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Coup d’œil du congrès des Journées Cicatrisations 2025
Coup d’œil du congrès des Journées Cicatrisations 2025
Article rédigés par Dr Hester Colboc
Dermatologue & Gériatre - Plaies et cicatrisations - Hôpital Rothschild - AP-HP
Membre du Comité Scientifique des Journées Cicatrisations
Par
Hester COLBOC
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D’après les communications orales de Priscille Carvalho (Rouen), Emmanuelle Amsler (Thenon) & Sylvie Meaume (Paris)
Cette session commence par aborder la cosmétologie de la peau périlésionnelle (Dr Priscille Carvalho, Rouen). La peau périlésionnelle, entourant la plaie aigue ou chronique, joue un rôle essentiel dans le processus de cicatrisation. Souvent fragilisée par divers facteurs, elle nécessite des soins spécifiques pour prévenir les complications et favoriser une cicatrisation optimale. La peau périlésionnelle des plaies chroniques, qui touchent principalement une population âgée, présente souvent une fragilité accrue, conséquence du vieillissement cutané. Certaines personnes âgées présentent une dermatoporose, avec une extrême atrophie cutanée, rendant notamment celle-ci plus vulnérable aux déchirures cutanées en cas d’application de pansement adhésif.
Les soins de la peau périlésionnelle nécessitent donc une approche personnalisée en tenant compte de plusieurs éléments tels que les comorbidités du patient, l’évolution de la plaie, les antécédents allergiques et la gestion de la douleur. Pour garantir une prise en charge efficace, plusieurs produits cosmétiques peuvent être utilisés en fonction des besoins de la peau périlésionnelle. Un produit lavant doux, type syndet, permet un nettoyage sans agression de la peau périlésionnel. L’application régulière d’un émollient est essentielle pour lutter contre la xérose, également particulièrement fréquente chez la personne âgée, en utilisant des formulations riches en agents hydratants (baume). Les protecteurs cutanés, sous forme de crèmes ou de films barrières (souvent siliconés), peuvent être utiles sur la peau périlésionnelle des plaies très exsudatives. Enfin, des crèmes réparatrices contenant des actifs spécifiques comme le zinc pourraient contribuer à réduire l’inflammation et à favoriser la cicatrisation.
Il est important de rappeler que la prévention joue un rôle majeur dans la gestion de la peau périlésionnelle. Une utilisation systématique de soins adaptés dès l’apparition d’une plaie chronique permet de prévenir les complications, d’éviter les récidives et de faciliter la réalisation des soins. En conclusion, la cosmétologie de la peau périlésionnelle constitue un pilier fondamental dans la prise en charge des plaies chroniques, en complément des dispositifs médicaux, pour préserver l'état cutané et favoriser la cicatrisation. Une approche personnalisée et rigoureuse, intégrant des soins adaptés et une prévention proactive, permet de mieux protéger la peau, de favoriser la cicatrisation et d’améliorer le confort des patients.
Le Dr Sylvie Meaume (Paris) aborde par la suite la places des cosmétiques dans le soin des cicatrices. Les cosmétiques permettent à différents moments de la prise en charge des cicatrices de venir en aide aux malades. Le niveau de preuve de l’efficacité des différents dispositifs médicaux commercialisés reste faible et il est important d’informer sur la survenue d’événements indésirables, tant l’offre est grande en officine, grandes surfaces ou sur internet. À côté du soin à apporter aux cicatrices, le maquillage correcteur est également une proposition qui offre une amélioration de la qualité de vie des personnes porteuses de cicatrices inesthétiques, qui a en particulier été développée chez les brûlés, mais est disponible pour des cicatrices d’autres origine. Récemment une autre technique de camouflage de cicatrices utilisant des tatouages artistiques s’est développée permettant de transformer une cicatrice disgracieuse et affichante en un dessin plus acceptable socialement et psychologiquement.
La session se termine avec l’intervention du Dr Emmanuelle Amsler (Paris) qui aborde la cosmétologie et allergie, en particulier l'eczéma allergique de contact. L'eczéma allergique de contact (EAC) est une affection cutanée induite par divers agents tels que les antiseptiques, les pansements, les médicaments topiques et les produits cosmétiques. Il peut également survenir sous la forme d'eczéma manuporté, touchant alors fréquemment le visage. L'EAC représente environ 2 à 4 % des consultations dermatologiques, avec des allergènes fréquemment impliqués tels que le nickel, les molécules parfumantes, les conservateurs et les excipients. L’EAC causé par les produits cosmétiques touche le plus souvent le visage, avec une prédominance féminine. L'EAC peut aussi se présenter sous forme d'eczéma photo-allergique, qui n'apparaît qu'après une exposition aux rayons UV en plus du contact avec le produit incriminé.
Il est important de déconstruire certaines idées fausses concernant l’EAC :
Pour explorer la cause de l’EAC, il est crucial d'effectuer un interrogatoire minutieux pour identifier tous les produits topiques appliqués, y compris ceux perçus comme anodins, afin de déterminer l'origine de l'allergie et d'éviter les réactions futures. Enfin, pour confirmer le potentiel agent allergisant, le test d'application répétée est recommandé, et peut se faire simplement. Il suffit d’appliquer le produit suspecté deux fois par jour sur la même zone, sans le couvrir avec un pansement, pendant 10 jours, sauf en cas d'apparition précoce de l'eczéma.
D’après les communications orales de Cécile Rostin (Vannes), Cécile Moisan (Saint-Brieuc), Marion Mourgues (Montpellier), Sandrine Robineau (Rennes), Hester Colboc (Paris), Philippe Léger (Toulouse), Franck Duteille (Nantes), Anne Dompmartin (Paris) & Georges Ha Van (Paris)
Cette session présente les recommandations de bonne pratique élaborées par la Société Française et Francophone des Plaies et Cicatrisations concernant l'intégration de la télésanté pour améliorer la pertinence des soins et des parcours en matière de plaies et cicatrisations. Ces recommandations ont été émise avec la contribution de 6 autres sociétés savantes (la Société Française de Dermatologie, la Société Francophones du Diabète, la Société Française de Médecine Vasculaire, la Société Française de Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique et la Société de Chirurgie Vasculaire et Endovasculaire de Langue Française) et la également du Catel (coopérative en e-santé). Ces recommandations mettent en avant les atouts de la télésanté, ses indications, les types de patients concernés, la gradation des actes et les critères de qualité nécessaires pour une mise en œuvre efficace.
La télésanté offre plusieurs avantages pour la prise en charge des plaies, comme l’évaluation du contexte de vie du malade ou de sa tolérance aux traitements en s’appuyant sur l’aide du soignant présent auprès du patient. De plus, elle facilite l’orientation du patient dans son parcours de soins, qu’il s’agisse d’un triage ou d’une orientation vers une structure plus adaptée. La télésanté permet également de prescrire des traitements et des dispositifs médicaux, tout en soutenant les professionnels de santé de « première ligne » afin d'améliorer l’observance thérapeutique. En complément, elle offre la possibilité d’assister techniquement le professionnel requérant, grâce à la téléassistance médicale, et de favoriser la concertation entre plusieurs experts à distance. La télésanté peut être mise en œuvre partout où se trouve le patient, que ce soit à domicile, en établissement sanitaire ou médico-social, sous réserve de conditions techniques et organisationnelles adaptées. Elle doit être intégrée au parcours de soins du patient, en priorité sur son territoire de vie afin de garantir une continuité des soins efficace.
Tous les patients porteurs d’une plaie, sans limite d’âge, peuvent bénéficier de la télésanté. Le recours à la télésanté est particulièrement indiqué lorsque l’accès aux soins est difficile, en raison de l’absence d’un expert à proximité, de contraintes de déplacement du patient, ou d’un besoin d’expertise spécialisée. De plus, dans des contextes exceptionnels, tels que des épidémies ou des catastrophes naturelles, la télésanté peut constituer une solution précieuse.
Le recours à la télésanté dans la prise en charge des plaies dépend du professionnel impliqué. Si le requérant est un médecin, les règles de droit commun s’appliquent sans nécessiter de formalités particulières. En revanche, si le requérant n’est pas médecin, l’intervention est encadrée par un protocole de coopération. Deux protocoles nationaux existent à ce jour : l’évaluation et le suivi des plaies complexes par un infirmier expert dans un réseau de télémédecine, ainsi que la prise en charge pluridisciplinaire des plaies chroniques des membres inférieurs et du pied diabétique par un infirmier en lieu et place du médecin. Par ailleurs, d'autres professionnels de santé, tels que les diététiciens et psychologues, peuvent être mobilisés de manière ponctuelle.
Les types de plaies pouvant être prises en charge par télésanté sont nombreux. Il s’agit notamment des plaies chroniques, comme les ulcères de jambe d’origine veineuse, artérielle ou mixte, les plaies du pied diabétique, les escarres, ainsi que les plaies. Par ailleurs, certaines plaies aiguës, telles que les brulures ou les suivis post-opératoires peuvent également être prises en charge à distance.
La prise en charge des plaies par télésanté repose sur plusieurs actes distincts. La téléconsultation permet une évaluation complète du patient à distance, en tenant compte de son mode de vie et de son historique médical. Cette modalité offre de nombreux avantages, notamment en termes de suivi personnalisé, mais elle nécessite une bonne organisation. La télé expertise, quant à elle, permet à un professionnel d’obtenir l’avis d’un expert à distance, facilitant ainsi l’orientation du patient, de manière asynchrone. Le télé soin consiste à assurer le suivi des pansements et des dispositifs médicaux. Cette approche doit être encadrée par une alternance avec des soins infirmiers en présentiel et une traçabilité rigoureuse dans le Dossier Médical Partagé (DMP). Enfin, la télésurveillance médicale vise à accompagner le patient sur le long terme en surveillant l’évolution de sa plaie, avec la possibilité future d’intégrer des solutions d’intelligence artificielle.
Pour garantir l'efficacité de la télésanté dans le cadre de la prise en charge des plaies, plusieurs prérequis doivent être respectés. Il est impératif de collecter des informations détaillées sur la plaie, telles que son ancienneté, son évolution, les traitements en cours et les examens réalisés. De plus, la prise de photographies de haute qualité est essentielle. Celles-ci doivent être nettes, bien éclairées et prises sous différents angles, à des distances adaptées à la taille de la plaie. Les équipes soignantes doivent également définir précisément les informations nécessaires à recueillir pour une télé expertise ou une téléconsultation efficace. Enfin, la mise en œuvre de la télésanté nécessite une organisation rigoureuse, incluant une coordination optimale entre les différents acteurs du soin, l’utilisation de formulaires standardisés, ainsi que le respect des obligations légales en matière de confidentialité et de consentement du patient.
En conclusion, la télésanté représente un levier stratégique pour améliorer la prise en charge des plaies, en facilitant l’accès aux soins, en optimisant le suivi et en favorisant la collaboration entre les professionnels de santé. Son déploiement doit s’appuyer sur ce document de recommandation de bonne pratique, reprenant des protocoles clairs, proposant des organisations efficaces et portant une attention particulière aux enjeux éthiques et technologiques.
D’après les communications orales de Hester Colboc (Paris) & Cécile Moisan (Saint-Brieuc)
Cette session traite des hématomes disséquants (HD), des plaies aigues potentiellement graves résultant d’un saignement entre les deux couches cutanées ou entre le fascia et l’hypoderme, souvent sur une peau fragilisée. Cette collection hémorragique provoque une dissection des couches sous-cutanées impliquées, et conduit souvent à une nécrose cutanée due à un défaut de vascularisation. Les HD peuvent survenir spontanément ou après des traumatismes d'intensité variable, allant de chocs mineurs contre les barrières de lit à des chutes. Ils se manifestent généralement peu de temps après le traumatisme, mais peuvent parfois prendre quelques semaines avant de devenir apparents
Ces hématomes se développent entre deux couches sous-cutanées, le plus souvent localisé au membre inférieur, occasionnellement sur le front, la poitrine ou les bras. Le vieillissement cutané pathologique, connu sous le nom de dermatoporose, est un facteur prédisposant majeur. Cette condition, qui affecte 37 % des personnes de plus de 60 ans, se caractérise par une atrophie cutanée, un amincissement de la peau et une fragilité accrue. La dermatoporose conduit à une perte de structure cutanée, ne permettant pas de contenir la collection et hémorragique et entrainant donc l’extension de l’HD.
Le diagnostic d’HD est souvent retardé en raison de symptômes non spécifiques (douleur, érythème), pouvant être confondus avec des pathologies comme l’érysipèle, un hématome simple ou une thrombose veineuse profonde. Le diagnostic est clinique, évoqué dans un contexte de traumatisme, avec douleur intense du membre, érythème et augmentation du volume du membre, aspect violacé tendu du toit de l’hématome, avec parfois des phlyctènes signant la souffrance cutanée. On distingue plusieurs formes cliniques, selon la localisation anatomique de la collection hémorragique et aussi l’ancienneté de l’HD au moment du diagnostic, allant de la forme débutante fermée à la forme ouverte spontanée, avec ou sans nécrose de cutanée en regard. Les analyses sanguines (avec notamment dosage de l’hémoglobine) et l'imagerie (scanner, échographie) sont parfois réalisées pour évaluer l’extension de l’HD et éliminer un diagnostic différentiel. En cas de traumatisme, la réalisation d’une radiographie standard permet aussi d’éliminer une éventuelle fracture associée. La gravité de l’HD est déterminée par le volume de l'hématome et son extension. Outre la survenue d’une plaie, les HD, en particulier ceux de grande taille peuvent entraîner de multiples complications, telles qu’une anémie, une surinfection, un syndrome des loges et à l’extrême un choc hémorragique.
Peu d’études cliniques existent actuellement sur le sujet. Kaya et al. ont publié en 2008 la plus grande série d’HD, dans analyse rétrospective de 34 patients. L’âge moyen de ceux-ci était de 81,7 ans, avec une prédominance féminine. Les HD étaient toujours localisés sur la jambe et la grande majorité des patients présentaient une dermatoporose. La moitié des patients étaient traités avec des antagonistes de la vitamine K (AVK) ou des anti-agrégants antiplaquettaires. Les HD étaient souvent mal diagnostiqués en raison de symptômes non spécifiques, 14 patients ayant initialement reçu un diagnostic d'érysipèle, ce qui a entraîné un retard moyen d'hospitalisation de plus de 16 jours.
La prise en charge repose sur plusieurs axes, en trois temporalités. Tout d’abord, la gestion de l’urgence : transfusion si nécessaire, discussion de l’arrêt des traitements anticoagulants et prise en charge antalgique. Dans un deuxième temps, le traitement de la plaie, comportant souvent une vaste perte de substance et des décollements sous cutanés : mise à plat avec excision de la nécrose et décaillotage, suivi du temps de cicatrisation, qui peut nécessiter une thérapie par pression négative puis une greffe en filet ou en pastille. La mise à plat se fait volontiers chez ces patients polypathologiques au lit du malade, surtout sur les HD de taille petite ou moyenne et les HD anciens avec nécrose déjà constituée et sillon d’élimination de la nécrose bien présent. La cicatrisation peut être rendu difficile, dans ces plaies généralement localisées au membre inférieur, par la présence d’une insuffisance veineuse et/ou d’une artériopathie oblitérante des membres inférieurs, qu’il conviendra de traiter pour éviter la chronicisation de ces plaies aigues. Enfin, il conviendra d’avoir une approche globale du patient souvent âgé présentant cet HD, en identifiant notamment la ou les causes de la potentielle chute ayant conduit à la constitution de cette plaie (hypotension orthostatique, iatrogénie médicamenteuse, pathologie cardiaque…)
Enfin, en matière de prévention, plusieurs mesures peuvent être mises en place pour réduire les risques, notamment l’utilisation de dispositifs médicaux protecteurs comme des manchons siliconés sur les membres, la protection des aspérités de l’environnement (protège ridelles sur les lits par exemple), l’éducation des patients et des soignants sur les précautions à prendre (manipulation douce au moment de l’aide à la toilette), ainsi que l’amélioration de l’environnement pour éviter les chutes (tapis, fils électriques…).
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