L’isotrétinoïne systémique, la spironolactone, le triméthoprime et le sulfaméthoxazol ne sont pas recommandés. En revanche, les macrolides (sauf l’estolate), l’amoxiciline, la céfalexine et la clindamycine peuvent être envisagés. On peut recourir à la tétracycline jusqu’à la 16ème semaine. Les corticostéroïdes sont considérés comme sûrs, surtout à faible dose. L’administration de zinc par voie orale est également possible.
On peut utiliser les corticostéroïdes intralésionnels et la lumière bleue. Mais le LCP, les autres lasers et la PDT ne sont pas recommandés.
Le choix dépend de la gravité de l’acné.
Pr Dr Alberto Mota (Porto, Portugal)
Le Pr Alberto Mota a parlé de l’« Acné tronculaire, du diagnostic au traitement ». La moitié des patients souffrant d’acné présente une atteinte tronculaire. Jusqu’à 1/3 d’entre eux ne mentionnent pas l’atteinte tronculaire d’où l’importance de l’examen ! Elle peut être isolée dans 2 % des cas. Les patients de sexe masculin, les formes sévères, les antécédents familiaux et l’exposition aux androgènes constituent des facteurs de risque. Le risque de cicatrices est plus faible que pour les atteintes du visage. Elle est associée à un fardeau psychosocial. L’hyperséborrhée pourrait ne pas jouer un rôle majeur dans l’acné tronculaire.
L’échelle de gravité de l’acné tronculaire (TRASS) permet d’orienter le traitement :
Dr Hassan Galadari (Dubaï, Émirats arabes unis)
Le Dr Hassan Galadari a clôturé la session en détaillant la prévention et le traitement des cicatrices d’acné.
Des cicatrices peuvent apparaître dans toutes les formes d’acné. Les vraies cicatrices peuvent être atrophiques (« ice peak » - en forme de V et profonde, « box » - large, peu profonde ou « rolling » - la plus large) ou en relief (chéloïde ou cicatrice hypertrophique).
Les différents types de cicatrices répondent à différents types de traitement.
Orateurs : Pr Dr Klaus Fritz, Pr Dr H.A. Martino Neumann, Dr Hassan Galadari, et Dr Peter Velthuis
Compte rendu rédigé par Dr Ricardo Limongi Fernandes
Pr Dr Klaus Fritz (Landau, Allemagne)
Le Pr Klaus Fritz a parlé des « Micro-aiguilles et radiofréquence à micro-aiguilles dans les indications médicales ». Selon lui, il est parfois très difficile, en dermatologie, de distinguer les indications médicales des indications cosmétiques. Le microneedling (ou micro-aiguilles) est une thérapie d’induction du collagène, qui peut prendre de 3 à 12 mois. Le Pr Fritz recommande de ne pas effectuer le deuxième traitement avant 6 à 8 semaines et le troisième, seulement après 6 à 12 mois. Les principales indications médicales sont les cicatrices d’acné, les cicatrices atrophiques, les cicatrices résultant d’un traumatisme ou d’une blessure, les cicatrices de brûlures et les vergetures. En général, des aiguilles de 1,5 mm sont indiquées, à l’exception des cicatrices bénignes sur peau fine (0,5 mm), des cicatrices bénignes (1 mm) et des cicatrices de brûlures (2,5 mm).
Selon le Pr Fritz, il s’agit d’une méthode douce et sans danger, qui stimule la production de collagène et d’élastine, augmente l’épaisseur de l’épiderme, améliore cliniquement les cicatrices. Elle est associée à des effets secondaires bénins, ne présente pas risque et est facile à réaliser et économique.
Pr Dr H.A. Martino Neumann (Banholt, Pays-Bas)
Le Pr H. A. Martino Neumann a présenté le « Traitement du psoriasis à l’aide du laser à colorant pulsé 585 nm ». Le LCP a des effets directs sur les vaisseaux sanguins, ainsi que des effets indirects sur les structures voisines (ablation des terminaisons nerveuses libres et des nerfs périvasculaires autour des vaisseaux, ce qui entrave leurs fonctions). Des effets complémentaires à long terme, dus à la faible régénération des nerfs, entraînent un temps de rémission remarquablement long.
Dr Hassan Galadari (Dubaï, Émirats arabes unis)
Le Dr Hassan Galadari a évoqué « l’utilisation de la toxine botulique à des fins médicales ». Pour l’hyperhidrose, il suggère 50 U par aisselle (jusqu’à 100), pour un traitement très efficace. Dans la forme palmaire, il suggère les mêmes doses, en gardant à l’esprit que le traitement est plus douloureux et qu’il existe plus de risque d’affaiblissement musculaire. Pour la migraine, les critères sont bien définis (au moins 15 épisodes par mois, dont au minimum 8 typiques), 155 à 195 unités dans un protocole très bien documenté. Pour les douleurs de l’ATM (articulation temporo-mandibulaire)/le bruxisme, environ 100 U en 10 points sur le masséter et les muscles temporaux. Pour les cicatrices, il n’existe pas de consensus en ce qui concerne la posologie (environ 10 U/cm) et le moment de l’injection. Dans la dépression, le mécanisme peut être lié à la rétroaction positive, à la rétroaction sociale, au facteur neurotrophique, à la sérotonine, etc.
Dr Peter Velthuis (Rotterdam, Pays-Bas)
Le Dr Peter Velthius a clôturé la session en présentant « Les produits de comblement dans les indications médicales ». Parmi les sujets abordés, citons les cicatrices d’acné, la lagophtalmie (les injections au niveau du ROOF alourdissent la paupière supérieure), l’ectropion (injection d’un produit de comblement à G’ élevé dans la paupière inférieure pour améliorer la rigidité de la paupière, également chez les patients atteints d’ichtyose), le nez (amélioration de l’ouverture de la valve nasale interne), la chéilite angulaire, les chéloïdes (l’injection pneumatique d’un produit de comblement à l’AH entraîne une hydratation massive, qui ramollit et aplatit les tissus), les cicatrices et les défauts dus à l’atrophie liée aux stéroïdes.
Orateurs : Pr Annika Vogt, Pr Dimitrios Loannides, Dr Jovan Lalošević, et Dr Maryanne M. Senna
Compte rendu rédigé par Dr Lucija Vanjaka-Rogošić
Pr Annika Vogt (Berlin, Allemagne)
Lors de cette présentation, le Pr Vogt a suggéré que pour poser le bon diagnostic, la meilleure méthode associe des antécédents médicaux détaillés, l’examen du patient et la dermoscopie, qui est un outil essentiel.
D’autres informations sont utiles : l’ampleur des lésions au niveau du cuir chevelu et sur d’autres parties du corps (sourcils, cils, barbe ; score SALT : Severity of ALopecia Tool) ; le niveau d’activité de la maladie d’après le test de traction ; et la forme des lésions. Des modifications sont parfois également visibles au niveau des ongles (46 % des patients pédiatriques ; 15 % des adultes).
On parle d’alopécie sévère quand le score SALT est égal ou supérieur à 50 %. Les facteurs prédictifs sont les suivants : perte de cheveux diffuse ; pelade de type ophiasis ; maladie présente depuis plus d’un an ; apparition lors de la petite enfance ; et antécédents familiaux. La pelade s’accompagne de certaines comorbidités, comme la dermatite atopique, des maladies auto-immunes comme la thyroïdite de Hashimoto, le vitiligo, le lupus érythémateux disséminé (LED) et la polyarthrite rhumatoïde.
La pelade a par ailleurs des répercussions psychosociales sur les patients, dont plus de 50 % souffrent de troubles dépressifs graves et 39 à 62 % présentent des troubles anxieux. Les enfants et les adolescents peuvent faire l’objet d’une stigmatisation et d’un harcèlement. Par conséquent, en cas de pelade, il convient de se rappeler l’importance des cheveux, symboles du genre, de l’âge, de la beauté et de la santé des patients.
En résumé, la Pr Vogt a souligné l’aspect multidimensionnel associé à la gravité et au fardeau de la pelade, qui a des répercussions physiques, en termes de comorbidités et psychosociales.
L’objectif principal est d’évaluer les stratégies thérapeutiques dès que possible, en sachant que les traitements se choisissent au cas par cas.
Pr Dimitrios Loannides (Thessalonique, Grèce)
La trichoscopie est un outil très utile aussi bien pour le diagnostic que pour le suivi tout au long du traitement. Cette méthode non invasive est à la fois peu coûteuse et très facile à pratiquer.
Pour commencer, il convient d’exclure un diagnostic d’alopécie cicatricielle en vérifiant la présence ou l’absence de cavités folliculaires. Selon son degré de sévérité, l’inflammation présente diverses caractéristiques observables à la trichoscopie.
Le Pr Loannides nous a donné quelques conseils utiles pour la trichoscopie :
Dr Jovan Lalošević (Belgrade, Serbie)
Lors de sa présentation, le Dr Lalošević a décrit le lien entre la pelade et d’autres maladies, auto-immunes et inflammatoires.
L’étiopathogénie de la pelade n’est pas totalement claire. Néanmoins, les publications récentes ont montré une prévalence supérieure des maladies auto-immunes et inflammatoires en cas de pelade.
Il existe notamment un lien avéré avec la thyroïdite auto-immune, le vitiligo, le LED, la polyarthrite rhumatoïde, la maladie de Biermer, le psoriasis, le spectre de l’atopie, les troubles psychiatriques et la carence en zinc et en vitamine D. Or ces comorbidités peuvent avoir un impact sur le traitement. Il est important de dépister les comorbidités, par exemple via les analyses suivantes : IgE, anticorps antinucléaires, anti-TPO, anti-Tg, facteurs rhumatoïdes, zinc et vitamine D sériques, cholestérol HDL, triglycérides et glycémie à jeun, afin d’identifier les éventuels syndromes métaboliques.
En cas d’apparition précoce, la pelade est généralement liée à une dermatite atopique. En cas d’apparition tardive, elle est généralement liée à une thyroïdite auto-immune.
À la fin de sa présentation, le Dr Laloševic nous a décrit son expérience. Les résultats montrent que dans sa forme sévère, la pelade est plus souvent associée à des maladies de la thyroïde et s’accompagne d’une incidence supérieure des syndromes métaboliques. Enfin, les patients atteints d’une thyroïdite auto-immune qui sont traités par corticoïdes en bolus intraveineux présentent une réponse significativement inférieure au traitement.
Dr Maryanne M. Senna (Winchester, États-Unis)
En ouverture de sa présentation, le Dr Senna nous a expliqué qu’elle allait passer en revue le paysage thérapeutique actuel de la pelade, avant d’aborder les difficultés et opportunités associées à des approches plus ciblées et personnalisées.
La chute de cheveux n’est pas suffisamment reconnue en tant que problème médical important. Or cette maladie étant très visible et difficile à dissimuler, les patients sont contraints d’afficher leur problème de santé, d’où une certaine perte de la vie privée. Le risque cumulé associé à la pelade pendant toute la durée de vie est de 2 %. Tous les âges, toutes les origines ethniques et tous les sexes sont touchés, avec une apparition généralement avant 30 ans.
La pathogénie de la pelade n’est pas totalement claire, mais il est avéré que des lymphocytes T cytotoxiques pénètrent dans la partie proximale du follicule pileux en phase anagène, où ils déclenchent une attaque auto-immune sur un antigène qui n’est pas encore reconnu. Des lymphocytes T auxiliaires présents dans la zone périfolliculaire participent également à la pathogénie de la pelade.
En 2014, un patient de 25 ans présentant un psoriasis étendu et une pelade a reçu du tofacitinimib par voie orale, traitement qui a amélioré le psoriasis et induit une repousse des cheveux. Depuis, de nouvelles orientations dans le traitement de la pelade par des inhibiteurs de JAK sont étudiées dans de nombreux essais cliniques. Des essais cliniques portant sur la pelade étudient actuellement l’efficacité du baracitinib et du ritlecitinib comparativement au placebo. Ces traitements sont recommandés en cas de pelade très sévère associée à un score SALT (de sévérité de l’alopécie - Severity of ALopecia Tool) supérieur à 50 %. Il convient néanmoins d’expliquer aux patients quels sont les effets indésirables de ces traitements, comme le risque cardiovasculaire, le risque de cancer et le risque d’infection grave.
Les résultats sont meilleurs en cas de pelade moins sévère et lorsque l’épisode actuel est plus court (moins de 4 ans). L’ajout de minoxidil oral améliore parfois les résultats. Par ailleurs, le dupilumab (inhibiteur de la voie Th2) permet parfois d'obtenir de bons résultats chez les patients qui présentent également une dermatite atopique sévère.
En conclusion, le Dr Senna a rappelé que les inhibiteurs de JAK ont révolutionné notre capacité à traiter ces patients. Il est désormais important d’améliorer les méthodes diagnostiques, dans l’espoir de mieux comprendre la maladie, pour des traitements plus ciblés.
Orateurs : Dr Linda Stein Gold, Pr Martin Steinhoff, Pr Eszter Baltas, et Dr Lucero Noguera
Compte rendu rédigé par Dr Lucija Vanjaka-Rogošić
Dr Linda Stein Gold (Michigan, États-Unis)
Lors de cette présentation, le Dr Stein Gold nous a indiqué que la rosacée peut être considérée comme un trouble d’ordre systémique parfois associé à des comorbidités telles que des troubles neurologiques, cardiovasculaires et gastro-intestinaux.
Dans la plupart des cas, les patients présentent plusieurs sous-types de rosacées (érythémato-télangiectasique, papulo-pustuleuse, phymateuse ou oculaire). Pour évaluer et diagnostiquer la rosacée, le Dr Stein Gold recommande d’examiner les phénotypes, plutôt que les sous-types de rosacées.
Les phénotypes se divisent en 3 groupes de symptômes :
Le diagnostic de rosacée est établi en présence d’un phénotype diagnostique seul ou d’au moins deux phénotypes majeurs.
Par ailleurs, en cas de rosacée, les rougeurs faciales sont variables et l’érythème peut évoluer au fil du temps, d’un érythème facial intermittent (en raison de l’altération de la circulation sanguine) en un érythème facial persistant (en raison de la modification de la structure vasculaire) et en un érythème facial avancé (dilatation permanente des vaisseaux superficiels).
La sensibilité de la peau en cas de rosacée est due à la fragilisation de la barrière cutanée, qui s’accompagne d’une sécheresse sévère, d’une hausse du pH, d’une perte insensible en eau et d’une baisse de l’hydratation, comme dans la dermatite atopique.
La rosacée est une maladie neurovasculaire inflammatoire associée à des anomalies de la réponse immunitaire innée et à un niveau supérieur de cathélicidine et de peptides LL37, qui ont ensemble une activité pro-inflammatoire chimiotactique et angiogénique. Le tableau clinique de la rosacée est également compliqué par les acariens demodex, puisque demodex folliculorum a été détecté dans la rosacée inflammatoire, tandis que demodex brevis a été détecté dans la rosacée légère. Or demodex joue sur l’activation de certains récepteurs comme TRPV-1, qui favorise l’inflammation neurogène cutanée.
Les mastocytes participent eux aussi à la physiopathologie de la rosacée, au niveau du système immunitaire inné, de la transformation neurogène, de la vasodilatation, de l’angiogenèse et de la fibrose.
L’utilisation des tétracyclines a un effet antibiotique et non antibiotique, car ce traitement a également un impact sur l’inflammation et sur le stress oxydatif. À cet égard, il est important de comprendre la pathogénie de la rosacée afin de mieux la traiter.
Pr Martin Steinhoff (Doha, Qatar)
Comme l'explique le Dr Stein Gold, les patients atteints d’une rosacée présentent généralement d’autres comorbidités, par exemple neurologiques, psychiatriques, gastro-intestinales, endocriniennes, auto-immunes, cardiovasculaires et rhumatologiques.
Malgré tout, les outils diagnostiques restent insuffisants face à la rosacée.
Les enjeux thérapeutiques sont les suivants :
La rosacée possède une physiopathologie très complexe, associant une prédisposition génétique et des facteurs déclencheurs, qui entraînent une inflammation. De nombreuses études ont confirmé ou contredit le rôle d’Helicobacter pylori sur la rosacée.
Il est très important de mieux comprendre les pathomécanismes et les voies de signalisation de la rosacée. Dans cette optique, le Pr Steinhoff recommande de mener davantage d’études multicentriques de grande ampleur, qui manquent encore.
Pr Eszter Baltas (Szeged, Hongrie)
Le Pr Baltas nous a expliqué qu’elle aborderait le diagnostic différentiel chez les patients présentant un érythème facial, ainsi que le traitement de l’érythème facial associé à une rosacée. L’érythème facial peut être persistant, en tant que symptôme diagnostique, ou transitoire (bouffées de chaleur) en tant que symptôme majeur. Les patients présentent parfois également un érythème périlésionnel.
L’érythème facial persistant peut être dû à de nombreuses causes, notamment physiologiques (photovieillissement), infectieuses, inflammatoires chroniques, déclenchées par des facteurs externes et auto-immunes.
Comme l’érythème, la rosacée peut être d’origine médicamenteuse et il convient de s’interroger sur l’utilisation des corticoïdes locaux, des inhibiteurs de la calcineurine locaux et du dupilumab.
Il est recommandé de procéder à un examen global des patients et de vérifier s’ils présentent des maladies de type lupus érythémateux ou dermatomyosite.
Pour ce qui est du traitement de la rosacée, une approche axée sur les phénotypes est recommandée :
Pour les patients qui utilisent la brimonidine ou l’oxymétazoline, il convient de les prévenir que les résultats durent environ 12 heures après application. Des réactions indésirables sont possibles, par exemple un érythème paradoxal, une récidive exacerbée de l’érythème et une dermatite de contact allergique plusieurs mois après le début du traitement.
Pour le traitement des papules et des pustules, il est recommandé de prescrire de l’ivermectine locale en crème 1 % pour son effet anti-inflammatoire.
En conclusion, le Pr Baltas a expliqué qu’à l’heure actuelle, les traitements sont symptomatiques et qu’aucun nouveau médicament n’a été mis sur le marché ces dernières années. Les dispositifs à base d’énergie et de lumière sont répandus et fiables.
Les associations thérapeutiques axées sur le phénotype restent le traitement de référence face à l’érythème facial associé à la rosacée.
Dr Lucero Noguera (Madrid, Espagne)
Le Dr Noguera a abordé les traitements nouveaux face à la rosacée, notamment chez l’enfant. Il existe un lien entre la peau et l’appareil gastro-intestinal. Partant de ce constat, de nouvelles options thérapeutiques sont à l’étude.
L’acide tranexamique local 10 % est utilisé face à la rosacée érythémato-télangiectasique, en tant qu’inhibiteur des plasmides. Ce traitement réduit le nombre de mastocytes dans la peau, tout en supprimant les biomarqueurs de l’inflammation et l’angiogenèse.
Certains essais étudient la toxine botulique A en mésothérapie.
En cas de rosacée papulo-pustuleuse, un essai étudie la micocycline en mousse 1,5 %.
Du côté des traitements nouveaux, la sarécycline par voie orale est une tétracycline de troisième génération à spectre étroit. L’hydrochloroquine, qui est un antipaludéen, est également étudiée pour son effet anti-inflammatoire.
D’autres essais cliniques portent sur un nouveau biologique, l’érénumab.
Chez l’enfant, le diagnostic et le traitement de la rosacée sont difficiles, la dermatite périorale étant particulièrement compliquée à traiter. L’ivermectine en crème 1 % appliquée pendant 3 à 4 mois permet d’obtenir de bons résultats et s’avère sans danger.
En conclusion, le Dr Nogura a ajouté que de nouvelles options, locales et systémiques, sont disponibles pour le traitement de la rosacée érythémato-télangiectasique et papulo-pustuleuse. Une approche combinée est l’objectif. Chez l’enfant de moins de 9 ans, les options thérapeutiques sont plus limitées.
Orateurs : Dr Jan Gutermuth, Dr Melinda Gooderham, Pr Valeria Aoki, et Dr Bruno Duarte
Compte rendu rédigé par Dr Lucija Vanjaka-Rogošić
Dr Jan Gutermuth (Bruxelles, Belgique)
La dermatite atopique (DA) est définie ainsi : dermatose inflammatoire chronique, caractérisée par des phases de rechutes et de rémissions. Elle est due à des anomalies de la barrière épidermique et à une inflammation chronique (Th2). 10-15 % des patients qui présentent une DA (formes modérées à sévères) nécessitent un traitement systémique.
Dans un premier temps, la DA associe plusieurs troubles de la régulation des voies de signalisation du système immunitaire. Elle se manifeste tout d’abord par un dysfonctionnement de la barrière cutanée, une activation du système immunitaire inné, une inflammation due aux Th2 et Th22 et une activation variable des Th1 et Th17. L’inflammation de type 2 a un impact sur l’involution de plusieurs organes. En cas de DA, il existe un risque d’allergie alimentaire, d’œsophagite à éosinophiles, de rhinosinusite chronique, de rhinite allergique, d’asthme et de BPCO (Broncho-Pneumopathie Chronique Obstructive) à éosinophiles. Dans le cadre de la DA, le prurit est induit par les cytokines, en sachant que l’expression supérieure de pruritogènes comme la TSLP, les IL-4, IL-13 et IL-31, joue un rôle de premier plan à cet égard.
Le microbiome cutané est un biomarqueur de la DA. La diversité de ce dernier est un facteur prédictif d’une peau en bonne santé. Par conséquent, le traitement doit viser à diversifier les microbiomes cutané et intestinal.
Dr Melinda Gooderham (Peterborough, Ontario, Canada)
L'objectif de cette conférence est d'identifier des phénotypes, sous-types et endotypes distincts de la dermatite atopique (DA), en fonction de l'approche.
La DA est une affection cutanée inflammatoire hétérogène dont le diagnostic repose sur l’examen clinique. Il est utile de comprendre les phénotypes de la DA afin de proposer des traitements personnalisés et d’obtenir des résultats optimaux.
Les phénotypes cliniques peuvent être classés selon l’âge au moment de l’apparition, la couleur de peau, la morphologie et la topographie.
L’âge au moment de l’apparition :
Couleur de peau / origines ethniques : les Th2 et Th22 sont impliquées dans tous les cas, tandis que les Th1 et Th17 ne sont pas présents chez les patients à la peau noire.
Morphologie :
Topographie des lésions :
En conclusion, le Dr Gooderham nous a rappelé que la DA est une affection hétérogène, qui peut être répartie en plusieurs sous-types en fonction de nombreux facteurs. Le fait de comprendre les phénotypes de la DA aide à déterminer le pronostic et à personnaliser l’approche thérapeutique.
Pr Valeria Aoki (São Paulo, Brésil)
Lors de sa présentation, le Pr Aoki nous a indiqué quand choisir un traitement topique ou systémique en cas de DA.
Dans un premier temps, le traitement doit reposer sur des corticoïdes locaux, avant de passer à des inhibiteurs topiques de la calcineurine (ITC) afin de réduire les picotements et sensations du brûlure au niveau de la peau.
Un traitement proactif (application d’ITC deux fois par semaine) est recommandé pour réduire le risque de rechute et mieux maîtriser la maladie. Les traitements topiques par IPCI sont sans danger, mais la réponse peut être plus faible en cas d’IgE bas.
Pour le traitement systémique de la DA, de la ciclosporine et du méthotrexate sont généralement prescrits. La ciclosporine est plus fréquente, mais le méthotrexate et les corticoïdes oraux sont également couramment prescrits, notamment en traitement systémique de première ligne.
La ciclosporine induit une réponse plus rapide, mais le méthotrexate permet une meilleure réponse en tant que traitement d’entretien.
En conclusion, le Pr Aoki a expliqué que les nouvelles thérapies ciblées sont prometteuses (anticorps monoclonaux, petites molécules, inhibiteurs de JAK), tout en rappelant que la ciclosporine et les corticoïdes systémiques ne sont pas indiqués pour le traitement de la DA au long cours.
Dr Bruno Duarte (Lisbonne, Portugal)
Depuis 2017, il existe de nouveaux traitements ciblés et axés sur la pathogénie. Ils se divisent en deux catégories : les biologiques (dupilumab et tralokinumab) et les inhibiteurs de JAK (baricitinib, upadacitinib, abrocitinib).
Les biologiques inhibent l’action biologique d’une ou plusieurs cytokines. Bien que relativement sans danger, ils présentent malgré tout des effets indésirables légers à modérés : des affections oculaires superficielles de type conjonctivite et un érythème de la tête et du cou associé au dupilumab.
Les inhibiteurs de JAK inhibent un éventail plus large de cytokines. Leurs effets indésirables sont l’acné, l’hyperséborrhée, les troubles de la fonction intestinale et le zona.
Les biologiques sont privilégiés chez les patients qui présentent un risque supérieur d’infection et de malignité, chez les patients âgés, en cas de comorbidité et chez les patientes qui envisagent une grossesse. Les inhibiteurs de JAK, eux, sont recommandés quand une action très rapide est nécessaire.
En conclusion, il est recommandé de choisir en concertation avec le patient le traitement systémique qui correspond le plus aux préférences de ce dernier et aux caractéristiques de la maladie.
Orateurs : Dr Richard Brans, Dr Marie-Louise Shuttelaar, Pr Suzana Ljubojevic, et Pr Luca Stingeni
Compte rendu rédigé par Dr Lucija Vanjaka-Rogošić
Dr Richard Brans (Osnabrück, Allemagne)
L’eczéma des mains est une maladie de peau inflammatoire non contagieuse qui touche les mains et présente plusieurs étiologies et morphologies.
L’eczéma des mains peut être aigu (il dure moins de 3 mois consécutifs ou survient seulement une fois par an) ou chronique (il dure plus de 3 mois consécutifs ou rechute plus de deux fois par an).
La classification de l’eczéma des mains ne fait pas consensus. Du point de vue de l’étiologie, l’eczéma des mains peut être lié à la dermatite atopique, la dermatite de contact irritative, la dermatite de contact allergique ou la dermatite de contact aux protéines. En ce qui concerne la morphologie, l’eczéma des mains peut être hyperkératosique, vésiculeux aigu récidivant, nummulaire ou prendre la forme d’une pulpite sicca (squames et fissures au bout des doigts).
En général, l’eczéma des mains apparaît entre 20 et 30 ans et touche plus fréquemment les femmes. L’eczéma des mains d’origine professionnelle est la maladie professionnelle la plus fréquente. En effet, ce sont souvent les mains qui sont exposées aux substances nocives pour la peau (coiffeurs et coiffeuses, professionnels de santé, ouvriers de chantier ou métallurgistes).
Le Dr Brans recommande de recueillir attentivement les antécédents médicaux, notamment l’exposition dans la sphère privée et professionnelle, en complément d’un examen clinique de l’ensemble du corps (ne pas oublier les pieds !). Le test épicutané est à réaliser systématiquement lorsque l’eczéma des mains dure depuis plus de 3 mois, chez les patients qui ne répondent pas à un traitement adapté ou en cas de suspicion clinique d’allergie de contact.
Les biomarqueurs de l’eczéma des mains sont importants afin d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques ou en tant que facteurs prédictifs de la réponse au traitement.
Pour le traitement standard de l’eczéma des mains, il est recommandé d’éviter les allergènes cliniquement pertinents, de porter des gants de protection, d’utiliser des émollients et de sensibiliser aux questions de santé. En cas d’eczéma des mains presque indiscernable, les corticoïdes locaux modérés ou le tracrolimus en pommade sont recommandés. En cas d’eczéma des mains modéré, des corticoïdes locaux modérés à puissants sont recommandés, tout comme le tacrolimus en pommade ou la photothérapie. En cas d’eczéma des mains sévère / très sévère, des corticoïdes locaux modérés et puissants sont recommandés. Il est également possible de prescrire de l’alitrétinoïne, seul traitement systémique autorisé face à l’eczéma des mains, mais pas dans tous les pays.
De nouveaux traitements médicamenteux, tels que les inhibiteurs des IL-4/IL-13 (dupilumab) et les inhibiteurs de JAK (topique) comme le delgocitinib, le ruxolitinimib et le tofacinitib, font encore l’objet d’études / essais.
En conclusion, pour la prise en charge de l’eczéma des mains, le Dr Brans recommande d’associer des mesures préventives et un traitement adapté en fonction du degré de sévérité de la maladie.
Dr Marie-Louise Shuttelaar (Groningue, Pays-Bas)
La dermatite de contact allergique (DCA) apparaît généralement dans la zone exposée, directement au contact de l’allergène dans les cas les plus évidents.
La DCA ne prend pas systématiquement la forme d’un eczéma ; il faut y penser en cas de DCA bulleuse, d’angio-œdème, de DCA linchénoïde, de DCA associée à une réaction pustuleuse, semblable à un érythème multiforme ou associée à un purpura ou à une réaction granulomateuse. C’est pourquoi il est toujours recommandé de réaliser un test épicutané.
Pr Suzana Ljubojevic (Zagreb, Croatie)
L’hypersensibilité de contact et la dermatite de contact allergique (DCA) sont deux choses différentes.
La DCA se caractérise obligatoirement par une hypersensibilité de contact, une dermatite et une exposition cliniquement pertinente à l’allergène en question. Les antécédents médicaux du patient sont très importants.
À l’heure actuelle, de nombreuses réactions d’hypersensibilité sont dues à des produits faits maison, car les gens pensent souvent qu’en confectionnant eux-mêmes leurs produits cosmétiques, ils obtiendront un résultat plus sain, dénué de substances chimiques. En 2023, les allergènes les plus fréquemment responsables des DCA sont la lanoline, le nickel, l’aluminium et les acrylates / méthacrylates.
Il convient de réfléchir aux allergènes présents dans les dispositifs médicaux (capteurs de glycémie Freestyle) ou dans les masques chirurgicaux.
Les dermatites induites par les consoles de jeu / appareils électroniques sont aussi très fréquentes chez les patients jeunes, qui sont exposés au caoutchouc et au plastique présents dans le matériel de jeu.
Il est important de souligner la pertinence des antécédents et de l’exposition aux allergènes et le rôle prépondérant du test épicutané.
Pr Luca Stingeni (Corciano, Italie)
Le test épicutané est la procédure standard pour le diagnostic de la DCA. Or les résultats dépendent en grande partie de la personne qui réalise ce test et peuvent être influencés par différentes procédures.
Les pièges du test épicutané sont les suivants :
Le choix du véhicule et de la concentration utilisés dans le test épicutané est très important pour réaliser cet acte correctement. Il est par ailleurs important de lire les résultats une seconde fois, à J2, J3, J4 et J7. En effet, une seconde lecture des résultats entre J3 et J7 est essentielle pour détecter la plupart des réactions allergiques.
L’utilisation des corticoïdes locaux, de certains métaux, de la némycine, de certains colorants, des acrylates et de certains conservateurs peut retarder la réaction au test épicutané. L’interprétation des réactions positives au-delà de J7 est délicate, car ces dernières peuvent refléter une sensibilisation nouvellement acquise, plutôt qu’une réaction à retardement.
Il est par ailleurs important de réfléchir aux immunosuppresseurs, dont la durée de l’inhibition n’est pas clairement définie. Les immunothérapies anti-TNF-alpha et anti-IL-12/IL-13 n’ont pas d’effet inhibiteur sur les tests épicutanés.
En cas de dermatite active, le test épicutané est à réaliser alors que la dermatite est quiescente depuis au moins une semaine. Les dermatites chroniques au niveau des mains, des pieds et du visage n’ont généralement aucun impact sur les résultats du test épicutané.
Le syndrome de la peau excitable ou « angry back » correspond à plusieurs réactions positives concomitantes aux tests épicutanés. Il est souvent induit par une dermatite concomitante ; un pré-traitement par de la cyclosporine à faible dose peut être administré pendant 7 jours avant de recommencer le test.
Pour des raisons médicolégales, le test épicutané est déconseillé chez la femme enceinte ou allaitante.
En conclusion, le Pr Stingeni a rappelé que n’importe quel médecin peut réaliser un test épicutané, mais seuls les spécialistes savent les interpréter correctement.
Orateurs : Pr Danica Tiodorović, et Pr Caterina Longo
Compte rendu rédigé par Dr Lucija Vanjaka-Rogošić
Pr Danica Tiodorović (Niš, Serbie)
Le mélanome à extension superficielle (SSM) est le type de mélanome le plus fréquent. Il touche habituellement une population plus jeune et représente 60 % des mélanomes cutanés.
Chez l’homme, le SSM est localisé dans le dos, tandis que chez la femme, il est localisé dans les membres inférieurs.
À la dermoscopie, le SSM présente une forme multicomposante et multicolore (3 couleurs ou plus).
Caractéristiques dermoscopiques du SSM à un stade précoce :
Le Pr Tiodorović suggère de ne pas se concentrer sur le diamètre quand il s’agit de diagnostiquer le SSM à un stade précoce. La règle ABCD ne fonctionne pas toujours. Il est recommandé d’examiner l’ensemble du corps et de chercher les caractéristiques subtiles à la dermoscopie.
Pr Caterina Longo (Modène, Italie)
Au début de sa présentation, le Pr Longo nous a expliqué comment choisir les types de patients qui sont de bons candidats à une photographie du corps entier. Il est ensuite recommandé de prévoir un suivi chez les patients présentant un grain de beauté atypique ou un syndrome FAMMM (mélanomes atypiques multiples familiaux).
Les lésions aux caractéristiques suivantes sont à surveiller :
Chez ces patients, il convient de mettre en place un suivi tout au long de la vie en raison du risque supérieur de mélanome. D’un autre côté, la plupart des mélanomes surviennent « de novo », dans 70 % des cas, sans lésion précurseur.
Bien que les nouveaux dispositifs médicaux soient très utiles, il est recommandé de conserver un regard critique en ce qui concerne l’intelligence artificielle.
En conclusion, le Pr Longo a souligné que la photographie du corps entier et la surveillance numérique sont à proposer aux patients qui présentent un grain de beauté atypique, un syndrome FAMMM et des antécédents de mélanome. Les nouveaux outils peuvent permettre de standardiser les procédures et d’aller plus vite.
En fin de compte, la surveillance régulière tout au long de la vie est une question clé dans la prise en charge des patients à haut risque.
Orateur : Pr Sonja Ständer
Compte rendu rédigé par Pr Mirjana Milinković Srećković
Pr Sonja Ständer (Münster, Allemagne)
Le Pr Ständer a évoqué le lien entre les démangeaisons et le cerveau. Pour illustrer la sensation associée aux démangeaisons, elle a rappelé l’expérience menée par le passé : les sujets étaient répartis en deux groupes ; un groupe se grattait sans démangeaison (aucune induction de prurit), tandis que l’autre se grattait avec démangeaisons (prurit induit par du pois mascate). Il s’agissait de patients présentant un prurit chronique (CP) et de témoins en bonne santé (HC). Résultat : chez les patients CP, le grattage était perçu comme agréable, qu’il y ait ou non des démangeaisons induites par du pois mascate. Le grattage seul était associé à une hausse significative de l’activité cérébrale chez les sujets CP comparativement aux sujets HC. Chez les sujets CP, l’IRM détectait une activité supérieure au niveau des zones du cerveau qui participent au système de récompense. Le Pr Ständer a soulevé la question du grattage addictif observé chez les patients CP, grattage qui induit peut-être une hypersensibilité neuronale ou qui y contribue. Elle nous a montré le cycle du prurit et du grattage, dans le cadre duquel le grattage addictif active le système de récompense, augmente l’expression des récepteurs aux pruritogènes au niveau du rachis, induit une hypersensibilité neuronale et altère la neuro-anatomie cutanée.
Le Pr Ständer a par ailleurs évoqué un examen systématique des instructions cérébrales et verbales, avant de conclure que les instructions verbales exercent peut-être une influence considérable sur le résultat attendu. Il est possible que les démangeaisons soient modulées par les effets placebo et nocebo. Le Pr Ständer a ensuite expliqué le cerveau et le paramètre physiologique, en citant l’exemple du conditionnement pharmacologique, qui a fait l’objet d’une autre analyse systématique. Cette dernière a montré des données solides selon lesquelles les fonctions immunitaires peuvent être modulées via un conditionnement comportemental. Par exemple, quand de la cyclosporine est administrée tout en stimulant le goût (conditionnement), une nouvelle exposition au même stimulus du goût, sans administration de cyclosporine, réduit significativement les niveaux d’IL-2 (dans les PBMC), même plusieurs jours après le conditionnement. Un autre exemple, publié récemment, utilisait des instructions cérébrales et verbales.
Les démangeaisons elles-mêmes sont une source de stress, entraînent une perte de sommeil et une détérioration de la qualité de vie. Or le stress active l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS). Des études récentes ont montré que les kératinocytes sécrètent des hormones du stress (CRH, ACTH), phénomène qui est exacerbé en cas de psoriasis, par exemple. Enfin, le Pr Ständer nous a expliqué le cycle qui unit cerveau et peau, explorant les liens entre inflammation, troubles du sommeil et fonction neurocognitive chez les patients présentant une dermatite atopique. Les effets placebo et nocebo provoquent des démangeaisons, qui entraînent elles-mêmes un stress, une activation de l’axe HHS et une inflammation. Ce phénomène favorise les démangeaisons, la dépression et l’anxiété, le grattage et l’activation du système de récompense. Le grattage lui-même, via la neurosensibilisation et la hausse des pruritogènes, favorise également l’activation du système de récompense au niveau du cerveau. Il d’agit là d’un véritable cercle vicieux...
Orateurs : Dr Josep Malvehy, et Pr Marco Romanelli
Compte rendu rédigé par Pr Mirjana Milinković Srećković
Dr Josep Malvehy (Barcelone, Espagne)
Ce sujet étant moderne et probablement méconnu de nombreux dermatologues, le Dr Malvehy a tout d’abord présenté plusieurs définitions.
Le Dr Malvehy a ensuite présenté les domaines concernés par l’utilisation de l’IA dans le champ médical :
Dans la pratique, les procédures suivantes ont été suggérées : traitement automatique du langage naturel, avatars et imagerie profonde, capteurs et biométrique, ML pour les analyses complexes, IA générative, robotique pour la chirurgie et le laser, nanotechnologies pour l’administration des traitements, IA pour le suivi des patients et pour l’aide aux patients.
Le phénotypage profond et la médecine de précision sont utilisés dans les domaines suivants : démographie, données cliniques, imagerie, biocapteurs, génomique, transcriptomique, protéomique, métabolomique, microbiomique, épigénomique, exosomique, radiomique et dermatomique - phénotypage « profond » par imagerie.
Le Dr Malvehy nous a montré de nombreuses illustrations de techniques cliniques et de techniques nouvelles associant plusieurs imageries dans l’examen des lésions pigmentaires. Il nous a ensuite présenté la mesure du photovieillissement par OCT linéaire confocale (LC-OCT) selon différentes techniques. Puis il nous a montré l’évaluation non invasive de l’atypie cellulaire dans les cancers kératinocytaires au moyen de l’apprentissage profond sur LC-OCT en 3D. Il nous a fait un exposé fascinant des dispositifs médicaux qui utilisent l’analyse moléculaire non invasive : la biopsie par patch adhésif, très facile à réaliser, suffit pour évaluer objectivement l’expression de certains gènes (absence ou présence d’un cancer de la peau) ; analyse de l’ARN dans la couche cornée et récupération des informations génomiques au niveau de l’épiderme (EGIR). D’après le profil d’expression du gène LINC00518 (long intergenic non-protein RNA 518) et du gène PRAME (preferentially expressed antigen in melanoma) au niveau des échantillons de tissu cutané prélevés via des patchs adhésifs, l’IA parvient à classer correctement les lésions pigmentaires selon une sensibilité de 92 % et une spécificité de 69 %. Tous ces résultats auraient été inimaginables jusqu’à récemment. Le traitement automatique du langage naturel semble appelé à être utilisé facilement au quotidien dans un avenir proche.
Dans le champ de la dermatologie, l’apprentissage automatique peut actuellement être appliqué dans cinq domaines :
L’apprentissage automatique comprend l’apprentissage profond (réseau neuronal convolutif et apprentissage statistique), le traitement automatique du langage naturel, les séparateurs à vaste marge et les forêts d’arbres décisionnels.
Le Dr Malvehy a ensuite décrit l’expérience de l’homme face à la machine. Il s’agissait d'évaluer l’efficacité d’un réseau neuronal convolutif comparativement à 58 dermatologues pour ce qui est de reconnaître un mélanome via la dermoscopie. Parallèlement, la précision de l’homme est actuellement comparée aux algorithmes d’apprentissage automatique quant à la classification des lésions pigmentaires. Cette étude diagnostique internationale ouverte, sur Internet, produit de très bons résultats.
À noter que l’EADV a formé un groupe de travail autour de l’IA. « Le groupe de travail sur l’IA a pour mission d’influencer, favoriser et développer ce domaine de la dermatologie et de la vénérologie de manière à fournir aux membres de l’EADV un mécanisme afin qu’ils s’impliquent davantage dans l’utilisation de l’IA. L’objectif est également de mettre en place des liens avec les sous-spécialités existantes et les autres sociétés scientifiques et professionnelles, notamment en matière de santé et de santé numérique. » La feuille de route est la suivante :
Enfin, le Dr Malvehy nous a présenté le dispositif médical skinScan. Ce dispositif médical de classe 1 (marquage CE) fournit des informations utiles concernant les lésions pigmentaires et l’auto-examen de la peau. TeleSkin ApS souhaite aider les patients à examiner et surveiller eux-mêmes leurs grains de beauté. Cet algorithme exclusif permet aux utilisateurs de repérer les grains de beauté atypiques selon une sensibilité de 90 %. Disponible dans les pays scandinaves depuis plus d’un an, cet outil est proposé depuis peu en Australie et en Nouvelle-Zélande. Plusieurs utilisateurs ont indiqué que cette application les avait aidés à identifier des grains de beauté atypiques qui posaient problème et qui s’étaient révélés être des mélanomes, d’après le diagnostic établi par des médecins.
Néanmoins, l’article récemment publié par le JEADV (prise de position du groupe de travail de l’EADV sur l’intelligence artificielle [IA] concernant les applications pour smartphones et les services Internet assistés par l’IA face aux pathologies cutanées) invite à se pencher sur les grandes considérations suivantes : le risque associé au manque d’exactitude et à une mauvaise formation des utilisateurs ; le déclin des compétences professionnelles ; l’influence des intérêts commerciaux non médicaux ; la protection des données ; les coûts directs et indirects ; l’approbation réglementaire et la nécessité d’une mise en œuvre pluridisciplinaire. Les principales recommandations du groupe de travail de l’EADV sur l’IA sont les suivantes :
Lorsque l’IA sera largement acceptée dans la pratique clinique, les médecins pourraient être tenus responsables en cas d’incapacité à utiliser les logiciels et les aides au diagnostic disponibles. Par ailleurs, la question de la responsabilité pourrait devenir complexe si le praticien et le logiciel émettent des conclusions divergentes. La responsabilité est donc un point juridique important sur lequel réfléchir.
Dr Marco Romanelli (Pise, Italie)
Pour commencer, le Dr Romanelli a abordé la prise en charge de l’HS sous l’angle des différentes pathologies et comorbidités. Il nous a montré le laboratoire d’échographie cutanée de Pise, en Italie. Ce laboratoire est équipé d’une échographie haute fréquence (HFUS) 18-22 MHZ et ultra haute fréquence (UHFUS) > 30 MHz (48-70 MHz). Il a ensuite énuméré les critères de diagnostic de l’HS à l’échographie (au moins 3 sont requis) :
Le Dr Romanelli nous a rappelé le score clinique échographique (SOS-HS) :
Ensuite, le Dr Romanelli nous a montré de nombreuses illustrations du lien entre tableau clinique, échographie et histopathologie en utilisant à la fois des appareils de HFUS et UHFUS à différentes fréquences pour un diagnostic précoce de l’HS. Après cela, il a évoqué l’évaluation objective de l’HS, tout en comparant l’évaluation clinique et échographique. L’évaluation clinique est associée à une sous-estimation de la sévérité et à des descriptions compliquées des lésions. L’évaluation échographique est davantage cohérente d’un médecin à l’autre comparativement aux scores cliniques comme la classification de Hurly, le score modifié Sartorius et la numération des abcès et nodules. Chez 44,7 % des patients, le stade I de Hurly a été réévalué en un stade II ou III, nécessitant un plan thérapeutique différent. En ce qui concerne l’échographie et le traitement de l’HS, une modification de la prise en charge clinique a été observée chez 82 % des patients et le passage à un traitement médicamenteux ou chirurgical a été observé dans 24 % des cas. Par ailleurs, l’écho-doppler couleur peut modifier la prise en charge de l’HS chez 80 % des patients. Il est déconseillé de suspendre le traitement des patients uniquement à partir de l’examen clinique. Par conséquent, l’échographie occupe une place importante dans la surveillance du traitement médical. Enfin, le Dr Romanelli a montré l’importance de l’échographie dans la cartographie avant la chirurgie / le laser. En cas d’exérèse échoguidée, le risque de récidive est moins important.
En conclusion, l’examen clinique seul sous-estime parfois la sévérité de l’HS. Les critères échographiques permettent un diagnostic précoce et plus précis, ainsi qu’une meilleure stadification de l’HS. L’échographie oriente le choix et le suivi du traitement. Elle permet une prise en charge plus efficace. Néanmoins, elle dépend de l’opérateur et nécessite une formation spéciale en ce qui concerne l’HS.
Orateurs : Pr Wolf-Henning Boehncke, Pr Carle Paul, Pr Paolo Gisondi, et Pr Evangelia Papadavid
Compte rendu rédigé par Pr Mirjana Milinković Srećković
Pr Wolf-Henning Boehncke (Genève, Suisse)
Le rhumatisme psoriasique (RPso) est une pathologie difficile à diagnostiquer de par ses multiples facettes. Le Pr Boehncke a tout d’abord expliqué les critères du GRAPPA 5 (Group for Research and Assessment of Psoriasis and Psoriatic Arthritis) et le schéma thérapeutique face au RPso. Il est important de déterminer les domaines d’expression de la maladie, les préférences du patient, les antécédents thérapeutiques et les traitements concomitants, l’objectif étant de choisir un traitement qui couvre le plus de zones possible. Les domaines d’expression du RPso sont les suivants : spondylarthrite périphérique, spondylarthrite axiale, enthésite, dactylite, psoriasis (peau / cuir chevelu), psoriasis de l’ongle, maladie inflammatoire chronique de l'intestin (MICI) et uvéite. Les comorbidités et les maladies associées au RPso peuvent influencer le choix du traitement et/ou orienter le suivi. Il est recommandé de traiter, de ré-évaluer régulièrement les objectifs du traitement et de modifier ce dernier si nécessaire. Le RPso et la spondylarthrite axiale peuvent toucher un ou plusieurs des six domaines d’expression clinique identifiés par le GRAPPA.
Il est important de dépister le RPso en cas de psoriasis. Mais qui doit-on plus particulièrement dépister ? Le Pr Boehncke a fourni 3 réponses :
Les facteurs de risque du RPso sont les suivants : psoriasis de l’ongle, RPso chez un parent au premier degré, psoriasis sévère, arthralgies, antécédents d’uvéite, obésité, psoriasis au niveau du cuir chevelu, RPso chez un parent au deuxième degré, 1 ou plusieurs gènes associés à une susceptibilité.
Les signes d’anomalie synovio-enthéséale asymptomatique à l’IRM sont les suivants : enthésite, œdème médullaire, synovite, tendinite, érosions et nouvelles formations osseuses. Les signes à l’échographie sont les suivants : enthésite, synovite, tendinite et érosions.
Les symptômes sans autre explication sont les suivants : douleur dans les talons, ankylose et arthralgies.
Le Pr Boehncke a évoqué l’utilisation de l’échographie par les dermatologues. Si l’échographie est largement utilisée dans la prise en charge du RPso, des études supplémentaires sont nécessaires pour identifier les facteurs prédictifs d’une évolution du psoriasis en un RPso. Il est également nécessaire de déterminer la plupart des caractéristiques permettant de distinguer le RPso des autres pathologies à l’échographie. Une formation à l’utilisation de l’échographie musculosquelettique à l’aide d’un système portable innovant pour les dermatologues est en cours d’élaboration et de validation, dans le cadre de l’étude MUDE (Musculoskeletal ultrasound in dermatology). Enfin, le Dr Boehncke nous a montré l’imagerie par fluorescence, biomarqueur prometteur et facile à utiliser pour augmenter la détection précoce du RPso chez les patients présentant un psoriasis.
À noter que l’EULAR (European League Against Rheumatism) s’attache actuellement à définir les caractéristiques cliniques et à l’imagerie des patients qui présentent une évolution présumée du psoriasis en RPso. L’objectif est de trouver une méthode de traitement capable d’atténuer, de retarder, voire de prévenir le RPso. Les données montrent que les biologiques retardent l’apparition du RPso comparativement aux traitements topiques, à la photothérapie et aux csDMARD (données publiées en 2023).
En résumé, le Pr Boehncke a souligné les éléments suivants :
Pr Carle Paul (Toulouse, France)
Le Pr Paul a parlé de la souffrance psychologique que subissent les patients atteints de psoriasis. Enfants comme adultes, ils sont victimes d’une stigmatisation dans le monde entier. En quels termes ces patients expriment-ils leur souffrance ? Ils expriment de l’anxiété et de la honte, une grande fatigue, une faible estime de soi, de la confusion émotionnelle, ils ont l’impression d’être en guerre contre leur propre peau. Le psoriasis est une pathologie défigurante, difficile à supporter, qui restreint les tenues vestimentaires possibles, les loisirs et autres activités, qui isole sur le plan social et qui pousse les patients à éviter les relations intimes. Le Pr Paul a présenté les résultats d’une étude concernant le fardeau psychologique plus lourd en cas de psoriasis comparativement à d’autres problèmes de peau. En effet, une étude européenne de grande ampleur a récemment mis en évidence la stigmatisation engendrée par le psoriasis, le vitiligo et la pelade. En ce qui concerne l’impact du psoriasis sur les relations sociales, les patients ont rapporté les sentiments suivants : ils ont l’impression qu’on les dévisage (84 %) ; ils ont peur et culpabilisent à l’idée de transmettre le psoriasis à leurs enfants (76 %) ; ils préfèrent ne pas être vus en public pendant les poussées (74 %) ; ils dissimulent leur psoriasis derrière des vêtements longs (64 %) ; ils se sentent exclus (48 %) ; ils sont réticents à l’idée d’avoir des contacts physiques courants (serrer la main, prendre dans les bras ; 30 %) ; il arrive même qu’on leur demande de quitter des piscines publiques ou des salles de sport (20 %). Ensuite, le Pr Paul a présenté un exemple très instructif, issu de sa propre pratique clinique.
Il a demandé quelle approche adopter face au poids psychologique du psoriasis. Des éléments de réponse importants :
Quelques éléments d’une consultation bienveillante :
Les programmes d’information à destination des patients atteints de psoriasis doivent être constitués de séances individuelles ou en groupe et aborder le mécanisme de cette pathologie, le parcours clinique, l’impact du psoriasis, le traitement, les stratégies pour supporter la maladie et les comorbidités. Ces programmes doivent faire appel à des médecins, du personnel infirmier et des psychologues. Leur contenu et leur intensité doivent varier. À noter qu’ils peuvent améliorer le bien-être des patients, leur qualité de vie, leur confiance en soi et leur connaissance de leur maladie. Or il est primordial de donner aux patients les armes pour contrôler eux-mêmes leur psoriasis. Les programmes d’information structurés à destination des patients permettent d’améliorer leurs connaissances, leur confiance en soi et leur observance.
Les entretiens motivationnels doivent répondre aux grands principes suivants : écouter les patients ; éviter de chercher à les corriger ; soutenir les patients ; chercher à connaître et comprendre les motivations des patients et poser des questions ouvertes.
Face au psoriasis, l’approche psychothérapeutique comprend les aspects suivants : une approche psychodynamique ; une thérapie cognitive et comportementale ; et une relaxation en pleine conscience avec biofeedback. Certains essais comparatifs randomisés ont montré que la pleine conscience et la méditation ou la thérapie cognitive et comportementale permettent:
En conclusion, le Pr Paul a souligné que le poids psychologique du psoriasis se compose des aspects suivants : un sentiment de perte et de deuil ; une qualité de vie et un bien-être altérés ; une stigmatisation ; de l’anxiété et de la dépression ; des troubles du sommeil ; de l’alexithymie ; de l’isolement ; des addictions (tabagisme, alcoolisme, troubles alimentaires). En tant que médecins bienveillants, nous sommes en capacité d’aider les patients en faisant preuve de positivité et de leur donner les clés pour reprendre espoir et confiance, retrouver leur liberté et leur bonheur.
Cette présentation s’est terminée par un débat enrichissant concernant la nécessité que les dermatologues se forment suffisamment afin d’aider leurs patients à supporter le fardeau du psoriasis.
Pr Paolo Gisondi (Vérone, Italie)
Le Pr Gisondi a commencé par nous présenter l’un de ses cas de psoriasis, associé à un syndrome métabolique grave et un trouble dépressif. Il a expliqué que le syndrome métabolique correspond à la présence d’au moins 3 critères parmi les suivants : un tour de taille élevé (> 88 cm chez la femme et > 102 cm chez l’homme) ; des triglycérides élevés (> 150 mg/dl), un faible taux de cholestérol HDL (< 40 mg/dl chez l’homme et < 50 mg/dl chez la femme) ; une hypertension artérielle ; une glycémie à jeun élevée (≥ 100 mg/dl). En cas de psoriasis, le syndrome métabolique est au moins deux fois plus prévalent chez les 30-60 ans, comparativement aux groupes témoin. La stéatose hépatique non alcoolique englobe un large éventail de stéatoses hépatiques chez des patients qui ne consomment pas une quantité importante d’alcool (2-3 verres par jour ou moins) et sans autre cause courante (traitements contre les hépatites virales). La stéatose hépatique non alcoolique est idiopathique, associée à une résistance à l’insuline et à un syndrome métabolique, ou secondaire à une maladie gastro-intestinale, un traitement, une infection ou des agents toxiques présents dans l’environnement. Alors qu’elle est de 15-25 % parmi la population générale, la prévalence de la stéatose hépatique non alcoolique dépasse 40 % chez les patients obèses ou diabétiques. Le Pr Gisondi a par ailleurs présenté une nouvelle définition de la stéatose hépatique associée à des troubles métaboliques (consensus de spécialistes internationaux) dans un contexte d’obésité ou de poids normal, ou en présence d’un diabète de type 2. Il est important de détecter tôt la stéatose hépatique via l’imagerie, les biomarqueurs / scores sanguins ou l’histologie hépatique. Des études ont montré un risque de stéatose hépatique non alcoolique presque deux fois plus élevé en cas de psoriasis, ainsi qu’une prévalence supérieure de scores PASI ≥ 10, comparativement aux scores PASI < 10.
Le Pr Gisondi s’est ensuite interrogé sur le pourquoi de cette association, tout en présentant la pathogénie. En effet, il est possible que les médiateurs de l’inflammation libérés au niveau des lésions psoriasiques aient des effets systémiques. Les cytokines (TNF-α, IFN-α, IFN-γ, IL-1, IL-6, IL-17) ont un effet sur le foie (augmentation de l’homocystéine, de la CRP, des fibrinogènes), sur les tissus adipeux (augmentation de la chémérine, de la leptine, de la résistine, du LDL, des triglycérides, mais baisse de l’adiponectine et du HDL) et sur le système musculosquelettique (résistance à l’insuline), ce qui entraîne une dysfonction endothéliale et une athérosclérose. Il est possible que l’inflammation psoriasique favorise l’évolution du foie normal en une staétose hépatique non alcoolique.
Le Pr Gisondi a alors posé la question de l’impact du syndrome métabolique sur le choix du traitement face au psoriasis. Il a évoqué les effets indésirables des différents traitements systémiques sur la dyslipidémie, l’hypertension artérielle, l’obésité, l’intolérance au glucose / le diabète, les troubles hépatiques, la rectocolite hémorragique. Quel traitement systémique privilégier en cas d’obésité ? La posologie de l’infliximab et de l’ustékinumab est déterminée en fonction du poids du patient, en sachant que ces deux molécules sont idéales pour traiter le psoriasis chez les patients obèses. Les inhibiteurs de l’IL-17 sont très efficaces, quel que soit le poids du patient, bien que le taux de clairance soit supérieur chez les patients qui ne sont pas obèses. L’aprémilast peut être privilégié en cas d’obésité, dans la mesure où la perte de poids fait partie de ses effets secondaires. Le méthotrexate est associé à un risque supérieur de stéatose hépatique et de fibrose hépatique en cas d’obésité. Pour l’acitrétine et la cyclosporine, une dose supérieure est nécessaire en cas d’obésité, si bien que les effets indésirables et la toxicité potentielle présentent une incidence plus élevée chez ces patients.
En conclusion, le Pr Gisondi a remarqué que le psoriasis modéré à sévère est souvent associé à des troubles métaboliques qui représentent un facteur de risque cardiovasculaire. Le choix du traitement doit tenir compte de plusieurs facteurs, notamment : la sévérité et la localisation du psoriasis ; les comorbidités, y compris cardio-métaboliques ; l’impact du psoriasis sur la qualité de vie.
Pr Evangelia Papadavid (Athènes, Grèce)
Le Pr Papadavid a mis en lumière la prévalence du psoriasis au niveau des localisations particulières / importantes / difficiles :
Par ailleurs, au niveau des ongles, du cuir chevelu et des régions intertrigineuses, le psoriasis est associé à un risque supérieur de RPso. Dans tous les cas, les patients présentent des symptômes et une baisse de leur qualité de vie. Leurs difficultés physiques et psychologiques augmentent de manière disproportionnée.
Dans les localisations difficiles, le psoriasis est parfois mal ou insuffisamment diagnostiqué. D’ailleurs, le diagnostic initial du psoriasis localisé est compliqué : d’une part, les médecins sont mal informés et d’autre part, les patients sont réticents. Il n’est pas rare que d’autres dermatoses soient diagnostiquées, à tort (cuir chevelu = dermatite séborrhéique ; visage = rosacée ; régions intertrigineuses = dermatite, érythrasma ; paumes et plante des pieds = eczéma ; région génitale = infection ; ongles = onychomycose).
Le Pr Papadavid nous a montré les recommandations en ce qui concerne la prise en charge des localisations difficiles. Elle a commencé par l’algorithme thérapeutique face au psoriasis du cuir chevelu, publié en 2021. Quelle que soit la sévérité du psoriasis, en cas d’échec du traitement local, il est recommandé de passer à un traitement systémique. Le Pr Papadavid a ensuite présenté l’algorithme thérapeutique du GRAPPA face au psoriasis des ongles. Ce sont désormais les biologiques qui sont préconisés en première ligne. Elle nous a montré des exemples de sa propre pratique clinique et nous a parlé des données en conditions réelles concernant le sécukinumab au niveau de localisations bien précises. Ensuite, le Pr Papadavid nous a présenté une étude montrant que le guslékumab possède une efficacité au long cours supérieure comparativement au sécukinumab pour ce qui est de la clairance cutanée. Là encore, elle nous a montré des cas issus de sa propre pratique clinique. Enfin, elle a montré l’efficacité du risankizumab face au psoriasis de l’ongle, du cuir chevelu et palmoplantaire. À noter que les résultats sont meilleurs chez les patients naïfs de biologiques. Il s’agit là d’une précision très importante lorsqu’il s’agit d’optimiser le traitement précoce. En conclusion, d’après les données en conditions réelles, les meilleures options thérapeutiques au niveau des localisations difficiles sont les inhibiteurs de l’IL-17 et IL-23.
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